Question de M. SUEUR Jean-Pierre (Loiret - SOC) publiée le 05/07/2007
M. Jean-Pierre Sueur appelle l'attention de Mme la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports sur les expertises de l'INSERM en matière de santé mentale. Il lui rappelle que l'un de ses prédécesseurs avait pris la décision de retirer du site internet du ministère l'expertise collective élaborée par cet organisme sur l'efficacité respective de différentes psychothérapies. Cette décision a confirmé que l'indépendance scientifique absolue qui doit être celle de tout organisme de recherche n'implique pas l'obligation pour les pouvoirs publics de cautionner une évaluation scientifique, ou présentée comme telle. L'examen de « l'expertise » précitée de l'INSERM a suscité de nombreuses critiques dans la mesure où celle-ci présentait tous les « symboles de l'artefact » : les textes sélectionnés comme objet d'étude avaient, en effet, été choisis, au sein d'une ample littérature scientifique, de telle manière que soit « démontrée » la supériorité des thérapies cognitivo-comportementales sur toute forme de psychanalyse ou de psychothérapie relationnelle, alors même que ces approches procèdent de logiques trop dissemblables pour pouvoir être comparées simplement, surtout si cela est fait, de surcroît, sur la base des présupposés de l'une des approches en cause. Des professeurs d'université, chercheurs et praticiens ont ainsi considéré que cette « expertise » avait pour effet de « prédisposer l'opinion à une recomposition du paysage des formations et des pratiques de santé mentale » et de promouvoir « une idéologie selon laquelle les concepts et les pratiques naturalisant le psychisme » seraient « plus scientifiques que celles qui affirment son irréductible spécificité », ce qui « revient à faire passer un postulat idéologique pour un énoncé scientifique ». Ils ont indiqué à cet égard combien il était essentiel que les organismes de recherche « chargés d'apporter une information scientifique à nos concitoyens » ne « commencent pas par les priver des choix véritables qu'ils prétendent éclairer ». Il lui demande quelle est sa position à ce sujet. Il lui demande, en outre, de bien vouloir lui confirmer que son ministère, attaché à la pluralité des approches de la souffrance psychique, prendra en compte les critiques que suscite légitimement, eu égard à la méthode mise en oeuvre, une « expertise » élaborée dans les conditions qui viennent d'être rappelées.
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Réponse du Ministère de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative publiée le 13/11/2008
Le plan « Psychiatrie et santé mentale 2005-2008 », adopté en conseil des ministres en avril 2005, a inscrit dans ses axes prioritaires la promotion de la recherche clinique en psychiatrie afin d'apporter des éléments de connaissance à nos concitoyens sur la qualité et l'efficacité des soins qui leur sont délivrés. L'évaluation des psychothérapies est un problème complexe. À la demande du ministère chargé de la santé, l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) a réalisé en 2004 une analyse de la littérature française et internationale sur l'efficacité des différentes approches psychothérapeutiques : « Psychothérapies - trois approches évaluées (février 2004) ». La publication de ce rapport a suscité de fortes réactions chez les professionnels qui utilisent ces méthodes. De plus, ce rapport a fait l'objet de plusieurs critiques notamment quant à la possibilité de généraliser les résultats aux pratiques réelles de soin. Dans ce contexte, la définition de bonnes pratiques nécessite qu'un travail préalable soit mené afin de déterminer une méthodologie d'évaluation qui fasse l'objet d'un consensus des professionnels concernés. Dans ce cadre, la Haute Autorité de santé (HAS) a accepté de réaliser un travail de synthèse bibliographique des méthodes existantes d'évaluation des psychothérapies, en particulier celles fondées sur la pratique. De plus, un réseau de recherche clinique, fondé sur les pratiques, a été cofinancé en 2008 par l'INSERM et le ministère de la santé dans l'objectif d'évaluer les pratiques en psychothérapie et de mettre en réseau les professionnels pour améliorer leur exercice. Ce réseau, dénommé « Réseau de recherches fondées sur les pratiques psychothérapiques », est animé par la fédération française de psychiatrie (FFP) et l'unité 669 de l'INSERM. Il est structuré en quatre pôles « thématiques » (autisme et troubles envahissants du développement [TED], psychogériatrie, adolescents borderline, adultes borderline) et prend en compte les différents contextes de pratique clinique (cabinet libéral, centre médico-psychologique [CMP] et institution). La méthodologie est celle des études intensives de cas. Des praticiens de tous les différents courants de la psychiatrie participent à ce réseau.
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