Question de Mme DEMESSINE Michelle (Nord - CRC) publiée le 12/01/2007
Question posée en séance publique le 11/01/2007
Mme Michelle Demessine. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement.
L'action de l'association les Enfants de Don Quichotte (Exclamations sur les travées de l'UMP)...
M. Éric Doligé. Et les enfants de Mitterrand ?
Mme Michelle Demessine.... et son impact médiatique ont révélé à l'opinion publique la gravité de la situation des sans-abri et des mal-logés dans notre pays.
Comme une marée montante, ce fléau atteint aujourd'hui des populations qui sont jetées à la rue même lorsqu'elles ont un emploi, avec les conséquences tragiques et inhumaines que cette action a permis de mettre sur le devant la scène.
Le droit au logement est un droit fondamental. Vous venez enfin de le reconnaître publiquement en acceptant qu'il devienne un droit opposable.
À ce titre, permettez-moi de faire un rappel. À deux reprises, lors de l'examen par la Haute Assemblée du projet de loi portant engagement national pour le logement, en première lecture le 23 novembre 2005, puis en deuxième lecture le 6 avril 2006, le groupe CRC avait déposé un amendement visant à instituer le droit opposable. À l'époque, le Gouvernement nous avait répondu ceci : « Une proclamation de l'opposabilité du droit au logement serait aujourd'hui prématurée et irréaliste. »
Grâce à la mobilisation citoyenne, ce droit opposable est devenu réaliste, et c'est tant mieux ! Mais quels moyens seront consacrés pour garantir son application, même progressive ? Voilà la question que tout le monde se pose.
Nous le savons aujourd'hui, les trois quarts des 410 000 logements construits en 2005 sont plutôt destinés aux foyers les plus aisés. En outre, le lobby anti-loi SRU, qui sévit dans votre majorité, continue d'essayer par tous les moyens de contourner l'obligation de construire 20 % de logements sociaux.
M. Jean-Pierre Michel. Très bien !
Mme Michelle Demessine. Comme nous n'avons eu de cesse de le souligner au cours de ce débat, une autre logique, consistant à tourner le dos au déferlement libéral qui sévit et prolifère autour du logement, est nécessaire.
Monsieur le ministre, êtes-vous disposé à interdire toutes les expulsions locatives, ainsi que les coupures d'eau, de gaz et d'électricité, au lieu de poursuivre en justice les maires qui se sont dotés d'un arrêté municipal interdisant les expulsions et toutes les coupures sur le territoire de leur commune ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
Êtes-vous prêt à agir contre la spéculation foncière et immobilière, qui fait flamber les loyers, parfois de plus de 60 % sur ces quinze dernières années, en vous attaquant aux avantages fiscaux que vous accordez ainsi à la spéculation, alors que vous avez diminué le dernier budget du logement de 2,7 % ?
M. Josselin de Rohan. Venez-en au fait !
Mme Michelle Demessine. Monsieur le ministre, ne croyez-vous pas que, pour garantir ce droit fondamental au logement, à l'instar des droits à l'éducation ou à la santé, il est temps pour l'État de reprendre la main sur l'ensemble du dispositif du logement social par la création d'un grand service public de l'habitat, seul garant pour faire respecter ce principe ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
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Réponse du Ministère de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement publiée le 12/01/2007
Réponse apportée en séance publique le 11/01/2007
M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement. Madame la sénatrice, la construction du droit au logement opposable est à la fois fondamentale et complexe. Depuis des années, un certain nombre de personnes souhaitent rendre ce droit effectif, comme c'est le cas pour le droit à l'éducation.
Ainsi que vous y avez fait allusion voilà quelques instants, nous avons déjà eu ce débat lors de l'examen du projet de loi portant engagement national pour le logement : nous avions souligné la nécessité, d'une part, de poursuivre la production de logements en France - j'y reviendrai - et, d'autre part, de travailler sur ce sujet difficile ; j'avais pris l'engagement de le faire.
Sur l'initiative du Premier ministre, le Haut comité pour le logement des personnes défavorisées a été saisi. Vous le savez, il s'agit d'une instance plurielle, présidée par Xavier Emmanuelli. Comme cela avait été convenu avant la fin de la session parlementaire, un rapport nous a été remis à la fin de l'année. Au vu de celui-ci, nous avons élaboré un texte législatif.
Par ailleurs, madame Demessine, il est exact, et c'est le propre de nos sociétés, qu'il est des moments où certaines actions accélèrent des processus. Mais je ne laisserai pas dire que nous n'étions pas dans ce processus. Je n'aurai pas non plus l'attitude consistant à défendre l'institution a priori et à ne pas reconnaître que le travail de fond et les événements peuvent, à un moment donné, se rejoindre pour construire un beau droit opposable dans notre pays.
Madame la sénatrice, afin d'éviter toute polémique, et puisque le Haut comité pour le logement des personnes défavorisées, qui est une structure pluraliste - un éminent sénateur de votre groupe en fait partie -, soutient ce projet à l'unanimité, je souhaiterais un accord de tous les sénateurs de la République sur ce sujet délicat. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
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