Question de M. MASSON Jean Louis (Moselle - NI) publiée le 09/02/2006
M. Jean Louis Masson attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur le fait que l'article 432-12 du code pénal prévoit que, dans les communes de moins de 3 500 habitants, les maires peuvent « traiter avec la commune » pour la fourniture de services, le montant annuel maximum étant de 16 000 euros. Il s'agit là d'une dérogation légitime à la notion de prise illégale d'intérêt et permettant, par exemple, à un maire de louer pour son compte une parcelle de terrain. Cependant, la rédaction de cet article ne prévoit la dérogation à la notion de prise illégale d'intérêt que lorsque le maire ou l'adjoint est personnellement cocontractant de la commune. Il souhaiterait donc qu'il lui indique si, par exemple, cela exclut toute possibilité pour la commune de louer une parcelle de terrain au fils ou à un proche parent du maire.
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Réponse du Ministère de la justice publiée le 08/06/2006
Comme le rappelle l'honorable parlementaire, les conditions dans lesquelles une commune comptant 3 500 habitants au plus peut « traiter » avec son maire pour la fourniture de services sont celles prévues par les alinéas 2 et 5 de l'article 432-12 du code pénal. La Cour de cassation décidant, selon une jurisprudence constante, que l'intérêt illégalement pris « peut être de nature matérielle ou morale, direct ou indirect » et que l'absence de profit pour le maire et de préjudice pour la collectivité locale est indifférente à la caractérisation de l'infraction. Cette jurisprudence s'explique notamment par la finalité du texte d'incrimination qui a pour but d'éviter qu'une personne chargée d'une fonction publique ne s'en serve dans son intérêt personnel ou puisse seulement être soupçonnée de ne pas en user conformément à l'intérêt général. La Cour de cassation n'a pas, à ce jour, statué sur le cas d'un maire dont la commune de moins de 3 500 habitants traite, dans les conditions prévues à l'article 432-12 du code pénal, pour la fourniture de services avec un membre de sa famille. Aussi, il pourrait être soutenu que le respect de ces conditions devrait également permettre à ce maire de bénéficier de l'autorisation légale instituée par l'article 432-12. En effet, celle-ci bénéficiant au maire qui prend directement un intérêt dans l'opération, elle devrait, a fortiori, lui bénéficier lorsqu'il prend un intérêt indirect, par l'intermédiaire d'un membre de la famille. Cependant, dans son rapport annuel de 1999, la Cour de cassation estime qu'une interprétation stricte de la permission prévue par la loi doit conduire à ce qu'un parent du maire ne puisse bénéficier de cette autorisation. En conséquence, la décision du maire en ce sens l'exposerait à des poursuites pour prise illégale d'intérêt. En toute hypothèse, la circonstance que le maire, quelle que soit la taille de la commune, n'a tiré aucun profit de l'opération (ce qui peut résulter d'une estimation du service des domaines) et la circonstance qu'il n'a accompli aucun acte positif de surveillance de l'opération (notamment en déléguant sa signature conformément à l'article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales et en s'abstenant de participer à la délibération du conseil municipal) pourrait motiver un classement sans suite de l'infraction pour des motifs d'opportunité ou à une application modérée de la loi pénale.
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