Question de Mme KHIARI Bariza (Paris - SOC) publiée le 26/01/2006

Mme Bariza Khiari appelle l'attention de M. le ministre de la santé et des solidarités sur la situation des praticiens de santé à diplôme extracommunautaire. Cette appellation désigne les médecins, mais aussi les chirurgiens-dentistes, pharmaciens, ayant obtenu leur diplôme initial dans un pays non membre de la Communauté européenne. Pour la plupart, ces praticiens ont effectué leurs années de spécialité dans les hôpitaux français ; ils sont dans leur grande majorité français, ou en cours de naturalisation. Ils ont été recrutés pour leurs compétences ; ils assument la même mission et remplissent les mêmes tâches que leurs collègues à diplômes communautaires. En revanche, leurs conditions de travail sont souvent plus difficiles (horaires de nuit, garde de week-end et jours fériés) et leur rémunération est nettement inférieure à ce à quoi ils pourraient prétendre, compte tenu de l'impossibilité qu'ils ont d'accéder à un poste de titulaire. En outre, ils vivent dans la plus grande précarité quant à l'avenir de leur emploi : CDD successifs, et surtout aucune perspective d'avancement de carrière. Ils sont les victimes d'une discrimination institutionnalisée. En septembre 2005, le ministère de la santé annonçait, dans un communiqué, l'attribution de l'autorisation d'exercice aux titulaires d'un diplôme inter-universitaire de spécialité, ou du certificat de synthèse clinique et thérapeutique, sous condition d'un engagement d'exercice en hôpital pendant cinq ans. Trois mois plus tard, le ministère revient sur cet engagement en restreignant la nouvelle procédure d'autorisation. En 2006, sur les 6 500 médecins concernés, seuls 600 pourront obtenir l'autorisation d'exercice de plein droit, alors même que 3 500 postes de praticiens hospitaliers sont vacants. Cette nouvelle procédure d'autorisation ne répond ni aux besoins de nos hôpitaux, ni au principe d'équité entre les praticiens, ni même à la législation en vigueur dans la mesure où elle ne tient aucun compte de la validation des acquis de l'expérience. Or, certains de ces praticiens exercent depuis plus de quinze ans dans nos hôpitaux. A moins de reconnaître que l'État a embauché des praticiens sous-qualifiés, rien ne justifie cette asymétrie de traitement, incompatible avec les valeurs de notre république. Ces praticiens ne doivent plus être la variable d'ajustement du budget de nos hôpitaux, en cette année 2006 placée sous l'étendard de l'égalité des chances. Elle lui demande quelles sont les mesures envisagées pour répondre non seulement aux besoins de la démographie hospitalière, mais aussi au nécessaire rétablissement de l'égalité républicaine.

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Réponse du Ministère délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille publiée le 01/02/2006

Réponse apportée en séance publique le 31/01/2006

Mme Bariza Khiari. Ma question concerne la situation des « praticiens de santé à diplôme extracommunautaire », appellation qui désigne les médecins, mais aussi les chirurgiens-dentistes et pharmaciens ayant obtenu leur diplôme initial dans un pays non-membre de la Communauté européenne.

Pour la plupart, ces praticiens ont effectué leurs années de spécialité dans les hôpitaux français. Ils sont dans leur grande majorité français, ou en cours de naturalisation. Recrutés pour leurs compétences, ils assument la même mission et remplissent les mêmes tâches que leurs collègues ayant un diplôme communautaire.

En revanche, leurs conditions de travail sont souvent plus difficiles - horaires de nuit, gardes de week-end et jours fériés -, et leur rémunération, compte tenu de l'impossibilité dans laquelle ils sont d'accéder à un poste de titulaire, est nettement inférieure à celle à laquelle ils pourraient prétendre. En outre, l'avenir de leur emploi est des plus précaire du fait de la succession de contrats à durée déterminée et, surtout, de l'absence de toute perspective de déroulement de carrière.

Ils sont donc, monsieur le ministre, victimes d'une discrimination institutionnalisée - couverte, je vous le concède, par différents gouvernements -, bien que des avancées aient été réalisées en leur direction dans la loi portant création d'une couverture maladie universelle.

À moins de reconnaître que l'État a embauché des praticiens sous-qualifiés, rien ne justifie une telle asymétrie de traitement.

Depuis maintenant dix-huit mois, les syndicats représentant les médecins à diplôme étranger sont en négociation avec le ministère de la santé.

En septembre 2005, le ministère de la santé annonçait, dans un communiqué, les modalités de la nouvelle procédure d'autorisation, en réservant un dispositif spécifique aux titulaires d'un diplôme interuniversitaire de spécialité ou du certificat de synthèse clinique et thérapeutique. Après approbation d'une commission d'évaluation, ils pourraient se voir accorder le plein exercice sous condition d'un engagement d'exercice en hôpital pendant cinq ans.

Trois mois plus tard, le ministère revenait sur cet engagement en restreignant la nouvelle procédure d'autorisation. En 2006, sur les 6 500 médecins concernés, seuls 600 pourront concourir pour une autorisation d'exercice de plein droit, alors même que 3 500 postes de praticiens hospitaliers sont vacants.

Cette nouvelle procédure d'autorisation ne répond ni aux besoins de nos hôpitaux, ni au principe d'équité entre les praticiens, ni même à la législation en vigueur dans la mesure où elle ne tient aucun compte de la validation des acquis de l'expérience. Or certains de ces praticiens exercent depuis plus de quinze ans dans nos hôpitaux.

Dans un communiqué du 12 janvier 2006, le ministère de la santé et des solidarités reconnaît enfin que cette nouvelle procédure d'autorisation n'est pas adaptée dans sa forme aux médecins ayant des années d'expérience professionnelle.

Ces praticiens ne devraient plus être la variable d'ajustement du budget de nos hôpitaux en cette année 2006 placée sous l'étendard de l'égalité des chances. Le ministre de la santé et des solidarités devait présenter hier des propositions. Nous savons qu'il est retenu à la Réunion pour une grave question de santé publique. Peut-être pourrez-vous nous en apprendre un peu plus, monsieur le ministre délégué.

Ma question porte sur les mesures envisagées non seulement pour répondre aux besoins de la démographie hospitalière, mais aussi afin de procéder au nécessaire rétablissement de l'égalité républicaine.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Madame la sénatrice, les professions médicales obéissent à des conditions de nationalité, de diplôme et d'inscription à l'ordre des médecins, qui sont énoncées par le code de la santé publique, pour des raisons qui tiennent à la volonté du législateur d'assurer, sur tout le territoire national, une même qualité de soins.

Les praticiens à diplômes étrangers ont été autorisés, depuis de très nombreuses années, par dérogation aux conditions légales d'exercice, dans le cadre de recrutements hospitaliers, à exécuter des actes de pratique courante sous la responsabilité d'un praticien de plein exercice dans les établissements publics de santé.

La loi du 27 juillet 1999 portant création d'une couverture maladie universelle a ensuite interdit aux établissements publics de santé de procéder à de nouveaux recrutements. Seuls les praticiens à diplômes étrangers qui justifiaient de fonctions dans un établissement hospitalier public avant la date de publication de la loi ont pu continuer à exercer des fonctions hospitalières d'assistant associé ou de praticien attaché associé.

Depuis 2003 seulement, la rémunération de ces praticiens est identique à celle des praticiens attachés, qui ont la plénitude d'exercice.

En contrepartie de l'interdiction de recrutement, le nombre d'autorisations d'exercice de la médecine a par ailleurs considérablement augmenté pour les titulaires de diplômes étrangers, afin d'autoriser l'activité de praticiens recrutés avant 1999. Une nouvelle procédure d'autorisation d'exercice a donc été prévue.

Au total, depuis 1972, plus de 11 300 autorisations d'exercice concernant les professions médicales et pharmaceutiques ont été délivrées, dont 9 400 pour la profession de médecin.

Toutefois, ces nombreuses autorisations n'ont pas définitivement clos le problème. Aujourd'hui, le nombre de praticiens à diplôme hors Union européenne n'ayant pas la plénitude d'exercice et exerçant dans les établissements publics de santé est estimé à 6 700, dont plus de 4 000 sont des stagiaires étrangers en formation. Ces praticiens sont en France dans le cadre d'une formation et n'ont donc pas vocation à y rester. La partie restante est composée de praticiens ne s'étant pas soumis aux procédures antérieures ou ayant échoué à ces procédures.

À cet égard, le ministère de la santé et des solidarités s'est fixé l'objectif d'offrir à ces praticiens à diplôme hors Union européenne la faculté d'obtenir une autorisation de plein exercice, à condition que leur qualification rende possible cette autorisation : ils doivent répondre aux mêmes exigences, notamment en matière de qualité des soins, que celles qui sont requises pour les médecins à diplômes français ou communautaires.

Pour atteindre cet objectif, une nouvelle procédure d'autorisation a été mise en place en 2004. Une première session s'est déroulée en 2005 et elle a ouvert 200 places ; en 2006, ce sont 599 places qui sont proposées.

Par ailleurs, la loi sera modifiée afin de permettre aux candidats de tenter jusqu'à quatre fois les épreuves écrites de cette nouvelle procédure d'autorisation, au lieu de deux actuellement. Ensuite, une modification réglementaire permettra aux titulaires de l'autorisation ministérielle de se voir automatiquement qualifiés dans leur spécialité.

Enfin, nous étudions la possibilité de simplifier encore cette procédure pour les professionnels ayant déjà fait l'objet d'une évaluation théorique selon des procédures antérieures. Nous souhaitons également simplifier les conditions de passage devant la commission.

Par ailleurs, cette commission pourra, sous certaines conditions, dispenser les candidats justifiant de fonctions hospitalières effectuées avant les épreuves de vérification des connaissances de tout ou partie des trois ans de fonctions prévues par les textes en vigueur.

M. le président. La parole est à Mme Bariza Khiari.

Mme Bariza Khiari. Monsieur le ministre, je constate des petites avancées.

Quand ces médecins travaillent dans nos hôpitaux, nous leur confions ce que nous avons de plus précieux, notre vie. Or vous dites qu'ils peuvent être « recalés » à certains examens. Cela sous-entend que nous aurions recruté des médecins qui n'auraient pas les qualifications requises. Je suis surprise. C'est grave pour la santé publique !

Monsieur le ministre, nous attendons de votre part un effort significatif : 600 places, c'est peu au regard de la demande. Je suis tout à fait d'accord avec vous quand vous affirmez que certains praticiens de santé sont là comme stagiaires et qu'ils ont vocation à retourner dans leur pays d'origine : nous n'avons pas à piller la matière grise des pays en voie de développement et nous devons travailler dans un cadre de codéveloppement.

Quoi qu'il en soit, je pense que les médecins à diplômes extracommunautaires n'apprécieront pas votre réponse, parce que leurs qualifications ne sont pas reconnues et qu'ils peuvent être « recalés » à des examens.

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