Question de M. MAHÉAS Jacques (Seine-Saint-Denis - SOC) publiée le 05/05/2005
M. Jacques Mahéas attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales sur le bilan de la loi pour la sécurité intérieure en ce qui concerne la prostitution. Dans ce domaine, la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 avait pour principal objectif de « nettoyer » la rue, ce qui permet d'afficher aujourd'hui des statistiques de la prostitution « visible » en net recul. La répression du proxénétisme se solde essentiellement par la multiplication d'arrestations de personnes prostituées (plus de 7 500 procédures pour racolage au 30 novembre 2004). Pour autant, toutes les associations de terrain sont unanimes à constater que la prostitution n'a pas diminué. Comme on pouvait le craindre, la logique sécuritaire l'a seulement déplacée vers des lieux moins exposés, la rendant plus précaire et plus clandestine, à la merci de la violence des clients et des risques sanitaires, au point qu'on a pu parler de « marché aux esclaves ». Parallèlement, le volet « humanitaire », comprenant l'aide aux victimes, semble ne pas tenir ses promesses en termes de centres d'hébergement, de formations professionnelles... Aucun bilan officiel n'a été dressé, alors que, dans son article 52, la loi pour la sécurité intérieure stipulait : « A compter de 2004, le Gouvernement déposera chaque année sur le bureau de l'Assemblée nationale et sur celui du Sénat, à l'ouverture de la session ordinaire, un rapport faisant état de l'évolution de la situation démographique, sanitaire et sociale des personnes prostituées ainsi que des moyens dont disposent les associations et les organismes qui leur viennent en aide. » C'est pourquoi il lui demande comment il compte mettre en oeuvre ce « traitement social de la prostitution » prôné à l'Assemblée nationale le 23 mars dernier et quand le Gouvernement publiera enfin le rapport prévu par l'article 52 de la loi pour la sécurité intérieure.
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Réponse du Ministère de l'intérieur et de l'aménagement du territoire publiée le 20/10/2005
La loi sur la sécurité intérieure (LSI) du 18 mars 2003, en même temps qu'elle renforçait les moyens de lutte contre les formes graves de proxénétisme, a érigé en délit le racolage (défini et réprimé par l'article 225-10-1 du code pénal), car il était devenu nécessaire de limiter les troubles à la tranquillité et à l'ordre publics générés par certaines formes de prostitution. En termes quantitatifs, ces infractions de racolage sont en hausse : 4 525 ont ainsi été constatées la première année suivant l'adoption de la LSI (avril 2003 à mars 2004) contre 5 427 pour la période avril 2004 à mars 2005. Simultanément, la lutte contre les réseaux internationaux de traite des êtres humains s'est intensifiée au cours de l'année 2004 (47 de ces réseaux ont été démantelés contre 39 en 2003), avec une plus grande attention portée aux réseaux de « proximité » et aux individus gravitant autour des prostitués. S'il est vrai que des stratégies d'évitement ou de contournement de la législation ont été mises en place par les réseaux de prostitution, les services chargés de l'application de la loi adaptent également leurs dispositifs. Ainsi, la création d'une cellule spécialisée est envisagée au sein des sûretés départementales (services relevant des directions départementales de sécurité publique). Les missions qui leur seraient dévolues concerneraient l'évaluation de l'importance du phénomène prostitutionnel (troubles à l'ordre public, entraves à la circulation, par exemple) et la fourniture de renseignements, préalable à toute opération concertée. L'ensemble des services de police et unités de gendarmerie mène des opérations ciblées dont la coordination relève de l'office central pour la répression de la traite des êtres humains (OCRTEH). Cet office apporte, en tant que de besoin, son expérience et son expertise et assure une mission opérationnelle plus particulièrement dirigée contre les réseaux les plus organisés. Il a mis en place un « bureau de liaison » qui se réunit périodiquement afin d'assurer au mieux le pilotage des actions nationales de lutte contre les réseaux de proxénétisme. Les opérations police/gendarmerie, qui se sont déroulées sur l'ensemble du territoire en mars 2005, ont permis d'interpeller 122 personnes suspectées de participer à l'exploitation de la prostitution et 41 d'entre elles ont été écrouées. Une autre opération, dénommée « petites mains », a lieu tout au long du mois de juin. Toutefois, le plan de lutte contre la traite et l'exploitation sexuelle des êtres humains mis en place par les pouvoirs publics ne s'appuie pas essentiellement sur des mesures répressives. Il se situe, en cela, dans la ligne fixée par la convention sur « La lutte contre la traite des êtres humains sous toutes ses formes » adoptée le 3 mai 2005 par le comité des ministres du Conseil de l'Europe. Des actions d'information et de prévention sont réalisées en direction des associations spécialisées dans l'accueil des femmes en situation de vulnérabilité, des publics scolaires et éducatifs, des travailleurs sociaux en relation avec les populations immigrées. Ainsi, l'O.C.R.T.E.H. est en relation constante avec les associations qui s'occupent de la prise en charge des prostituées. En effet, l'effort de lutte engagé contre les organisateurs de réseaux de prostitution s'accompagne naturellement d'une attention particulière aux prostituées, souvent victimes de ces réseaux. De plus, cet office est engagé au niveau européen dans deux actions : La première, en partenariat avec l'office des migrations internationales, tend à la mise en place d'une session de formation et d'un réseau de correspondants destinés aux représentants des forces de l'ordre, des ONG et des organisations internationales impliqués dans la lutte contre la traite des êtres humains dans les Etats membres de l'Union européenne, les pays candidats à l'entrée dans l'Union européenne et les Etats situés aux frontières de l'Union européenne. La seconde, en partenariat avec l'association française « association lieu d'écoute carrefour éducatif social » (ALC), a pour mission l'accueil sécurisé des victimes. Des mesures d'accompagnement des prostituées viennent également compléter le dispositif répressif, à l'image de l'article 76 de la LSI qui instaure la possibilité de délivrer une autorisation provisoire de séjour à un étranger qui soit dépose plainte à l'encontre d'une personne pour avoir été victime d'une infraction de traite des êtres humains ou de proxénétisme, soit témoigne dans une procédure pour ces mêmes faits. C'est dans cet esprit que l'article 52 de la loi pour la sécurité intérieure n° 2003-239 du 18 mars 2003 dispose « qu'à compter de 2004 le Gouvernement déposera chaque année sur le bureau de l'Assemblée nationale et sur celui du Sénat, à l'ouverture de la session ordinaire, un rapport faisant état de l'évolution de la situation démographique, sanitaire et sociale des personnes prostituées ainsi que des moyens dont disposent les associations et les organismes qui leur viennent en aide ». La rédaction de ce document, coordonnée par le ministère de la santé et des solidarités, est en cours de finalisation. La contribution du ministère de l'intérieur et de l'aménagement du territoire porte sur le points suivants : « Etat des lieux de la situation démographique des personnes victimes de prostitution » et « Protection des victimes par la répression du proxénétisme et du démantèlement des réseaux ».
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