Question de M. OUDIN Jacques (Vendée - UMP) publiée le 27/02/2003
M. Jacques Oudin attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur l'incompatibilité de la législation relative à la privatisation des entreprises publiques avec le droit communautaire. Il relève qu'en vertu de l'article 10 de la loi n° 86-912 relative aux modalités des privatisations en date du 6 août 1986 un décret détermine pour chacune des entreprises mentionnées à l'article 2 de la loi de privatisation n° 93-923 du 19 juillet 1993 si la protection des intérêts nationaux exige qu'une action ordinaire de l'Etat soit transformée en une action spécifique (encore appelée " Golden Share ") par laquelle l'Etat bénéficierait de droits spécifiques (agrément du ministre en charge de l'économie et des finances pour le franchissement de seuils calculés en pourcentage du capital social ou en droits de vote ; pouvoir de nomination de représentants de l'Etat au sein des conseils d'administration ou de surveillance des entreprises concernées ; pouvoir de s'opposer aux décisions de cession d'actifs). Il indique que par trois arrêts rendus en juin 2002 (CJCE, aff. C-367/98, 4 juin 2002, Commission c/République portugaise ; aff. C-483/99, Commission c/République française ; aff. C-503/99, Commission c/Royaume de Belgique), la Cour de justice de la Communauté européenne a condamné les actions spécifiques détenues par les Etats. Dans la perspective des prochaines ouvertures du capital social de plusieurs entreprises françaises, toute action relevant de l'article 10 susmentionné se révélerait en contradiction avec le droit communautaire. Il lui demande quelles modifications seront apportées à la législation relative aux privatisations en vue d'assurer sa conformité au droit communautaire.
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Réponse du Ministre de l'économie, des finances et de l'industrie publiée le 12/06/2003
L'arrêt de la Cour de justice des communautés européennes ne semble pas censurer dans son principe le système de l'action spécifique qui traduit le principe constitutionnel de protection des intérêts nationaux (cons. n° 60 de la décision n° 86-207 DC des 25 et 26 juin 1986 et cons. n° 6 de la décision n° 89-254 DC du 4 juillet 1989). En effet, comme l'y invitait le Gouvernement français, la Cour a admis que la garantie de la sécurité des approvisionnements en produits pétroliers en cas de crise relevait d'un but légitime et se rattachait à l'une des exceptions à la liberté de circulation des capitaux à l'intérieur de l'Union prévue par l'article 56 du traité CE, à savoir la sécurité publique. La condamnation prononcée par la Cour de justice des Communautés européennes repose sur le fait que l'insuffisance d'encadrement des pouvoirs de contrôle de l'Etat porte une atteinte disproportionnée à la sécurité juridique des investisseurs soumis à ce contrôle. Cette action spécifique a d'ailleurs été supprimée par le décret n° 2002-1231 du 3 octobre 2002.
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