Question de M. SIGNÉ René-Pierre (Nièvre - SOC) publiée le 23/11/2006
M. René-Pierre Signé voudrait attirer l'attention de M. le ministre délégué à l'industrie sur l'organisation territoriale de La Poste. La réduction programmée du fonds postal national de péréquation territorial, qui passerait de 150 MEUR à 100 MEUR ou 120 MEUR, la représentation réduite des maires ruraux dans les commissions départementales de la présence postale territoriale sont de premières mesures pénalisantes. Mais les élus s'inquiètent surtout de l'avenir des bureaux de poste périphériques autour des bureaux centraux des cantons ou des arrondissements. Ces bureaux deviendraient des bureaux secondaires ; leurs employés seraient regroupés, en cas de réduction des heures d'ouverture, sur les bureaux centraux et auraient pour tâche d'assurer le service de ces bureaux de proximité, avec leur véhicule personnel, sans que leur déplacement soit pris en compte s'il ne répond pas à une obligation professionnelle. Par ailleurs, la mobilité de ces agents entraînera certains jours, ipso facto, un manque de personnel dans le bureau central. Les maires ruraux sont particulièrement alarmés par ces mesures qui leur paraissent être la première marche vers un regroupement total et définitif, c'est-à-dire vers la suppression de leurs propres bureaux de poste. Inutile de développer le coup porté ainsi par la disparition d'un service public essentiel à l'aménagement du territoire et à la vie économique du monde rural.
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Réponse du Ministère délégué au commerce extérieur publiée le 20/12/2006
Réponse apportée en séance publique le 19/12/2006
M. le président. La parole est à M. René-Pierre Signé, auteur de la question n° 1177, adressée à M. le ministre délégué à l'industrie.
M. René-Pierre Signé. Madame la ministre, je souhaite attirer votre attention sur l'organisation territoriale de La Poste.
La réduction programmée du fonds postal national de péréquation territoriale, dont les moyens passeraient de 150 millions d'euros à 100 millions d'euros ou 120 millions d'euros, la représentation réduite des maires ruraux dans les commissions départementales de présence postale territoriale sont des premières mesures pénalisantes.
Mais pis ! les élus s'inquiètent surtout de l'avenir des bureaux de poste périphériques, situés autour des bureaux centraux des cantons ou des arrondissements, qui deviendraient, selon le projet TERRAIN, des bureaux secondaires ; en cas de réduction des heures d'ouverture - ce qui est probable -, leurs employés seraient regroupés dans les bureaux centraux et auraient pour tâche d'assurer le service de ces bureaux de proximité en utilisant leur véhicule personnel, sans que leur déplacement soit pris en compte s'il ne répond pas à une obligation professionnelle.
Le projet précité est complété et aggravé par le projet « Facteur d'avenir », modulant le nombre d'agents en fonction du volume du courrier et mettant en place l'autoremplacement des agents. Cette mobilité entraînera certains jours, ipso facto, un manque de personnel dans le bureau central.
Les maires ruraux sont particulièrement alarmés par ces mesures qui leur paraissent être la première marche vers un regroupement total et définitif, c'est-à-dire vers la rétrogradation de leurs propres bureaux de poste en Relais Poste ou en agences postales communales ou, pis encore ! vers leur suppression.
Madame la ministre, il est inutile que je développe le coup que porte ainsi la disparition d'un service public essentiel à l'aménagement du territoire et à la vie économique du monde rural.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Christine Lagarde, ministre déléguée au commerce extérieur. Monsieur le sénateur, la loi relative à la régulation des activités postales du 20 mai 2005 a précisé la mission d'aménagement du territoire de La Poste. Ses dispositions s'inscrivent dans un cadre européen, qui prévoit l'ouverture du marché des services postaux en Europe.
La norme d'accessibilité prévue par la loi oblige La Poste à conserver un maillage départemental tel que 10 % de la population d'un département ne se trouve éloignée de plus de cinq kilomètres des plus proches points de contact de La Poste et ne doive pas effectuer un trajet automobile, dans des conditions de circulation normales, de plus de vingt minutes pour s'y rendre.
Avec plus de 17 000 points de contact, La Poste satisfait, dans la plupart des départements, l'obligation d'accessibilité qui résulte de la loi. Le décret n° 2006-1239 du 11 octobre 2006 prévoit que les commissions départementales de présence postale territoriale rendent annuellement un avis sur le projet du maillage territorial de La Poste visant notamment à bien vérifier le respect de la contrainte d'accessibilité posée par la loi.
La loi du 20 mai 2005 relative à la régulation des activités postales a instauré un mode de financement spécifique pour ce maillage territorial, en prévoyant la constitution du fonds postal national de péréquation territoriale. Ce fonds contribue au financement de la mission de présence postale territoriale. Ses ressources proviennent de l'allégement de fiscalité dont La Poste bénéficie, au titre des taxes locales, par le biais d'un abattement de 85 % sur les bases d'imposition. Pour l'année 2006, le montant de cet abattement fiscal est estimé à 136 millions d'euros.
Mais cette obligation d'aménagement du territoire ne fait pas obstacle à ce que La Poste fasse évoluer l'organisation et le statut de ses points de contact, en étroite concertation avec les élus. À cet égard, les agences postales communales constituent une formule adaptée pour assurer le maintien du service public dans les petites communes. Il en existe aujourd'hui plus de 3 000. De même, les 1 200 Relais Poste, qui sont installés chez les commerçants, contribuent également au maintien d'un service postal de proximité, en particulier grâce à des horaires d'ouverture importants.
Pour les communes rurales où l'activité postale est très réduite, les élus et les responsables de La Poste procèdent à une analyse objective, qui tient compte des besoins et des réalités locales. C'est seulement sur la base d'un tel constat partagé qu'il est proposé auxdites communes soit de transformer le bureau concerné en agence postale communale ou en Relais Poste, soit d'en réduire l'amplitude horaire pour l'adapter aux besoins constatés.
Dans leur grande majorité, les élus sont satisfaits de cette adaptation de la présence postale. Selon une enquête réalisée par la SOFRES au mois de juin dernier auprès de 716 maires ayant une agence postale communale ou un Relais Poste dans leur commune, 87 % des élus interrogés se déclarent satisfaits de cette forme de présence postale et prêts à la recommander à d'autres élus.
S'agissant, plus particulièrement, de l'organisation du réseau des points de contact et de son évolution dans l'ensemble des départements, La Poste revoit actuellement l'organisation de son réseau en mettant en place des territoires d'attractivité et d'initiative, les TERRAIN, qui regroupent un ensemble de points de contact - bureaux propres, Relais Poste ou agences postales - permettant une plus grande proximité avec ses clients et une meilleure accessibilité aux offres de produits et de services postaux.
Cette organisation de présence territoriale, dans le respect des obligations d'accessibilité prévues par la loi, s'efforce ainsi de prendre en compte la réalité des besoins et des usages des populations, en particulier dans le monde rural, en recherchant une complémentarité de l'offre de services accessibles dans chaque point de contact.
Ces évolutions sont conduites dans le souci du dialogue avec les élus, en particulier dans le cadre des commissions départementales de présence postale territoriale, confirmées dans la loi relative à la régulation des activités postales, au sein desquelles figure un représentant de l'État chargé, notamment, de veiller au bon déroulement de la procédure d'information et de concertation préalable aux adaptations de la présence postale.
M. le président. La parole est à M. René-Pierre Signé.
M. René-Pierre Signé. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse, mais, manifestement, nous ne voyons pas les choses de la même façon. Vous appréciez la situation au regard de la loi européenne et nationale. Pour ma part, mon analyse s'appuie sur mon expérience d'élu rural sur le terrain.
De surcroît, nos sources sont différentes. Selon vous, 87 % des maires seraient satisfaits des agences communales. J'estime, pour ma part, que le nombre d'insatisfaits est supérieur à celui des satisfaits.
L'agence communale consiste, en quelque sorte, pour une commune, en la perspective de devoir prendre en charge l'agent postal, qui va devenir un agent communal. Même si son salaire est pris en charge en partie par La Poste pendant neuf ans, à l'issue de ce laps de temps, il sera intégralement assumé par la commune.
Quant aux Relais Poste, le transfert du bureau de poste dans un commerce de proximité ne permet pas d'assurer une confidentialité suffisante notamment aux opérations financières réalisées par des personnes âgées. Si le Relais Poste est situé dans le café du coin, tout le pays sera au courant !
Le projet TERRAIN va mettre les maires face à une alternative douloureuse. Ils devront choisir soit d'installer une agence communale, qu'ils devront financer, soit de supprimer le bureau de poste.
Le projet Facteur d'avenir conduit à réduire les équipes de remplaçants et à mettre en place l'autoremplacement au sein des équipes, formule qui ne peut pas satisfaire davantage les postiers. Il prévoit également la modulation du nombre d'agents en fonction du volume du courrier. Les équipes, de ce fait, seront peut-être amenées à travailler moins le lundi et plus le samedi, jour qui serait réservé au traitement des plis publicitaires, parce que les clients seraient, paraît-il, plus disponibles.
La directive instaurant le programme Cap qualité courrier entraîne le regroupement des centres de tri départementaux au sein de grandes plates-formes industrielles de courrier.
Le projet Développement et compétitivité des centres prévoit de supprimer 1 000 emplois par an sur les 18 000 postes des centres régionaux financiers.
La Poste, en tant que service public, obéissant peut-être aux lois européennes, est en train de se désengager et de déserter les campagnes. Dans la Nièvre, resteront à peu près trente bureaux de poste, c'est-à-dire un par canton. Tous les autres seront soit transformés en agence communale, soit supprimés.
Une telle situation ne peut pas satisfaire les maires. Madame la ministre, je le répète, je suis surpris que vous estimiez que 87 % des élus locaux l'approuvent.
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