Question de M. PEYRONNET Jean-Claude (Haute-Vienne - SOC) publiée le 26/01/2006
M. Jean-Claude Peyronnet appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur le sens qu'il convient de donner aux dispositions figurant à l'article 95 de la loi n° 2006-11 du 5 janvier 2006 d'orientation agricole et visant à améliorer l'organisation des services de l'état et de ses établissements publics. Plus précisément, l'article L. 621-39 du code rural prévoit désormais qu'« au plus tard le 1er janvier 2013, la gestion et le paiement des mesures de soutien direct en faveur des agriculteurs et de soutien au développement rural mises en oeuvre au titre de la politique agricole commune, sont assurés par un seul organisme ». Sous couvert de simplification et de rationalisation administratives, cette disposition risque de remettre en question un pan entier de l'activité du Centre national pour l'aménagement des structures des exploitations agricoles (CNASEA), établissement public récemment implanté à Limoges. De telles mesures sont de plus de nature à inquiéter légitimement ses agents qui ont accepté une délocalisation et qui tiennent à la sauvegarde de leur emploi en Limousin. Aussi, il souhaite que lui soit précisée sans détour la nature des incidences qu'est susceptible de produire cette nouvelle disposition législative.
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Réponse du Ministère délégué à l'industrie publiée le 08/02/2006
Réponse apportée en séance publique le 07/02/2006
M. Jean-Claude Peyronnet. Ma question porte sur l'avenir du CNASEA, le Centre national pour l'aménagement des structures des exploitations agricoles. Chacun connaît le rôle très important de caisse pivot que joue cet opérateur public interministériel, qui sert un nombre élevé de prestations agricoles, mais aussi de prestations sociales, et assure le paiement de prestations transitant désormais par les collectivités.
L'histoire récente du CNASEA est un feuilleton très étonnant qui a duré plus d'une décennie : la décision de l'implanter à Limoges a été prise en 1992 mais n'a été concrétisée qu'en 2003. Je rappellerai quelques dates : c'est le gouvernement Jospin, par le CIADT du 15 décembre 1997, qui a relancé ce projet de délocalisation, mais, en 1999, il fallut renoncer au concours d'architecte qui avait été ouvert, alors que la maquette du futur centre avait déjà été présentée en grande pompe. Par ailleurs, en 1996, un député, peut-être inspiré, avait proposé, par voie d'amendement, de supprimer les crédits de transfert.
Convaincre les agents de venir s'installer à Limoges n'a pas été facile ; les collectivités se sont beaucoup investies, ainsi que le conseil général, que je présidais alors, et, surtout, la ville de Limoges. Quatre cents familles y sont désormais implantées et y sont heureuses, tout du moins selon les échos qui me sont parvenus.
Tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes si je n'avais quelques inquiétudes.
Le mercredi 9 novembre dernier, lors de la discussion du projet de loi d'orientation agricole, a été voté un amendement du rapporteur, M. César, visant à ce qu'en 2013 l'ensemble des aides agricoles soient versées par un organisme unique. Quel sera cet organisme unique ? Un nouvel organisme ou bien le CNASEA ?
M. Bussereau m'a écrit, ainsi qu'il a dû le faire au maire de Limoges, puisque nous avions saisi conjointement le directeur général du CNASEA. Dans sa lettre, que j'ai reçue hier, il m'indique - ce que j'avais déjà cru comprendre - qu'un certain nombre d'arbitrages ont été rendus, aux termes desquels, au moins dans un avenir immédiat, « le CNASEA sera renforcé dans sa mission d'organisme payeur unique de l'ensemble des aides du second pilier » de la PAC, la politique agricole commune, c'est-à-dire, notamment, la prime herbagère agro-environnementale et les aides accordées au titre du nouveau plan de modernisation des bâtiments d'élevage.
Ces arbitrages sont, certes, favorables, mais M. Bussereau m'indique également qu'il a « diligenté une mission du Comité permanent de coordination des inspections qui devra proposer une clarification des rôles des différents acteurs et une optimisation de l'organisation du service public aux agriculteurs au plan local », ce qui me laisse dans l'incertitude, ma question n'étant pas totalement clarifiée.
Je souhaiterais, monsieur le ministre, que vous puissiez me donner quelques apaisements quant à l'avenir de cet organisme, qui me préoccupe d'autant plus qu'il est implanté sur mon département.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Loos, ministre délégué à l'industrie. Comme M. Bussereau vous a déjà adressé une réponse, je vais tenter d'aller au-delà en vous communiquant les compléments d'information qu'il a préparés à votre intention.
La loi d'orientation agricole adapte la mission des offices agricoles afin de prendre en compte la réforme de la politique agricole commune entrée en vigueur en 2006. Elle doit permettre de maintenir des lieux d'expertise et de concertation entre les pouvoirs publics et les organisations professionnelles.
Ainsi, la loi prévoit le regroupement des offices en trois pôles : un pôle « élevage », un pôle « cultures spécialisées » et un pôle « grandes cultures ». Cette organisation permettra une plus grande cohérence dans l'approche sectorielle des marchés. Des économies de fonctionnement seront ainsi réalisées.
Parallèlement, nous devons sécuriser le paiement des aides aux agriculteurs. Pour cela, notre organisation s'appuiera sur deux piliers : l'agence unique de paiement, l'AUP, et le CNASEA.
L'agence unique de paiement va assurer le paiement des aides du premier pilier de la politique agricole commune, la PAC. Il s'agit, en particulier, des aides découplées, qui feront l'objet d'un paiement unique, et des aides directes actuellement versées par l'ONIC, l'Office national interprofessionnel des céréales ou l'OFIVAL, l'Office national interprofessionnel des viandes, de l'élevage et de l'aviculture. Cette agence sera opérationnelle dès cette année.
Le CNASEA sera renforcé dans sa mission d'organisme payeur unique de l'ensemble des aides du second pilier. Ainsi, il aura la responsabilité des paiements pour des dispositifs aujourd'hui mis en place par d'autres organismes, comme la prime herbagère agro-environnementale, la PHAE, les aides aux bâtiments d'élevage, ou la mesure dite rotationnelle.
Ce schéma est préférable à une gestion éclatée entre l'ensemble des offices. Il est conforme aux recommandations communautaires pour la gestion du FEADER, le Fonds européen agricole pour le développement rural, nouvel instrument financier dans la politique de développement rural.
Ces décisions sont naturellement reprises dans le contrat d'objectifs que l'État va passer avec le CNASEA. À cet égard, M. Bussereau, avec ses collègues chargés de l'emploi et du budget, se rendra à Limoges en mars prochain pour signer ce contrat. (M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes, opine.)
La volonté du Gouvernement est de réorganiser les modalités de gestion de l'ensemble des aides à l'agriculture, de façon à améliorer l'efficacité et la sécurité des paiements et à répondre aux attentes des agriculteurs en matière de simplification.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Peyronnet.
M. Jean-Claude Peyronnet. Je me félicite que M. Bussereau vienne jusqu'à Limoges pour cette signature et je serai ravi d'être à ses côtés.
Monsieur le ministre, je connaissais déjà une part importante de la réponse que vous venez de me faire : si M. Bussereau a eu la délicatesse d'en modifier la forme, le fond est resté le même, ce qui est heureux, d'ailleurs, car mieux vaut se répéter que se contredire ! Mais je ne suis pas complètement convaincu et je reste inquiet.
Je comprends bien que, dans l'immédiat, le CNASEA va voir son action renforcée, mais, à partir de 2013, selon ce qui a été voté à l'automne dernier, il n'y aura plus qu'un organisme unique. Autour duquel des deux organismes existants, le CNASEA et l'agence unique de paiement, se construira le nouvel organisme ? Telle est ma question, et je la reposerai, à M. Bussereau ou à d'autres, lorsque le moment sera venu.
Il s'agit en effet d'une décision politique, car chacun connaît la qualité, y compris en matière de sécurité, du travail effectué par le CNASEA. Il suffirait donc de décider que c'est bien lui qui sera, en 2013, l'organisme unique chargé d'assurer le paiement de l'ensemble des aides en question.
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