Question de M. LORIDANT Paul (Essonne - CRC) publiée le 25/07/2002

M.Paul Loridant attire l'attention de M. le Premier ministre sur l'opportunité de surseoir à la réforme de la sécurité nucléaire. Dans son discours de politique générale en 1997 devant l'Assemblée nationale, le Premier ministre Lionel Jospin avait annoncé l'adoption d'une loi visant à assurer plus de transparence et d'indépendance dans le contrôle de la sécurité nucléaire. Cette loi était destinée à renforcer le contrôle démocratique dans ce secteur réputé, à tort ou à raison, pour son opacité. Quatre ans après cette annonce, le bilan se limite à un projet de loi sur la transparence nucléaire adopté en conseil des ministres au début de l'été 2001, qui sera probablement voté lors de la prochaine législature et un projet de réorganisation de certains services administratifs, actuellement en charge des questions de sécurité nucléaire. Alors que l'efficacité de la sécurité nucléaire française repose depuis toujours sur l'équilibre entre l'ingénierie de la sûreté des installations et une approche sanitaire fondée sur l'évaluation des risques et des expositions, l'économie de la réforme administrative annoncée et maintes fois retardée, repose, au nom de la simplicité, sur une centralisation de toutes les fonctions de l'Etat en une seule direction placée sous la tutelle, de fait, du ministère de l'industrie. Ce nouveau dispositif, qui conduirait en fait à une fusion de l'office de protection contre les rayonnements ionisants et de l'institut de protection et de sûreté nucléaire, risque de fragiliser l'action publique et d'appauvrir sa capacité d'expertise. Or cette réforme, en soi discutable, est rendue dangereuse par la conjoncture pour la sécurité de nos concitoyens. C'est sur ce dernier point sans doute que les interrogations sont les plus vives, car elle aura nécessairement pour effet de déstabiliser les services chargés d'assurer les missions régaliennes de l'Etat en matière de sécurité nucléaire, au moins pendant toute la durée de mise en place et de prise en compétence des nouvelles structures. C'est pourquoi, compte tenu du contexte international et des menaces terroristes qui pèsent sur notre pays, en particulier en matière d'attentat nucléaire, il lui demande s'il n'est pas de l'intérêt supérieur de la Nation de surseoir d'urgence et pour quelques mois cet exercice risqué qui peine à aboutir. Ainsi, cela permettrait d'éviter que notre pays se trouve brutalement confronté à une désorganisation de son dispositif de sécurité nucléaire, au moment précis où il est indispensable qu'il soit pleinement opérationnel et motivé. Il ne conviendrait pas en effet que les équipes entraînées et réactives actuelles, notamment celles de l'OPRI, perdent leurs marques au moment où il serait nécessaire de faire appel à elles en cas de crise grave.

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Transmise au Ministère délégué à l'industrie


Réponse du Ministère délégué à l'industrie publiée le 07/11/2002

La question attire l'attention du Gouvernement sur les inconvénients qu'aurait la réforme consistant à réunir les organismes s'occupant de contrôle de la sûreté nucléaire et du contrôle de la radioprotection, au niveau de services de l'Etat et au niveau des organismes d'expertise. Le précédent Gouvernement a motivé cette réforme par l'intérêt de rapprocher la sûreté nucléaire et la radioprotection dans les deux domaines du contrôle et de l'expertise, de façon à les renforcer mutuellement et à améliorer la lisibilité des institutions correspondantes. Il faut reconnaître la complexité des structures précédentes qui participait au sentiment général d'opacité du secteur nucléaire. En outre, la solution mise en oeuvre a permis de régler la question lancinante du statut des personnels de l'office de protection contre les rayonnements ionisants, en leur donnant un statut équivalent à ceux de l'expert en matière de sûreté nucléaire. La réforme semble, à cet égard, avoir été très bien accueillie par les personnels de l'ancien établissement en charge de l'expertise en radioprotection et, par là même, de nature à renforcer leur mission. Pour ce qui concerne la tutelle, le gouvernement précédent a estimé utile d'assurer la cohérence entre les tutelles des deux nouvelles structures créées : la nouvelle direction de l'administration centrale dénommée direction générale de la sûreté nucléaire et de la radioprotection (DGSNR) d'une part et le nouvel établissement public institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) de l'autre. Ainsi, ces deux structures se trouvent sous la triple tutelle des ministères en charge de l'environnement, de l'industrie et de la santé. Compte tenu de la nature de ses missions et du domaine dans lequel elles interviennent, il a par ailleurs paru nécessaire de placer l'établissement public IRSN sous la tutelle complémentaire des ministres en charge de la recherche et de la défense. Dans le cas de l'IRSN, il faut toutefois noter que le rôle de commissaire du Gouvernement auprès de l'établissement a été confié au ministère en charge de l'environnement. Cette tutelle est conjointe. Pour ce qui concerne l'autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection, cela signifie qu'elle est partagée entre les ministères en charge de l'environnement, de l'industrie et de la santé. Les décrets d'attribution des ministres précisent toutefois que la sûreté nucléaire reste une compétence partagée des ministres de l'environnement et de l'industrie, alors que la radioprotection reste la compétence exclusive du ministère chargé de la santé. En tout état de cause, cette réforme a de fait déjà été prononcée, et a fait l'objet de décrets en date du 22 février 2002 (JO du 25 février). La question de l'opportunité de surseoir à ce projet est donc devenue sans objet. Il apparaîtrait à l'inverse déstabilisateur de réaliser un mouvement inverse. Le Gouvernement s'attache désormais à compléter cette réforme en proposant au Parlement d'adopter un projet de loi relatif à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire, qui a été déposé sur le bureau du Sénat et devrait être discuté au cours du premier semestre 2002. Cette discussion pourra être l'occasion d'évoquer les problèmes liés à la sécurité nucléaire dont se préoccupe à juste titre l'honorable parlementaire.

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