Question de M. PLANCADE Jean-Pierre (Haute-Garonne - SOC) publiée le 20/04/2006
M. Jean-Pierre Plancade attire l'attention de M. le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, sur le volet audiovisuel de la loi n° 2006-64 relative à la lutte contre le terrorisme, du 23 janvier 2006. Depuis quelques mois, les cas de chaînes télévisées étrangères, diffusées en France via des opérateurs satellitaires français tenant des discours d'appel à la haine et au racisme, des appels explicites au terrorisme, se sont multipliés. Il y a d'abord eu le cas d'une filiale d'entreprise à capitaux publics qui a continué de diffuser, vers l'Europe du Sud, l'Asie et l'Amérique latine, une chaîne dont le conventionnement avec le CSA avait été retiré. Il y a aujourd'hui un nouveau cas, celui d'une chaîne religieuse wahhabite qui diffuse des programmes d'appel au meurtre, ou encore des propos avilissant pour les femmes. Jusqu'au début de cette année, cette chaîne était diffusée librement en France malgré son non-conventionnement par le CSA. Le conventionnement par le CSA, c'est-à-dire un contrôle avant toute diffusion, était pourtant une obligation légale, du moins jusqu'à la loi du 26 janvier 2006. Mais avec l'article 22 de la loi du 26 janvier 2006, cette obligation a disparu. La loi a ainsi retiré au CSA une partie importante de son pouvoir de régulation. La situation est donc paradoxale puisque une loi visant à lutter contre le terrorisme organise le démantèlement des procédures qui nous protégeaient des apologies télévisuelles du terrorisme. En outre, la loi stipule que cette exception au conventionnement du CSA s'applique aux seules chaînes extracommunautaires, autrement dit les chaînes géographiquement les plus éloignées, celles dont justement il faut contrôler avec attention le contenu, avant de les autoriser à être diffusées en France. Les chaînes communautaires (françaises, espagnoles, polonaises, italiennes...) demeurant, elles, soumises au conventionnement. C'est incohérent. Enfin, en soustrayant les chaînes extracommunautaires à l'obligation de conventionnement, la loi participe à déresponsabiliser des entreprises qui manquaient déjà d'éthique puisqu'elles diffusaient des messages de haine. La lutte contre le terrorisme ne consiste pas à faciliter la diffusion des appels au terrorisme. Il souhaiterai connaître les raisons qui ont motivé cette décision et les mesures que le ministre entend prendre pour remédier à cette dangereuse situation.
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Réponse du Ministère de l'intérieur et de l'aménagement du territoire publiée le 03/08/2006
Comme le souligne l'honorable parlementaire, au cours des dernières années, des émissions à teneur raciste ou antisémite ainsi que des appels au terrorisme ont été diffusées via le satellite sur certaines chaînes de télévision extra-communautaires sans que le Conseil supérieur de l'audiovisuel puisse en suspendre rapidement la diffusion. Avant l'adoption de la loi n° 2006-64 du 23 janvier 2006 relative à la lutte contre le terrorisme et portant dispositions diverses relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers, les sanctions éventuelles contre des chaînes extra communautaires étaient conditionnées par la passation préalable de conventions entre le CSA et les dites chaînes, la suspension de la diffusion ne pouvant intervenir que dans un deuxième temps, après qu'une mise en demeure eut été adressée par le CSA à l'opérateur. Cette organisation complexe a conduit à des situations insatisfaisantes se traduisant par la suspension par le CSA de la diffusion des programmes proposés par une chaîne de télévision avec laquelle il venait de conclure une convention. Afin de permettre au CSA d'assurer un contrôle accru et rapide de ces émissions, l'article 22 de la loi du 23 janvier 2006 précitée a supprimé la procédure de conventionnement préalable obligatoire des chaînes de télévision extra communautaires et lui a substitué un régime de contrôle a posteriori reposant sur les articles 42, 42-1 et 42-10 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication. Désormais, le CSA dispose, à l'égard des chaînes extra communautaires qui diffuseraient des programmes à caractère raciste, antisémite ou faisant l'apologie du terrorisme, des pouvoirs suivants : la mise en demeure de respecter les obligations législatives et réglementaires ainsi que les principes fixés par la loi sur la liberté de la communication, un pouvoir de sanction, comprenant notamment la possibilité de suspendre la diffusion desdits programmes, la possibilité de saisir en référé le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat afin qu'il fasse cesser la diffusion d'une chaîne qui ne respecterait pas les grands principes du droit de l'audiovisuel.
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