Question de M. POIRIER Jean-Marie (Val-de-Marne - UMP) publiée le 13/05/2004

M. Jean-Marie Poirier souhaite appeler l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales sur l'application de l'article L. 126-3 du code de la construction et de l'habitation relatif aux rassemblements dans les halls d'immeuble. La loi n° 2003-239 pour la sécurité intérieure du 18 mars 2003 a créé un article L. 126-3 du code de la construction et de l'habitation relatif à " l'entrave apportée, de manière délibérée, à l'accès et à la libre circulation des personnes ou au bon fonctionnement des dispositifs de sécurité et de sûreté " mais aussi aux " voies de fait ou la menace de commettre des violences contre une personne ". Les infractions concernées sont celles " commises en réunion de plusieurs auteurs ou complices, dans les entrées, cages d'escalier ou autres parties communes d'immeubles collectifs d'habitation ". La loi offre désormais aux policiers un cadre juridique pour effectuer des contrôles d'identité, éventuellement suivis de gardes à vue, dans les lieux privés que sont les halls d'immeuble et pénalise sous la forme d'une amende de 3 750 euros et de deux mois d'emprisonnement les délits d'entrave. Mesure destinée à lutter contre le sentiment d'insécurité dans les quartiers difficiles, ce texte connaît néanmoins de sérieuses difficultés d'application. En effet, avec les froids de l'hiver, les rassemblements de jeunes se sont déplacés à l'intérieur des bâtiments augmentant les récriminations des locataires. Cependant malgré les nombreuses plaintes portées à la connaissance des bailleurs, les interventions de la police ne sont pas aussi fréquentes que le souhaiteraient les habitants. Si l'on se réfère aux statistiques du ministère, 238 infractions ont été constatées par les services de police et de gendarmerie depuis l'entrée en vigueur du dispositif alors que les réclamations auprès des bailleurs sont dix fois plus nombreuses. Ce bilan mitigé s'explique en partie par les importants moyens tant matériels qu'humains qu'exige le dispositif. Dans des périodes où le plan vigipirate est activé, comme c'est le cas actuellement, il paraît difficile de pouvoir disposer des effectifs de police suffisants, ceux-ci étant chargés de la surveillance de nombreux autres secteurs. Par ailleurs, si, comme le souligne la circulaire du garde des sceaux relative à la mise en oeuvre de la loi sur la sécurité intérieure du 3 juin 2003, il convient d'éviter la pénalisation à outrance et de privilégier les alternatives comme le rappel à la loi ou la réparation, il paraît néanmoins souhaitable de poursuivre pénalement les auteurs d'infractions dans de nombreux cas. A Paris, quatre-vingts personnes ont fait l'objet d'une poursuite judiciaire et vingt seulement ont été déférées au parquet. La difficulté à prouver l'entrave délibérée et à recueillir des témoignages du fait de la peur des représailles explique en partie le faible taux de déferrement. L'impossibilité de recourir à la comparution immédiate, à cause du seuil de la peine encourue (deux mois au lieu des six mois minimum) constitue également un frein au déferrement devant la justice. Il lui demande en conséquence quelles initiatives le Gouvernement compte prendre afin de remédier aux difficultés d'application constatées et pour rendre enfin efficace cette disposition destinée à répondre à un problème tristement emblématique de la vie des banlieues.

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Transmise au Ministère délégué aux relations du travail


Réponse du Ministère délégué aux relations du travail publiée le 05/08/2004

En adoptant l'article 61 de la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure, le législateur a expressément reconnu la nécessité de sanctionner les comportements inadmissibles que constituent les attroupements portant atteinte à la libre circulation des personnes dans les parties communes des immeubles d'habitation. Il a, en conséquence, inséré dans le code de la construction et de l'habitation un article L. 126-3 qui réprime les entraves à la libre circulation des personnes dans les parties communes des immeubles. Sont ainsi sanctionnées les voies de fait ou la menace de commettre des violences contre une personne ou l'entrave apportée, de manière délibérée, à l'accès et à la libre circulation des personnes ou au bon fonctionnement des dispositifs de sécurité et de sûreté, lorsqu'elles sont commises en réunion de plusieurs auteurs ou complices, dans les entrées, cages d'escaliers ou autres parties communes d'immeubles collectifs d'habitation. Ces faits sont punis de deux mois d'emprisonnement et de 3 750 euros d'amende. En une année d'application de la loi (avril 2003 - avril 2004), le nombre d'infractions constatées est de 448 (dont 427 en zone police nationale et 21 en zone gendarmerie). Ce chiffre traduit l'utilité de cette nouvelle disposition législative. Si ce nouveau délit ne peut donner lieu à un jugement en comparution immédiate en raison du quantum de la peine d'emprisonnement encourue, il autorise néanmoins les policiers et les gendarmes à intervenir lorsque les auteurs des infractions refusent de libérer les voies de passage des immeubles et adoptent un comportement récalcitrant ou agressif. Le caractère délictuel de cette infraction rend par ailleurs possible le placement en garde à vue des intéressés. Il convient également de noter que les agents de police municipale peuvent intervenir dans les halls d'immeuble pour rétablir le calme ou pour constater, par rapport, le délit précité. En pratique, les infractions constatées par les forces de l'ordre donnent lieu à une information systématique des parquets, lesquels apprécient l'opportunité des poursuites. Le suivi de la mise en oeuvre de cette infraction, comme de toutes les nouvelles infractions créées par la loi pour la sécurité intérieure, donne lieu à des échanges périodiques entre le ministère de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales et celui de la justice.

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