Question de M. GOULET Daniel (Orne - UMP) publiée le 26/02/2003
M. Daniel Goulet attire l'attention de M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire sur la saisine de la délégation à l'aménagement du territoire et à l'action régionale (DATAR). A l'heure du 40e anniversaire de sa création, la DATAR est plus que jamais un instrument décisif du développement économique équilibré des territoires. Aussi, pour rendre ses expertises plus accessibles, le Gouvernement ne pourrait-il pas envisager d'en faciliter la saisine ? En effet, en ouvrant la saisine aux élus, aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) comme aux associations, la DATAR se rapprocherait encore des citoyens qui pourraient ainsi bénéficier de ses analyses et de ses actions. Il lui demande sa position sur cette suggestion.
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Réponse du Ministère de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire publiée le 28/05/2003
Réponse apportée en séance publique le 27/05/2003
M. Daniel Goulet. Monsieur le ministre, les élus de nos départements et de nos régions, les animateurs des pays et des établissements publics de coopération intercommunale, les EPCI, sont les acteurs « naturels » de l'aménagement équilibré du territoire. Ils le seront demain davantage encore avec les nouvelles lois de décentralisation.
Or, si ces élus ont la pratique du terrain et la volonté politique de s'investir, ils manquent le plus souvent d'expertise et de conseil comme, le plus souvent également, de moyens techniques et financiers.
Monsieur le ministre, la Délégation à l'aménagement du territoire et à l'action régionale, la DATAR, dont on se plaît à reconnaître l'utilité, la compétence et l'importance depuis sa création, ne pourrait-elle pas être l'instrument décisif de la réflexion afin de répondre aux préoccupations des collectivités territoriales ? A cet effet, à la veille d'une décentralisation aussi souhaitable qu'inquiétante, le Gouvernement ne devrait-il pas élargir les possibilités de saisine de la DATAR ?
Je m'explique : en ma qualité de sénateur et de premier vice-président de la région de Basse-Normandie, je suis un « aménageur » du territoire. Ma région et mon département, celui de l'Orne, ont subi des séismes successifs, le séisme Moulinex, les séismes agricoles, etc. Or nous bénéficierons dans les prochaines années de deux autoroutes qui sont, d'ores et déjà, en cours de réalisation.
Au regard de ces opportunités qui nous sont promises, qu'allons-nous faire ? Chacune des collectivités traversées prépare son propre projet et fait, si je puis dire, sa petite cuisine dans son coin, sans souci de cohérence territoriale.
L'expertise de la DATAR est, selon moi, d'une importance capitale pour aider les collectivités locales et les éclairer sur les possibilités et sur les écueils qui parsèment les voies de leur développement, surtout au regard de l'aménagement harmonieux et équilibré des territoires. Pourtant, cette expertise ne me semble pas directement accessible. Mais peut-être démentirez-vous mes propos.
La saisine de la DATAR ne dépend-elle pas d'une demande des responsables préfectoraux et départementaux ? Cette situation découle certes de la nature même de la DATAR, mais ne pensez-vous pas, monsieur le ministre, que ses services, au demeurant remarquables et reconnus de tous, devraient pouvoir profiter au plus grand nombre ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Paul Delevoye, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire. Monsieur le sénateur, permettez-moi tout d'abord de vous remercier des appréciations positives que vous avez formulées à l'égard de la DATAR. Chacun se rend compte aujourd'hui de l'intérêt pour les élus d'avoir une conception prospective en la matière, afin que leur territoire puisse relever le défi de la compétitivité territoriale. A l'évidence, la DATAR joue un rôle de prospective et d'anticipation à cet égard.
Hier, lors du CIADT, le comité interministériel pour l'aménagement et le développement du territoire, la DATAR a, par exemple, très clairement confirmé - et je le dis devant M. Gaudin - que la ville de Marseille est bien une capitale euroméditerranéenne, ce qui était le voeu de son maire.
Aujourd'hui, nous ne devons plus raisonner uniquement en fonction d'un aspect purement local ou territorial. Nous avons vocation à donner à nos métropoles un rayonnement international et la DATAR a très clairement affiché ce souci de prospective.
Vous évoquez, monsieur le sénateur, la situation du département de l'Orne, dont personne ne devrait se plaindre qu'il soit demain traversé par deux autoroutes. Quelle opportunité, quelle chance !
Vous avez l'avantage d'être considéré par certains de vos collègues comme des privilégiés. Mais rassurez-vous : je ne vois aucune liaison entre la présence du ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire dans ce département et l'observation que vous formulez. (Sourires.)
A l'évidence, il appartient aux territoires de définir leurs propres projets et aux élus territoriaux de mettre en synergie leurs complémentarités et leurs différences pour faire aboutir un projet collectif. L'éparpillement des offres affaiblirait l'offre territoriale.
Pour garantir l'égalité des chances des territoires, il faut effectivement mettre à la disposition des décideurs politiques locaux l'ingénierie nécessaire. La DATAR doit donc, non seulement avoir un oeil sur le monde et sur l'Europe, mais aussi être en contact avec les décideurs locaux pour les faire bénéficier de ses capacités d'analyse prospective sur les mutations économiques.
Cela étant, monsieur le sénateur, permettez-moi de dire avec toute l'amitié et la considération que j'ai pour les élus locaux que c'est à eux qu'il revient de faire preuve de sagesse ou non. Personne ne pourra décider à la place des responsables locaux, le choix leur appartient.
Veulent-ils gérer au quotidien ou veulent-ils, au contraire, avoir une vision d'avenir qui permette de donner un souffle au dynamisme local ? C'est d'eux que dépend la réussite d'une politique territoriale.
Je rends hommage à cet égard à M. Gaudin : sans sa volonté politique et son ambition, sans celle des élus locaux, appuyée par la DATAR, ce qui est aujourd'hui une des plus belles réussites euro-méditerranéenne, n'existerait pas.
La DATAR ne pourra pas faire le bonheur des élus locaux malgré eux. Si l'intelligence, l'ingénierie, la capacité d'analyse sont indispensables, le projet politique appartient aux décideurs locaux.
M. le président. Monsieur le ministre, les décisions du CIADT d'hier ne m'avaient pas échappé, et j'ai été très sensible à tous les efforts que vous avez accomplis pour que Marseille bénéficie d'une importante décision de délocalisation. Je le disais à M. Mercier tout à l'heure : en dix ans, Lyon a accueilli quarante délocalisations, Marseille aucune. C'est la première fois que nous allons bénéficier d'une mesure de cette importance.
Je tenais à vous en remercier, d'autant que, ayant exercé dans le passé les mêmes responsabilités ministérielles que celles que vous exercez brillamment aujourd'hui - vous êtes toujours à l'écoute des parlementaires et des élus locaux -, je sais la difficulté qu'il y a à faire des choix et, surtout, à convaincre des Parisiens qu'ils peuvent aller travailler en province.
La parole est à M. Daniel Goulet.
M. Daniel Goulet. Votre intervention est tout à fait pertinente, monsieur le président, et va dans le sens de la mienne.
J'ai fort bien compris que ce que ne feront pas les élus locaux directement concernés, personne ne le fera à leur place. C'est une évidence.
Ce que je voulais souligner, c'est notre désir, à nous, parlementaires, de pouvoir saisir la DATAR afin que, en tant que prestataire de services - si je puis employer cette expression - elle puisse se rendre disponible, et ce non seulement lorsqu'elle est sollicitée officiellement par des autorités régionales ou départementales, mais aussi quand elle est saisie par des parlementaires.
Nous pourrions ainsi apporter aux élus locaux les conseils qu'ils attendent. Nous pourrions servir de lien entre la DATAR et les élus locaux qui n'auraient pas fait les démarches nécessaires.
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