Question de M. MASSON Jean Louis (Moselle - NI) publiée le 01/12/2005
M. Jean Louis Masson attire l'attention de M. le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, sur le fait qu'un décret paru au Journal officiel du 27 juillet 2005 permet aux collectivités locales d'octroyer des subventions de fonctionnement aux structures locales des organisations syndicales représentatives. Il souhaiterait qu'il lui précise ce qu'il faut entendre par organisations syndicales représentatives. Il souhaiterait également qu'il lui indique quels sont les garde-fous permettant d'éviter que lesdites subventions soient entachées de parti pris politique ou autre.
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Réponse du Ministère de l'intérieur et de l'aménagement du territoire publiée le 23/02/2006
L'article 216 de la loi n° 2002-73 du 16 janvier 2002 de modernisation sociale insère dans le code général des collectivités territoriales (CGCT) des dispositions permettant aux collectivités territoriales et à leurs groupements d'« attribuer des subventions de fonctionnement aux structures locales des organisations syndicales représentatives dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat » (art. L. 2251-3-1, L. 3231-3-1 et L. 4253-5 du CGCT). Les conditions de versement de ces subventions ont été définies par le décret n° 2005-849 du 25 juillet 2005, codifié aux articles R. 2251-2, R. 3231 et R. 4253-4 du CGCT. En vertu de ces dispositions, les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent attribuer des subventions de fonctionnement aux structures locales des organisations syndicales représentatives qui sont dotées de la personnalité morale et qui remplissent des missions d'intérêt général sur le plan local. Ces structures ne peuvent reverser ces subventions à d'autres personnes morales. Elles sont tenues de présenter à l'assemblée délibérante de la collectivité un rapport détaillant l'utilisation de la subvention. Dans sa décision n° 2002-455 DC du 12 janvier 2002, au considérant n° 118, le Conseil constitutionnel a par ailleurs émis une réserve d'interprétation concernant les dispositions de l'article 216 de la loi n° 2002-73 du 16 janvier 2002. Il a en effet considéré qu'il résulte des exigences constitutionnelles, et notamment de l'article 72 de la Constitution et de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 24 août 1789, que l'article 216 de la loi précitée « ne saurait avoir pour effet d'autoriser une assemblée locale à traiter inégalement les structures locales des organisations syndicales représentatives également éligibles à l'octroi de telles subventions du fait des missions d'intérêt général qu'elles remplissent sur le plan local ». Par ailleurs, une jurisprudence ancienne du Conseil d'Etat n'admet l'octroi de subventions à l'union locale d'un syndicat professionnel par les collectivités territoriales que lorsque son intérêt local est suffisant, et sous réserve que ces subventions ne soient pas attribuées pour des motifs politiques ou pour apporter un soutien dans un conflit collectif du travail (CE, 4 avril 2005, commune d'Argentan). Le juge administratif a ainsi considéré comme légale la subvention allouée par une commune à la section locale de l'« Union des vieux travailleurs de France », en raison de l'« objet principalement social sur le plan local » poursuivi par cette section (CE, ass., 25 octobre 1957, commune de Bondy), mais a jugé qu'il n'appartient pas à un conseil municipal d'apporter son soutien financier à l'une des parties en litige dans un conflit social (CE, 20 novembre 1985, commune d'Aigues-Mortes). La combinaison des dispositions réglementaires du CGCT précitées et de la réserve d'interprétation émise par le Conseil constitutionnel permet au juge administratif de maintenir sa jurisprudence traditionnelle d'interdiction des aides à caractère politique. Les dispositions issues de l'article 216 de la loi n° 2002-73 de modernisation sociale n'entrent donc pas en concurrence avec la jurisprudence du juge administratif fondée sur les articles L. 2121-29, L. 3211-1 et L. 4221-1 du CGCT, interdisant l'octroi d'aides à caractère politique par l'assemblée délibérante (CE, 16 juillet 1941, synd. de défense des contribuables de Goussainville ; ou encore CE, 28 octobre 2002, commune de Draguignan), ainsi que l'intervention d'une collectivité territoriale dans un conflit collectif du travail par l'octroi d'un soutien financier à l'une des parties (CE, 12 octobre 1990, commune de Champigny-sur-Marne, req. n° 91325). La notion de représentativité d'une organisation syndicale, à laquelle se réfèrent les dispositions du CGCT précitées, est quant à elle définie à la fois par la loi et par la jurisprudence. En application de l'article L. 133-2 du code du travail, la représentativité d'un syndicat résulte de cinq critères : les effectifs, l'indépendance (notamment financière), les cotisations, l'expérience et l'ancienneté du syndicat, ainsi que l'attitude patriotique pendant l'Occupation. À ces critères législatifs, la jurisprudence a ajouté celui de l'activité réelle du syndicat, en termes d'ampleur et d'efficacité, et celui de sa capacité à mobiliser les salariés et de son audience. Ces critères sont appréciés d'une manière globale. Néanmoins, certains syndicats bénéficient d'une présomption irréfragable de représentativité. Ces organisations syndicales, désignées comme représentatives de droit au niveau national par un arrêté du 31 mars 1966 complétant une décision du 8 avril 1948, sont la Confédération générale du travail (CGT), la Confédération générale du travail - Force ouvrière (CGT-FO), la Confédération française démocratique du travail (CFDT), la Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC) et la Confédération française de l'encadrement générale des cadres (CFE-CGC). Selon le code du travail, tout syndicat affilié à l'une de ces cinq organisations est considéré comme représentatif de droit.
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