Question de Mme CAMPION Claire-Lise (Essonne - SOC) publiée le 17/06/2005
Question posée en séance publique le 16/06/2005
Mme Claire-Lise Campion. Monsieur le président, je tiens à dire en préambule que nous regrettons vivement que M. le Premier ministre n'ait pas répondu à notre collègue. Espérons que cette attitude - son prédécesseur avait la même - ne devienne pas une coutume ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. Ladislas Poniatowski. C'est gratuit !
M. Alain Fouché. Et comment c'était avec Jospin ?
Mme Claire-Lise Campion. Ma question s'adresse donc à M. le Premier ministre.
Face à la situation économique de la France, nous ne pouvons que nous accorder sur le fait qu'il est urgent d'engager une véritable politique de l'emploi capable de relancer la croissance, de lutter contre l'exclusion, la pauvreté et la précarité.
Il aura fallu attendre trois ans, 230 000 chômeurs supplémentaires et un vote négatif sur le traité constitutionnel européen pour que le Gouvernement prenne enfin conscience du désespoir dans lequel se trouve un grand nombre de nos concitoyens.
A situation d'urgence, mesures d'urgence. Vous avez donc choisi, comme la Constitution vous en donne la possibilité, monsieur le Premier ministre, de recourir aux ordonnances.
C'est toujours avec beaucoup de réserve que le Parlement se voit dessaisi de son pouvoir d'amender et de contrôler l'action gouvernementale. Le recours aux ordonnances porte également atteinte aux prérogatives des partenaires sociaux et à la démocratie sociale. Elles ne peuvent se justifier que s'il s'agit de répondre à des attentes fortes exprimées par nos concitoyens.
M. Jean-Jacques Hyest. C'est le cas !
Mme Claire-Lise Campion. Cependant, en aucune manière, cette parenthèse dans la séparation des pouvoirs ne peut avoir pour objet de faire passer en force une politique qui porterait atteinte aux droits des citoyens et, en l'espèce, aux droits des salariés.
Or nul ne connaît l'objet des ordonnances que vous entendez prendre pendant la période estivale, monsieur le Premier ministre !
S'agit-il de la mise en place d'un « contrat nouvelle embauche », dont la période d'essai dure deux ans et qui permet à l'employeur de se séparer d'un salarié, pendant ces deux ans, sans avoir à payer les indemnités compensatrices de précarité ?
S'agit-il de l'instauration d'un chèque-emploi entreprises, qui fait disparaître l'obligation de signer un contrat de travail ?
S'agit-il de la modification des seuils retenus dans les très petites entreprises, qui est une manière détournée de remettre en cause le droit syndical ?
Toutes ces mesures sont autant de brèches dans notre code du droit du travail et introduisent la flexibilité que les Français rejettent. Nous ne pouvons cautionner le recours aux ordonnances pour ces fins détournées.
Vous avez prôné dans votre discours de politique générale, monsieur le Premier ministre, l'écoute, la concertation et la réflexion. Mais vous vous passez de l'avis des parlementaires et restez sourd aux commentaires des organisations syndicales que vous avez reçues.
C'est pourquoi je vous demande de bien vouloir nous indiquer la façon dont vous envisagez d'associer et d'informer les forces vives de la nation, notamment le Parlement, sur les ordonnances que vous comptez prendre cet été. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
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Réponse du Ministère de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement publiée le 17/06/2005
Réponse apportée en séance publique le 16/06/2005
M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement. Madame la sénatrice, imaginer une seconde que, dans notre grand pays, des contacts permanents avec les forces vives de la nation ne soient pas nécessaires est une illusion grave.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Et le Parlement ?
M. Jacques Mahéas. Pourtant les syndicats se plaignent !
M. Jean-Louis Borloo, ministre. En 1982, sur des questions de fond, combien d'ordonnances avez-vous prises ? Dois-je vous le rappeler ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP.) Plus de cinquante !
En ce qui nous concerne, nous prenons des dispositions d'application immédiate : 1 000 euros de plus par-ci, 1 000 euros de plus par-là, ...
M. Jean-Marc Todeschini. Où les prenez-vous ces 1 000 euros ? Et à qui ?
M. Jean-Louis Borloo, ministre. ... des mesures de simplification.
Chère madame Campion, à partir de cet après-midi, nous allons de nouveau recevoir, et ce pendant quatre jours, l'ensemble des forces vives de la nation. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
Pour être certains de n'en oublier aucune, nous rencontrerons également l'ensemble du bureau du Conseil économique et social, afin d'aller au fond de cette discussion.
M. Jacques Mahéas. Ah oui ! Et le patronat aussi ?
M. Jean-Louis Borloo, ministre. Quant au Parlement, dans le cadre du vote du projet de loi d'habilitation, il sera naturellement associé aux discussions. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
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