Question de M. BOYER Jean (Haute-Loire - UC) publiée le 13/02/2003
M. Jean Boyer attire l'attention de M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation sur l'organisation des services publics et des services de proximité en milieu rural. Les politiques nationales, trop souvent sectorielles et cloisonnées, n'ont pas suffisamment pris en compte, ces dernières années, les conséquences des évolutions démographiques. Les collectivités ont mis en oeuvre des politiques de développement des territoires ruraux, sans toujours trouver dans les dispositifs nationaux l'accompagnement souhaitable et adapté aux difficultés inhérentes au contexte local. Il faut certes des équipements mais les hommes ont aussi besoin de points de rencontres, d'échanges. La crainte de certains agriculteurs n'est pas de manquer de surfaces, mais de voisins ! Nous ne pouvons qu'approuver la volonté de l'Etat à définir une politique nouvelle en faveur de l'initiative économique. Encore faut-il que demain cet engagement vienne non seulement proposer une légitime compensation du " handicap naturel " pour les zones de montagne et le monde rural, mais vienne aussi apporter un témoignage de solidarité ? Il convient de réagir par une politique ambitieuse. L'esprit de l'action du secrétariat d'État chargé du commerce et de l'artisanat doit marquer de son empreinte une démarche spécifique au travers par exemple d'un moratoire qui pourrait permettre à nos services publics, mais aussi à nos services de proximité quels qu'ils soient, de faire preuve s'il en était besoin de leur utilité mais aussi et surtout de leur efficacité. Il importe de les pérenniser par des mesures de bon sens, de réalisme basées sur des prescriptions raisonnées et raisonnables. Oui, nous devons avoir à l'esprit que la notion de service public doit être une notion de solidarité, mais aussi être convaincus que le secteur privé tient une place indispensable dans la vie sociale d'un pays : c'est là où les gens se retrouvent, se rassemblent, échangent, parfois se réconfortent en combattant l'individualisme. Il fait ainsi référence au service bancaire, à la presse, à la régie des tabacs et même au téléphone public en 2003. Les mesures nouvelles ne doivent pas alourdir la législation, s'empiler, se chevaucher, être synonyme de lourdeurs, d'incompréhensions, de confusions car elles décourageraient et génèreraient l'abandon des projets. La logique économique ne doit pas être prioritaire. Il l'interroge sur l'opportunité de la mise en place par exemple comme en agriculture d'une dotation, spécifique au milieu rural, d'installation réservée ? Le monde rural profond est malade, il est temps de le sauver par des décisions courageuses. Il lui demande ce qu'il envisage de faire pour enrayer les difficultés.
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Réponse du Ministère délégué au commerce extérieur publiée le 26/03/2003
Réponse apportée en séance publique le 25/03/2003
M. le président. La parole est à M. Jean Boyer, auteur de la question n° 178, adressée à M. le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation.
M. Jean Boyer. Ma question porte sur l'organisation des services publics et des services de proximité en milieu rural.
Comme on le sait, le monde rural a subi un fort déclin au cours du xxe siècle. Les agglomérations urbaines concentrent aujourd'hui près de 80 % de la population.
Les politiques nationales, trop souvent sectorielles et cloisonnées, n'ont pas suffisamment pris en compte, ces dernières années, les conséquences de ces évolutions. Les régions, les départements et les communes, désormais souvent regroupées en communautés de communes, ont mis en oeuvre des politiques de développement, mais n'ont pas toujours trouvé, dans les dispositifs nationaux, l'accompagnement indispensable afin d'inverser la tendance et d'éviter que la situation ne soit irrémédiable.
Nous ne pouvons qu'approuver la volonté de l'Etat de définir une politique nouvelle en faveur de l'initiative économique, par le biais d'un projet de loi présenté aujourd'hui même devant notre assemblée. Une politique de l'Etat existe, mais elle ne prend pas suffisamment en considération l'impérative nécessité de compenser le handicap naturel du monde rural et des zones de montagne. La solidarité économique, c'est aussi la compensation des handicaps.
La France, pour son monde rural, a besoin d'une nouvelle dynamique économique. Oui, des décisions plus courageuses, plus solidaires doivent être prises afin de favoriser les installations dans l'artisanat, le commerce et l'agriculture, liées aux secteurs ruraux. C'est le travail qui attache à un pays, qui appelle à venir y résider et qui permet une vie sociale équilibrée.
Nous ne pouvons laisser mourir des pans entiers de nos espaces ni renoncer, nous résigner à un abandon de l'initiative locale. Il convient de réagir, aujourd'hui encore et plus que jamais, par une politique ambitieuse. L'esprit qui sous-tend l'action du Gouvernement doit marquer de son empreinte une démarche spécifique, au travers par exemple d'un moratoire qui pourrait assurer la pérennité de nos services publics, mais aussi de nos services de proximité. Il faut appliquer les règles avec bon sens.
Ainsi, dans bien des communes de montagne, le dernier commerce constitue à lui seul un lieu d'expression et de relais du service public. Il remplit des missions indispensables à une vie normale, allant du service postal au service bancaire, de la régie des tabacs à la distribution de la presse, des liaisons téléphoniques aux connexions par l'Internet...
Nos ruraux ont droit à la parité sociale et économique. C'est pourquoi il me paraît extrêmement important de tout mettre en oeuvre pour assurer, dans les meilleures conditions possible, la création, le développement, la transmission et la pérennisation de ces petites entreprises familiales. Simplifions ensemble les règles qui permettent de faire face à ces nécessités impérieuses ! Entre la rigidité administrative et la mort présumée de nos petites « officines de proximité », il y a l'espace du bon sens.
L'action du Gouvernement doit autoriser, dans certains cas, l'assouplissement des règles relatives à la mise aux normes, à la transmission, aux seuils d'accessibilité et de rentabilité...
Par ailleurs, tout en encourageant l'esprit d'initiative et d'entreprise, il importe aussi de soustraire nos services publics locaux au diktat de la logique purement économique, en autorisant le maintien de nos petites administrations locales. Tout cela va de pair en milieu rural, et relève d'une nécessaire complémentarité. Ces services publics oeuvrent sans relâche au profit de l'intérêt général, de la vie locale, en assumant des missions de conseil et d'écoute d'une importance inestimable, pour épauler et guider les élus locaux.
Monsieur le ministre, je souhaiterais vivement, et avec moi l'ensemble du monde rural, savoir précisément quel est l'engagement du Gouvernement en vue de libérer les initiatives économiques au coeur de l'espace rural et de montagne. Il en va de l'attractivité et de la survie d'une partie de notre territoire.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Loos, ministre délégué au commerce extérieur. Monsieur le sénateur, la question que vous avez soulevée est évidemment essentielle, et nous souhaitons pouvoir apporter une réponse adéquate et appropriée à vos préoccupations. Tout à l'heure, l'un de vos collègues représentant le département de l'Hérault a d'ailleurs interrogé le Gouvernement sur le même thème, s'agissant plus particulièrement de l'avenir des établissements publics financiers.
Le Gouvernement est tout à fait conscient de la nécessité de maintenir sur l'ensemble du territoire national, en particulier dans les zones rurales défavorisées, un tissu économique solide et une implantation satisfaisante des services publics. C'est la raison pour laquelle il s'est engagé dans une ambitieuse politique de développement rural. Il met au point, à l'heure actuelle, une série de mesures qui seront réunies dans un projet de loi portant précisément sur ce sujet. Il sera prochainement présenté au Parlement par mon collègue Hervé Gaymard.
Pour ce qui concerne plus particulièrement le secteur des petites et moyennes entreprises, du commerce et de l'artisanat, qui constitue effectivement un vivier remarquable d'activités créatrices d'emplois implantés sur l'ensemble du territoire, je rappelle que le projet de loi pour l'initiative économique, qui sera examiné cette semaine par le Sénat, comprend de nombreuses mesures visant à favoriser tant la création que le développement et la transmission d'entreprises.
Ces mesures, qui ont vocation à s'appliquer, quelle que soit la forme juridique de l'entreprise et quel que soit le statut de son créateur, sur l'ensemble du territoire, trouveront naturellement, dans les zones rurales, une justification particulière.
Ces mesures répondent au souci d'alléger les contraintes, de lever les réticences et donc d'encourager celles et ceux qui veulent entreprendre à le faire. Il s'agit donc moins d'apporter une assistance financière directe, telle que celle-ci a pu être conçue pour faciliter le nécessaire renouvellement des générations par le biais de la dotation d'installation des jeunes agriculteurs, que de créer un environnement favorable à l'initiative et à l'entreprise, afin de tout mettre en oeuvre pour tenir l'engagement du Président de la République : créer un million d'entreprises en cinq ans.
D'ores et déjà, le fonds d'intervention pour la sauvegarde de l'artisanat et du commerce, le FISAC, aide à la création ou au maintien de commerces de proximité en zone rurale, et ses moyens d'action sont renforcés à cette fin : les investissements correspondant aux projets éligibles - dont les commerces multiservices - sont désormais aidés au taux de 30 % au lieu de 20 % dans les communes de moins de 2 000 habitants. Cela ressort d'un décret du 5 février 2003, d'un arrêté du 13 février 2003 et d'une circulaire du 17 février 2003. Vous voyez avec quelle rapidité cette mesure a été mise en oeuvre.
Le FISAC peut également financer des opérations collectives de modernisation de l'artisanat, du commerce et des services en milieu rural, en particulier pour les pays, les groupements de communes rurales et les bassins d'emplois ruraux : peuvent être aidées en particulier les dépenses d'investissement relatives à la modernisation des entreprises et des locaux d'activité. Entre 1999 et 2002, près de 103 millions d'euros ont été affectés sur la ligne budgétaire du FISAC au commerce et à l'artisanat en milieu rural. Pour 2003, l'enveloppe susceptible d'être consacrée à ces opérations est de 13 millions d'euros.
Ces différents éléments sont constitutifs d'une politique cohérente de soutien à des activités économiques essentielles, dans le respect de la liberté du commerce et des règles d'une concurrence équilibrée sur l'ensemble du territoire.
M. le président. La parole est à M. Jean Boyer.
M. Jean Boyer. Monsieur le ministre, pardonnez la véhémence de mon propos. Mais, élu d'un département où l'habitat moyen est le plus élevé, avec dix-huit cantons sur trente-cinq situés en zone de revitalisation rurale, j'ai de la peine lorsque je vois partir certaines activités sans pouvoir les retenir.
Je suis conscient de la volonté du Gouvernement, mais on ne peut inverser les tendances de fond en un instant. L'état d'esprit joue un rôle, comme l'effet de contagion, pour générer des activités ou, au contraire, les faire disparaître. Notre ami M. Hervé Gaymard, qui habite dans un département de montagne, m'a fait part de sa volonté. Monsieur le ministre, je serai à vos côtés pour faire en sorte que la législation soit la plus efficace possible.
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