Question de M. AUTAIN François (Loire-Atlantique - CRC-SPG-R) publiée le 24/01/2003
M. François Autain appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales sur les difficultés rencontrées par les maires pour garantir la sécurité dans les établissements recevant du public (ERP). La sécurité est réglementée par le Code de la construction et de l'habitation, qui confie au maire le soin de prendre ou non la décision d'ouverture ou de fermeture après avis de la commission de sécurité. Le maire est libre de sa décision et peut, malgré un avis défavorable de la commission, décider l'ouverture d'un nouvel ERP ou maintenir l'ouverture d'un ERP existant. Ce faisant, il engage naturellement sa responsabilité personnelle en cas de dommage. Concernant les ERP appartenant à la commune, cette situation se conçoit parfaitement, alors que pour les autres elle est contestable. En effet, dans ce cas, le maire ne dispose ni de la compétence requise de mise en oeuvre des mesures légales de sécurité ni de celle du contrôle de l'application de ces mesures, même s'il est membre de la commission compétente. De tels cas de figure tendent à se multiplier, qu'il s'agisse par exemple des écoles, des crèches ou encore des maisons d'accueil pour personnes âgées ou handicapées. En cas d'avis défavorable de la commission, la raison voudrait qu'une décision de fermeture soit prise. Il le laisse cependant imaginer la gravité des conséquences qu'entraînerait une telle décision pour ce type d'établissements. Malgré cela, et pour bien marquer son refus d'assumer des responsabilités qu'il n'a pas les moyens d'exercer, le maire de la commune dont il est l'élu, et qu'il soutient, a fait voter une délibération visant à se conformer strictement et systématiquement aux avis de la commission de sécurité qui concernent les ERP non communaux. Il a en outre invité tous les maires de la communauté urbaine de Nantes à l'imiter. Ainsi, en cas d'avis défavorable de la commission, il prendra des arrêtés de refus d'ouverture de nouveaux ERP ou de fermeture d'ERP existants, et cela quelle que soit la nature des établissements concernés. Afin de sortir d'une situation juridique inextricable, il lui demande si une réforme de la réglementation ou de la législation est envisagée pour sortir de l'impasse où se trouvent aujourd'hui de nombreux maires, avec toutes les conséquences pénales qui peuvent en découler.
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Réponse du Ministère délégué aux libertés locales publiée le 26/03/2003
Réponse apportée en séance publique le 25/03/2003
M. le président. La parole est à M. François Autain, auteur de la question n° 155, adressée à M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
M. François Autain. J'ai souhaité appeler l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur les difficultés rencontrées par les maires pour garantir la sécurité dans les établissements recevant du public, les ERP. Celle-ci est réglementée par le code de la construction et de l'habitation, qui confie au maire le soin de prendre ou non la décision d'ouverture ou de fermeture de ces établissements, après avis de la commission de sécurité. Le maire est libre de sa décision et peut, malgré un avis défavorable de la commission, décider l'ouverture d'un nouvel ERP ou maintenir l'ouverture d'un ERP existant. Ce faisant, il engage naturellement sa responsabilité personnelle en cas de dommage.
S'agissant des ERP appartenant à la commune, cela se conçoit parfaitement alors que, pour les autres, cela me semble contestable. En effet, dans ce cas, le maire ne dispose ni de la compétence requise de mise en oeuvre des mesures légales de sécurité ni de celle du contrôle de l'application de ces mesures, même s'il est membre de la commission compétente.
De tels cas de figure tendent à se multiplier, qu'il s'agisse par exemple des écoles, des crèches ou encore des maisons d'accueil pour personnes âgées ou handicapées. En cas d'avis défavorable de la commission, la raison voudrait qu'une décision de fermeture soit prise. Je vous laisse imaginer, monsieur le ministre, la gravité des conséquences que pourrait entraîner une telle décision.
Malgré cela, pour bien marquer son refus d'assumer des responsabilités qu'il n'a pas les moyens d'exercer, le maire de la commune dont je suis l'élu a fait voter une délibération visant à se conformer strictement et systématiquement aux avis de la commission de sécurité qui concernent les ERP non communaux. Il a en outre invité tous les maires de la communauté urbaine de Nantes à l'imiter. Ainsi, en cas d'avis défavorable de la commission, il prendra des arrêtés de refus d'ouverture de nouveaux ERP ou de fermeture d'ERP existants, et cela quelle que soit la nature des établissements concernés.
Personne, me semble-t-il, n'a intérêt à voir cette situation malsaine perdurer. C'est pourquoi j'aimerais savoir, monsieur le ministre, quelles mesures sont envisagées pour mettre fin à cette situation, dont les maires peuvent subir les conséquences pénalement. Il y a urgence à trouver une solution.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué aux libertés locales. Monsieur le sénateur, au-delà de la question technique, simple et définitive, voilà une vraie question morale, une vraie question de responsabilité !
Quelle est la situation actuelle ?
Très souvent, les commissions de sécurité, agissant d'une façon extrêmement tatillonne, souhaitent couvrir leur responsabilité en relevant tout ce qui est en dehors de la pure perfection.
Cela a parfois pour conséquence d'entraîner des dépenses considérables pour les collectivités ou pour ceux qui sont en charge des établissements recevant du public ; se pose alors la question de la responsabilité du maire.
L'attitude du maire que vous soutenez n'est pas critiquable ; au contraire, c'est une manière de prendre ses responsabilités et de renvoyer les commissions de sécurité à une plus juste appréciation des conséquences de leurs rapports. Je ne vois donc pas ce que l'on pourrait changer à la règle actuellement en vigueur.
Bien sûr, quand les maires décident de ne pas appliquer la loi, ils engagent leur responsabilité personnelle. Si l'on en venait à les dégager de cette responsabilité à chaque fois qu'ils considèrent, en fonction des circonstances, qu'il y a lieu de passer outre l'avis de la commission de sécurité, le système n'aurait plus de sens, la commission de sécurité ne servirait plus à rien.
A l'inverse, si les maires respectent scrupuleusement les avis de la commission de sécurité, on arrivera très rapidement à une situation de blocage.
Dans ces conditions, la véritable solution réside peut-être dans une responsabilisation des commissions de sécurité.
Les maires ont eu beaucoup de courage d'aller jusqu'à engager éventuellement leur responsabilité pénale dans ce type de situation. A un moment donné, il faut qu'ils responsabilisent les acteurs, qui sont si prompts à ouvrir le parapluie pour se mettre à l'abri de tout reproche. C'est peut-être un moyen de faire évoluer le système et, au-delà, d'aller vers une réglementation moins changeante.
En effet, la réglementation change trop souvent, tout en étant de plus en plus contraignante, de plus en plus coûteuse et, finalement, de plus en plus déresponsabilisante.
M. le président. La parole est à M. François Autain.
M. François Autain. Votre réponse ne m'a pas entièrement satisfait, monsieur le ministre, mais je suis tout de même très heureux de constater que vous soutenez la décision qui a été prise par le maire de la commune dont je suis le conseiller municipal. Je lui ferai part, bien entendu, de votre réponse et je pense qu'elle sera très heureuse d'apprendre que le ministre délégué aux libertés locales la soutient dans son action.
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