Question de M. MADRELLE Philippe (Gironde - SOC) publiée le 08/02/2007
M. Philippe Madrelle appelle l'attention de M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille sur le problème de financement des maisons départementales des personnes handicapées. Il lui rappelle que, depuis le 1er janvier 2006, en application de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005, le président du conseil général est responsable de la mise en oeuvre de la politique départementale en faveur des personnes handicapées. Les maisons départementales des personnes handicapées ont été constituées par regroupement de services existants et la mise en oeuvre de compétences nouvelles, notamment l'attribution de la prestation de compensation du handicap. Avec ce regroupement des services, la loi prévoyait le regroupement des moyens notamment en personnel. La maison départementale des personnes handicapées de la Gironde se trouve actuellement confrontée à des difficultés de financement et de fonctionnement, avec une précarisation des personnels et un détournement des crédits de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA). En Gironde, faute de financement suffisant par les membres constitutifs, tant par l'Etat que par la CNSA, la maison départementale des personnes handicapées ne peut fonctionner : il manque 1 300 000 euros. Si le conseil général s'est engagé à participer à ce différentiel, l'Etat n'a pas encore pris un tel engagement. En conséquence, il lui demande de bien vouloir lui préciser ce qu'il compte faire afin d'assurer un financement pérenne et serein des maisons départementales des personnes handicapées.
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Réponse du Ministère délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille publiée le 21/02/2007
Réponse apportée en séance publique le 20/02/2007
M. le président. La parole est à M. Philippe Madrelle, auteur de la question n° 1247, adressée à M. le ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille.
M. Philippe Madrelle. Monsieur le ministre, la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées a créé les maisons départementales des personnes handicapées, les MDPH, et précisé leurs missions, leur organisation ainsi que leur mode de financement. Cette loi a constitué les MDPH en groupements d'intérêt public, GIP, dont le président du conseil général est le président de droit.
Regroupant les commissions départementales de l'éducation spéciale, les CDES, les commissions techniques d'orientation et de reclassement professionnel, les COTOREP, les sites pour la vie autonome, les SVA, ainsi que certains services du conseil général, les maisons départementales des personnes handicapées ont vu le nombre de leurs actions augmenter par rapport aux missions exercées par ces différents services avant l'intervention de la loi. Regroupés au sein des maisons départementales des personnes handicapées, tous ces organismes vont accroître le champ de leurs interventions.
Chargées en tout premier lieu de l'accueil et de l'information du public, les MDPH ont dû, dans la plupart des cas, s'installer dans de nouveaux locaux.
Les difficultés de communication entre les systèmes informatiques initiaux nécessitent d'élaborer, en lien avec la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, la CNSA, de nouveaux systèmes d'intervention propres aux maisons départementales des personnes handicapées.
La maison départementale des personnes handicapées du département de la Gironde, que j'ai l'honneur de présider, est confrontée à deux problèmes majeurs sur lesquels je souhaite, monsieur le ministre, attirer votre attention. Je pense que ces problèmes sont non pas spécifiques à la Gironde, mais communs à l'ensemble des maisons départementales des personnes handicapées.
Se posent, tout d'abord, des problèmes de personnel.
La loi a prévu que les agents de l'État et du conseil général précédemment affectés aux missions actuellement déléguées à la MDPH soient mis à disposition du GIP, mais également qu'ils puissent refuser cette mise à disposition. Cette possibilité, dont se sont saisis les agents, notamment ceux de l'État, a conduit à une diminution des effectifs dans les MDPH. Ainsi, en Gironde, 12 agents de l'État, sur 48, ont refusé leur mise à disposition et n'ont pu être remplacés sur des postes budgétaires de l'État.
Pour faire face à cette situation, l'État a détourné des crédits CNSA destinés au fonctionnement de la maison départementale des personnes handicapées vers des créations d'emplois à durée déterminée. C'est le conseil général qui a dû, pour des raisons techniques, créer ces postes sur son propre budget afin de les affecter à la MDPH. Les crédits en question n'étant pas, bien entendu, garantis pour l'avenir, ces emplois de substitution sont temporaires et le personnel concerné se trouve en situation de précarité.
Comme beaucoup d'autres maisons de ce type, la MDPH de la Gironde doit assurer ses missions en les confiant, pour partie, à des personnels non formés et en situation précaire, dans le cadre de dispositions budgétaires qui réduisent ses moyens de fonctionnement, alors même que des personnels expérimentés restent en surnombre dans les services de l'État.
Les MDPH sont également confrontées à des problèmes budgétaires qui découlent, en partie, des questions de personnel.
Pour répondre à leurs missions présentes et à venir, les maisons départementales des personnes handicapées ont besoin de locaux adaptés, de personnel en nombre plus important et d'un système d'information performant, comme l'exige d'ailleurs la CNSA. Or les financements prévus par la loi, c'est-à-dire, pour l'essentiel, les apports initiaux des membres fondateurs du GIP, auxquels s'ajoute la contribution de la CNSA, sont inférieurs aux besoins des MDPH.
En Gironde, alors que le budget de fonctionnement nécessaire est évalué, a minima, à 3 080 580 euros, le déficit de financement s'élève à 1 184 124 euros. Le conseil général est disposé à couvrir sa part du financement nécessaire. Mais il ne pourra l'assumer seul ! Le fonctionnement de la MDPH de la Gironde sera donc compromis dès le mois de juillet prochain.
Monsieur le ministre, j'ai évoqué le cas de la Gironde, mais je suis certain que la situation est tout aussi préoccupante dans les autres départements.
Quelles mesures l'État ou la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie envisagent-ils de prendre afin de permettre aux maisons départementales des personnes handicapées d'assumer les compétences que leur assigne la loi et qui sont essentielles pour mettre en oeuvre une authentique solidarité nationale en faveur des personnes handicapées ? Que compte faire l'État pour assurer un financement pérenne et serein des maisons départementales des personnes handicapées ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Philippe Bas, ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille. Monsieur le sénateur, vous connaissez mon attachement personnel pour le département de la Gironde, qui a été pour moi une école de la décentralisation, voilà maintenant vingt-cinq ans : fonctionnaire de l'État, j'ai en effet été mis alors à la disposition du président du conseil général... que vous étiez déjà ! (Sourires.) Je garde d'ailleurs un excellent souvenir de cette période !
Monsieur le sénateur, l'État et la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie font tout leur devoir pour que les maisons départementales des personnes handicapées puissent fonctionner dans de bonnes conditions.
Il n'est nullement dans mon intention d'ouvrir une polémique sur des points ne relevant pas du sujet qui nous occupe, mais vous conviendrez que, lors de la création, sans financement, de l'allocation personnalisée d'autonomie, votre département a été confronté à une situation réellement embarrassante.
En revanche, grâce à la maison départementale des personnes handicapées et à la prestation de compensation du handicap, vous recevez un soutien non seulement en nature, par les mises à disposition de fonctionnaires de l'État et, parfois, de locaux dont l'État continue à payer les loyers, mais aussi sur le plan financier.
En effet, des dizaines de millions d'euros ont été débloqués à l'échelon national pour faire fonctionner les maisons départementales des personnes handicapées.
En outre, des sommes ont été distribuées par l'État aux départements pour cofinancer la prestation de compensation du handicap. D'ailleurs - c'est tout à fait normal, et je ne le reproche pas aux départements -, ces sommes n'ont pas pu être dépensées l'année dernière.
Par conséquent, objectivement, vous êtes actuellement dans une situation où vous avez reçu beaucoup plus d'argent de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie que vous n'avez pu en dépenser, ce qui revient à faire assurer la trésorerie des départements par les recettes de la Journée de solidarité.
À l'évidence, vous assurerez très rapidement la montée en régime de la prestation de compensation du handicap. Par ailleurs, l'efficacité des maisons départementales des personnes handicapées permettra de compenser l'avance qui vous a été faite.
Cependant, force est de constater que la situation que je décris prévaut actuellement dans tout le pays. Des sommes distribuées par l'État pour le fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées et pour la prestation de compensation du handicap ne sont pas dépensées, s'élevant, dans de très nombreux départements, à des dizaines de millions d'euros.
Je vais vous donner des précisions chiffrées, pour répondre à votre question, monsieur le sénateur.
Afin d'assurer le démarrage des maisons départementales des personnes handicapées dans les meilleures conditions, 70 millions d'euros ont été attribués en 2005 et 2006 aux départements. À ces crédits s'ajoute une dotation reconductible de 20 millions d'euros en 2006, portée à 30 millions d'euros en 2007. C'est une dotation pérenne.
En outre, 1 400 agents ont été mis à disposition ou recrutés grâce aux crédits que nous avons dégagés lorsque leur mise à disposition n'était pas possible. Ces crédits ont été non pas « détournés », comme vous l'avez dit, monsieur le sénateur, mais bien dégagés par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, avec l'accord de l'Assemblée des départements de France, qui siège au sein du conseil de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie.
C'est ainsi que, en 2005, une première délégation de crédits de 989 973 euros a été versée par l'État à la maison départementale des personnes handicapées de la Gironde pour son installation.
Au premier trimestre de 2006, une nouvelle aide exceptionnelle de 237 629 euros lui a été attribuée. Elle a été suivie au mois de juillet dernier d'une délégation de 61 286 euros, somme répartie en fonction des constats opérés par une mission de l'Inspection générale des affaires sociales quant aux besoins du département.
Ces aides s'ajoutent à la dotation de fonctionnement reconductible de 458 500 euros, qui a été attribuée par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie en 2006 et qui va être augmentée de 50 %.
Avant même d'ouvrir ses portes, votre maison départementale avait donc reçu près de 1,75 million d'euros, et cela uniquement pour son fonctionnement. Je dois d'ailleurs noter qu'elle n'a été mise en place que le 18 décembre 2006, soit dix-huit mois après le vote de la loi et plus d'un an après la parution des décrets régissant les maisons départementales.
Pour 2007, cette dotation de fonctionnement reconductible sera augmentée de 100 000 euros. Le montant global des versements de l'État à la maison départementale des personnes handicapées de la Gironde s'établira donc à 556 500 euros en 2007.
Concernant les mises à disposition de personnel, 20 agents de l'État ont été mis à disposition de votre maison départementale, 4,5 sont en prestation de services. Pour les 10 agents qui ont refusé leur mise à disposition, 442 000 euros vous ont été versés en 2006. Ces crédits permettent de prolonger 9 contrats et d'opérer 5 recrutements complémentaires pour 2007.
Je sais que vous souhaitez affecter cette enveloppe destinée au remplacement des personnels de l'État à la couverture des dépenses de fonctionnement de votre maison départementale, lesquelles sont en augmentation en raison du montant du loyer et des charges locatives des nouveaux locaux de la maison départementale.
Pour terminer, je tiens à souligner que, en 2006, la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie a délégué au conseil général de la Gironde la somme de 11,725 millions d'euros pour faire face aux dépenses de la prestation de compensation du handicap. Or, à ce jour, les dépenses du département sur ce chapitre se sont élevées à 1,47 million d'euros en 2006. (MM Bernard Dussaut et Philippe Madrelle s'exclament.)
Ainsi, plus de 10 millions d'euros se trouvent dans les caisses du département de la Gironde. En outre, vous le constatez certainement et de façon tout à fait pertinente, ces sommes font des petits, puisqu'elles produisent des intérêts, que je ne vous réclame pas !
Le département de la Gironde a donc reçu, en 2006, 10 millions d'euros de plus qu'il n'en a versés pour les personnes handicapées. Je peux vous assurer que l'État sera particulièrement vigilant et attentif à l'usage de ces crédits au profit des personnes handicapées - vous le souhaitez certainement vous-même -, et j'espère que vous aurez à coeur d'agir avec lui pour fournir aux personnes handicapées du département de la Gironde le service public de qualité auquel elles ont droit et qu'elles attendent.
M. le président. La parole est à M. Philippe Madrelle.
M. Philippe Madrelle. Monsieur le ministre, si je confirme votre chiffre de 11 millions d'euros relatif à la somme déléguée par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie au conseil général de la Gironde pour la prestation de compensation du handicap, je ne souscris pas à votre estimation des dépenses du département dans ce domaine, puisque ces dernières s'élèvent non pas à 1,47 million d'euros, mais à 4 millions d'euros. Les informations qui vous sont communiquées ne semblent pas traduire la réalité !
Cela étant, si l'on m'annonce que les 7 millions d'euros restants sont acquis au département, je m'en réjouis ! D'autant qu'ils compensent tout juste les dépenses globales affectées par le département à la maison départementale des personnes handicapées, et ce depuis 2005. Je souligne cette date, monsieur le ministre, car notre maison départementale existait déjà à cette époque, mais sur trois sites différents. Nous avons régi très vite après le vote de la loi, et avons créé la maison départementale dès les premiers jours de janvier. Elle est maintenant sur un seul site, et, en d'autres termes, il y a dorénavant unité de lieu, comme dans le théâtre classique ! (Sourires.)
Cependant, il est à craindre que, devant la montée en charge de la prestation de compensation handicap, cette marge de manoeuvre ne devienne très rapidement insuffisante. D'ailleurs, connaissant votre attachement à la Gironde, vous savez certainement que, selon les statistiques de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, ce département est le premier de France en termes de prestations de compensation du handicap. Je suis réellement inquiet devant cette évolution.
Enfin, s'agissant des personnels, douze agents de l'État n'ont pas voulu venir dans notre maison départementale, alors qu'ils sont en surnombre ailleurs ! Ce n'est pas normal ! Je vous demande donc de faire tout votre possible auprès des services de l'État pour remédier à cette situation aberrante (M. Bernard Dussaut acquiesce.) et faire en sorte que ces agents rejoignent notre maison départementale pour personnes handicapées, que j'ai inaugurée récemment avec le secrétaire général de la préfecture. Je serais d'ailleurs très heureux de vous y recevoir, monsieur le ministre ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
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