Question de M. COQUELLE Yves (Pas-de-Calais - CRC) publiée le 31/01/2003

Question posée en séance publique le 30/01/2003

M. Yves Coquelle. Compte tenu de la gravité du sujet, ma question s'adresse à M. le Premier ministre, ici présent. (Murmures sur diverses travées.)
L'annonce brutale et scandaleuse de la fermeture programmée de l'usine Metaleurop-Nord de Noyelles-Godault est vécue comme un véritable cataclysme humain, social, environnemental dans ce secteur déjà durement touché de l'ex-bassin minier.
Même si, en prononçant le redressement judiciaire, le tribunal de Béthune laisse trois mois de sursis à l'entreprise, l'émoi et la colère suscités par cette liquidation sont à la hauteur de la catastrophe. En effet, monsieur le Premier ministre, ce sont plus de 2 000 emplois qui risquent de disparaître. Une centaine d'entreprises sous-traitantes sont directement impliquées.
Je voudrais rappeler à la Haute Assemblée que, dans ce secteur de l'ex-bassin minier, nous assistons, impuissants, depuis quelques mois, à une cascade de licenciements et de fermetures d'entreprises : Alcatel à Douvrin, Lu à Calais, Solectron à Longuenesse, Grahme à Noeux-les-Mines, les Cokes de Drocourt, Usinor à Biache, Testut à Béthune où un entrepreneur peu scrupuleux rachète l'usine, la laisse progressivement mourir pendant trois ans, puis décide de délocaliser en Asie la production, tout en gardant le nom de cette entreprise centenaire.
M. Dominique Braye. Les 35 heures !
M. Yves Coquelle. Monsieur le Premier ministre, ce sont plusieurs milliers d'emplois qui disparaissent chaque année dans un secteur où le taux de chômage dépasse 25 % de la population active, où le potentiel fiscal de nos communes est l'un des plus bas de France, où les possibilités contributives de nos concitoyens sont très limitées : plus de 60 % des habitants ne sont pas assujetis à l'impôt sur le revenu.
M. Didier Boulaud. Encore moins à l'impôt sur la fortune !
M. Yves Coquelle. Ce qui arrive aujourd'hui à Metaleurop est intolérable !
De même, la liquidation judiciaire de l'usine Daewoo en Meurthe-et-Moselle, prononcée lundi par le tribunal de commerce de Briey, inquiète énormément mon amie Evelyne Didier, sénatrice de ce département.
Cette décision va entraîner la suppression de 550 emplois directs, ce qui constitue une véritable catastrophe pour le bassin de Longwy, alors que l'usine Daewoo, inaugurée en 1996, a bénéficié de plus de 34 millions d'euros d'aides directes françaises et européennes.
Or, au moment où les plans sociaux se multiplient, la loi Hue, qui prévoyait de renforcer les contrôles des fonds publics accordés aux entreprises, vient d'être abrogée sur l'initiative de la droite sénatoriale, comme viennent d'être suspendues toutes les dispositions de la loi de modernisation sociale.
Mme Nicole Borvo. Bien entendu !
M. le président. Posez votre question !
M. Yves Coquelle. Monsieur le Premier ministre, démonstration est faite que le MEDEF, par votre politique, a la main totalement libre pour délocaliser et licencier à tour de bras.
M. Dominique Braye. Les 35 heures !
M. Yves Coquelle. Au lieu de projeter une nouvelle réforme de l'impôt sur la fortune apportant de nouveaux cadeaux au capital, nous vous demandons expressément de rétablir des lois qui interdisaient aux patrons de se comporter comme des chasseurs de prime sans scrupules en n'hésitant pas à jeter à la rue des milliers de salariés tout en bénéficiant de très importants fonds publics.
M. le président. Veuillez conclure, monsieur Coquelle. (Vives exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. Yves Coquelle. Il est urgent de rétablir ces mesures dans l'intérêt de la France et des Français.

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Réponse du Ministère délégué à la parité et à l'égalité professionnelle publiée le 31/01/2003

Réponse apportée en séance publique le 30/01/2003

Mme Nicole Ameline, ministre déléguée à la parité et à l'égalité professionnelle. Monsieur le sénateur, vous le savez, le Gouvernement a été profondément choqué par l'attitude parfaitement immorale des dirigeants d'entreprises qui détournent les lois pour éviter d'avoir à assumer leur responsabilité sociale et environnementale.
Mme Nicole Borvo. Tellement choqué qu'il a fait abroger toutes les dispositions de la loi Hue !
M. Nicolas About. Ecoutez Mme Ameline !
Mme Nicole Ameline, ministre déléguée. Le Premier ministre lui-même et les ministres travaillant sur ces dossiers, notamment François Fillon, ont donc souhaité rencontrer, mardi dernier, les responsables syndicaux de Metaleurop et les élus locaux concernés, dont nous saluons la dignité, le pragmatisme et le sens des réalités.
M. Didier Boulaud. Il veut mettre en place une table ronde !
Mme Nicole Ameline, ministre déléguée. Le Gouvernement assume et assumera ses responsabilités, toutes ses responsabilités. (M. Didier Boulaud s'exclame.)
Mme Nicole Borvo. Il met les travailleurs au chômage bien avant l'âge de la retraite !
Mme Nicole Ameline, ministre déléguée. Toutes les procédures, notamment celles que vous n'avez jamais envisagées en pareil cas, sont actuellement examinées par nos experts. (Protestations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste. - Vifs applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Dominique Braye. Très bien ! Bravo !
Mme Nicole Ameline, ministre déléguée. Toutes les poursuites vont être engagées envers le groupe et son actionnaire de référence, Glencore, pour obtenir d'eux le financement du passif social et environnemental.
Dans l'immédiat, nous pensons aux salariés victimes. (Mme Nicole Borvo s'exclame.)
Nous souhaitons les accompagner par l'ensemble des moyens qui seront mobilisés de manière exceptionnelle...
M. Didier Boulaud. Lesquels ?
M. René-Pierre Signé. Un accompagnement dans la durée ?
Mme Nicole Ameline, ministre déléguée. ... pour leur apporter, à travers les cellules de reclassement, les préretraites, la formation, le droit au reclassement auquel, naturellement, ils peuvent prétendre.
Par ailleurs, et je le dis pour l'usine Daewoo, il y aura également une mobilisation tout à fait exceptionnelle. (Vives protestations sur les travées du groupe CRC.)
Mme Marie-Claude Beaudeau. Vous ne croyez même pas à ce que vous dites !
Mme Nicole Ameline, ministre déléguée. Je termine en rappelant simplement que nous mobiliserons, à travers les contrats de territoires, l'effort de la nation dans le cadre d'une solidarité locale pour permettre de faire face à ces restructurations industrielles que vous n'avez pas su prévoir. (Vives protestations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste - Exclamations sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.) Et pour lesquelles nous assumerons, je le répète, nos responsabilités.

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