Question de M. TODESCHINI Jean-Marc (Moselle - SOC) publiée le 21/09/2006
M. Jean-Marc Todeschini attire l'attention de M. le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer sur l'étude concernant le projet d'autoroute A 32 transmise aux élus par Monsieur le préfet de la région Lorraine.
Du débat public de 1999 ressortait une réelle hostilité de la population au principe même d'une nouvelle autoroute dans le sillon mosellan. Le projet A 32 a été l'un des sujets phare de la campagne des régionales en 2004. La nouvelle majorité a réaffirmé son opposition au projet et son refus de participer à son financement.
La mise en service complète de l'A 32, envisagée au mieux avant 2020, ne saurait répondre réellement à une saturation de l'A 31. Le choix du tracé qui semble d'ores et déjà choisi par l'Etat pose de nombreuses difficultés.
Ce tracé ne répond pas à l'intérêt pour la région de voir passer par le sillon mosellan un transit international Nord-Sud qui, pour l'essentiel, ne s'y arrête pas.
La réalisation de l'A 32 à proximité de l'A 31 implique inévitablement le déclassement de cette dernière qui deviendrait une liaison interurbaine, ainsi au lieu de l'autoroute gratuite actuelle, les mosellans et les lorrains n'auraient plus qu'une autoroute payante.
Ce tracé dans des zones fortement urbanisées apportera des nuisances considérables en terme de bruit et de pollution et ne répondra pas aux problématiques des zones frontalières car il ne prend pas en compte l'impact de la zone d'Esch Belval au Luxembourg (création de 5 à 10 000 emplois à moyen terme) sur le trafic futur.
En rapportant, sur la portion Thionville-Luxembourg de l'A31, la totalité du trafic de la future A 32, la vie des mosellans de ce secteur, complètement paralysé au moindre accident sur l'axe autoroutier, sera encore plus compliquée.
Si les problèmes de saturation de l'A 31 résultent bien de la conjonction de sa fonction de transit international et de ses fonctions régionales, d'autres solutions sont possibles comme la mise en oeuvre des orientations en faveur d'une autre politique des transports et des infrastructures, que le conseil régional a préconisé à l'automne 2004 dans le schéma régional des transports (développement du ferroviaire, des voies maritimes, mise à 2x3 voies de l'A 31).
D'autre part, nombreux sont les élus à avoir proposé un tracé alternatif pour l'A 32 dit tracé Ouest, qui présenterait le double avantage de détourner du sillon mosellan le transit international qui ne s'y arrête pas, et de répondre aux objectifs de l'aménagement du territoire.
En résumé, les contraintes humaines, urbanistiques, techniques et environnementales sont colossales dans le projet qui est présenté par le préfet de région. La population et les élus y sont en outre majoritairement opposés.
Il souhaite donc savoir si M. le ministre et le Gouvernement entendent prendre en compte les solutions alternatives proposées et si celles-ci feront enfin l'objet d'études sérieuses.
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Réponse du Ministère délégué au tourisme publiée le 26/10/2006
Réponse apportée en séance publique le 25/10/2006
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, auteur de la question n° 1114, adressée à M. le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.
M. Jean-Marc Todeschini. Monsieur le ministre, ma question porte sur un sujet qui, depuis sept ans maintenant, est au centre de la quasi-totalité des débats politiques de mon département et de ma région, tant il suscite, en raison des incohérences techniques existantes, l'insatisfaction de la population et le mépris des élus locaux.
Ce sujet, que M. Estrosi évoquait tout à l'heure, n'est autre que le projet d'autoroute A32 reliant le nord, Richemont, au sud lorrain, Toul, en contournant Metz et Thionville, et dont la mise en service complète est envisagée au mieux en 2020. Une nouvelle autoroute payante devra cohabiter avec l'A31 déjà existante, qui traverse le sillon mosellan et qui est gratuite. Ce projet aurait pour objectif de répondre à la perspective de saturation de l'A31 d'ici à 2015, saturation comparable à celle de l'Al au nord de Roissy ou de l'A7 au sud de Lyon.
Les élus opposés au tracé de cette nouvelle autoroute proposé par l'État ne nient pas une éventuelle saturation de l'A31. Mais, par leur opposition, ils entendent pointer un certain nombre de difficultés et souhaitent que soient apportées, à court terme, des solutions quant à la dangerosité de l'actuelle A31. Avant d'aborder ces points, permettez-moi, monsieur le ministre, de vous rappeler les faits.
En juillet dernier, le préfet de la Moselle, préfet de la région Lorraine, a transmis aux élus une étude de la direction régionale de l'équipement dans le cadre du projet d'autoroute A32. Il rappelait notamment que ce projet était justifié par le débat public de 1999, par la décision du comité interministériel pour l'aménagement et le développement du territoire, le CIADT, du 18 décembre 2003 et par la perspective de saturation de l'actuelle autoroute.
Du débat public de 1999, il ressortait une réelle hostilité de la population au principe même d'une nouvelle autoroute dans le sillon mosellan. La décision du CIADT était, quant à elle, fondée sur un avis du conseil régional de Lorraine de juillet 2003. Le projet de l'autoroute A32 a ensuite été l'un des sujets phares de la campagne des élections régionales en 2004, avec les résultats que l'on connaît. La nouvelle majorité a d'ailleurs abrogé la délibération de juillet 2003 et a, à plusieurs reprises, réaffirmé son opposition au projet et son refus de participer à son financement.
Ces faits étant rappelés, j'en reviens aux difficultés posées par le tracé qui semble finalement d'ores et déjà choisi par l'État.
Ce tracé ne répond pas à une question de fond, à savoir l'intérêt que peut représenter pour notre région le fait de voir passer par le sillon mosellan un transit international Nord-Sud qui, pour l'essentiel, ne s'y arrête pas.
Une autoroute payante ne saurait cohabiter durablement avec une autoroute gratuite comme l'A31, sous peine d'être peu utilisée. La réalisation de l'A32 à proximité de l'A31 implique donc inévitablement le déclassement de cette dernière, qui deviendrait au mieux une voie rapide, au pire, une liaison interurbaine. Quoi qu'il en soit, nous reviendrions à la case départ, hormis le fait que, au lieu de l'autoroute gratuite actuelle, nous aurions une autoroute payante.
Ce tracé dans des zones fortement urbanisées apportera des nuisances considérables en termes de bruit et de pollution.
Enfin et surtout, le tracé qui nous est présenté ne répond pas aux problématiques des zones frontalières, car il ne prend pas en compte l'impact de la zone d'Esch-Belval au Luxembourg - 5 000 à 10 000 emplois seront créés à moyen terme - sur le trafic futur, et n'apporte pas de réponse à la saturation de l'A31 au nord de Thionville. Cela compliquera encore la vie des Mosellans de ce secteur au moindre accident survenant sur l'axe autoroutier A31.
Monsieur le ministre, nous adhérons au constat que les problèmes de saturation de l'A31 résultent bien de la conjonction de son rôle pour le transit international et de son utilité pour la région. Mais nous pensons également que d'autres solutions sont possibles.
D'une part, il s'agit, de mettre en oeuvre les orientations en faveur d'une autre politique des transports et des infrastructures, que le conseil régional a préconisées à l'automne 2004 dans le schéma régional des transports. Cela passe par le développement du ferroviaire, des voies maritimes, et de la mise à 2x3 voies de l'A31.
D'autre part, nous sommes nombreux à avoir proposé un tracé alternatif pour l'A32 dit « tracé ouest », qui présenterait le double avantage de détourner du sillon mosellan le transit international qui ne s'y arrête pas et de répondre aux objectifs de l'aménagement du territoire.
En résumé, monsieur le ministre, les contraintes humaines, urbanistiques, techniques et environnementales sont colossales dans le projet qui nous est présenté par le préfet de région. La population et les élus y sont, en outre, majoritairement opposés. Ne pensez-vous pas qu'il est temps de prendre en compte les solutions alternatives qui sont proposées et d'engager des études sérieuses à leur sujet ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Léon Bertrand, ministre délégué au tourisme. Monsieur le sénateur, vous soulignez, à juste titre, la saturation progressive de l'autoroute A31, liée aux multiples fonctions qu'elle assume aujourd'hui, qu'il s'agisse du trafic international ou des liaisons de proximité. Cette situation constitue un handicap important pour l'économie régionale et nationale.
Comme vous le savez, plusieurs solutions ont été étudiées et ont fait l'objet d'une large concertation. Vous évoquez le tracé ouest. Il faisait partie des projets qui ont été soumis au débat public de 1999. Mais ses inconvénients ont été soulignés au cours de la discussion : il ne permet pas de délester efficacement l'autoroute A31, car il s'éloigne trop du couloir où se situent les activités et donc les échanges. De plus, il traverse le parc naturel régional de Lorraine, et vous savez combien les questions d'environnement sont importantes aujourd'hui. C'est pourquoi cette option d'un tracé ouest a été écartée.
La question de l'élargissement complet de l'A31 a également été examinée. Sur un certain nombre de secteurs, cette solution est extrêmement difficile à mettre en oeuvre pour ne pas dire hors de portée. L'élargissement ne peut donc pas constituer une réponse globale.
C'est pourquoi, dans le cadre des études relatives à l'A32, le ministère des transports souhaite, à ce stade, privilégier l'hypothèse d'une réalisation complète de l'A32 entre Toul et Thionville selon le tracé est proposé dans le rapport de l'ingénieur général Lépingle. Au-delà de la réserve de capacité qu'une telle solution offrirait à l'A31 et le réseau secondaire adjacent, essentiellement au bénéfice du trafic local, cette dernière option a le mérite de contribuer à l'aménagement du territoire, notamment en assurant une desserte optimale de l'aéroport Metz-Nancy-Lorraine et de la gare Lorraine sur la future ligne TGV Est-européenne.
Pour autant, le ministre des transports a conscience des positions qui se sont exprimées en faveur de l'option consistant à élargir l'A31 sur sa section centrale et au niveau de Toul. Aussi, il vous confirme que les études menées dans la perspective de la création de ce nouvel axe autoroutier prennent bien en compte l'hypothèse d'optimisation des infrastructures existantes. C'est le sens du mandat que Dominique Perben a confié au préfet.
Les études opérationnelles font, comme il se doit, une large place à la concertation, notamment au sein du comité de suivi mis en place par le préfet de région. Je vous confirme que les études se poursuivront dans cet esprit.
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini.
M. Jean-Marc Todeschini. Monsieur le ministre, je vous remercie d'avoir répondu à la place du ministre des transports. Il s'agit effectivement d'un débat de spécialistes. Comme vous l'avez dit, le débat public a eu lieu en 1999, mais il n'a pas du tout été concluant, et les arguments que vous reprenez dans votre réponse correspondent finalement à ceux que vous avancez depuis très longtemps à propos de la concertation. En fait, celle-ci fonctionne toujours dans le même sens.
Vous évoquez l'aménagement du territoire. Ce n'est pas en construisant une autoroute à 100 mètres de celle qui existe que nous aménagerons le territoire lorrain, qui est très vaste. D'autres possibilités étaient envisageables.
En fait, les élus ont bien compris, sur le terrain, que l'État prendrait à sa charge le contournement ouest de Thionville pour accéder à la demande d'un député UMP du secteur souhaitant l'accélération des études, je dis bien des études, parce qu'il n'y a pas de financement. L'État participera à hauteur de 27 % et les collectivités territoriales ont prévenu qu'elles n'apporteraient rien.
On avance comme si de rien n'était, et l'on va confier à un concessionnaire privé la gestion de la portion de l'A32 qui passe à Richemont et qui ne pose pas de problème. Évidemment, l'aménageur privé n'acceptera que s'il est capable de capter immédiatement le trafic actuel et les clients qui utilisent l'A31.
Sur le terrain, les élus ont bien compris de quoi il retournait et ils ne peuvent pas s'en satisfaire. . Tout se passe comme si la région Lorraine était restée dans la même configuration que celle qu'elle avait avant les élections régionales. Les arguments qui sont avancés sont ceux de l'ancienne équipe.
Il va bien falloir se remettre autour d'une table pour discuter. Mais je crois que tout le monde attend les élections de l'an prochain, qui seront déterminantes.
La semaine dernière, trente-cinq maires, sur les cinquante communes concernées, se sont regroupés en collectif. Ils se réuniront à nouveau le 9 novembre pour essayer d'obtenir satisfaction auprès du tribunal administratif. Cela montre bien qu'il n'y pas de concertation. Pour ma part, monsieur le ministre, je vous invite à reprendre les discussions.
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