Question de Mme PROCACCIA Catherine (Val-de-Marne - UMP) publiée le 23/08/2007

Mme Catherine Procaccia souhaite appeler l'attention de Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi sur l'inquiétude des élus locaux face à la réforme de la taxe professionnelle. Si le principe de la compensation est certes respecté, force est de constater que cette réforme fait porter l'effort financier sur les seules collectivités territoriales. Les différents rapports et études publiés à l'occasion du 25e anniversaire de la loi n° 82-213 du 2 mars 1982 et de la mise en oeuvre progressive de « l'Acte II de la décentralisation » ont établi que les finances des collectivités locales sont saines, mais de plus en plus contraintes par leur dynamisme et par des facteurs exogènes qui progressent plus vite que la richesse nationale (3,6 % en volume contre 2,2 % pour le PIB sur la période 1985-2005). Au nombre des ressources locales, la taxe professionnelle, impôt perçu au profit des communes, des départements, des régions et de plus en plus au profit des établissements publics de coopération intercommunale, représente 50 % des ressources fiscales des collectivités territoriales. L'article 85 de la loi de finances pour 2006 a porté réforme de la taxe professionnelle pour 2007. Pour les entreprises, le dégrèvement pour investissements nouveaux, calculé sur les investissements entrant dans le champ des amortissements dégressifs, est pérennisé à compter de 2007, sous la forme de dégrèvement de taxe professionnelle à hauteur de 100 % la première année, 2/3 la deuxième année et 1/3 la troisième année. Les entreprises bénéficient également, à compter de 2007, d'un plafonnement de la taxe professionnelle à hauteur de 3,5 % de leur valeur ajoutée. Ce plafonnement tient compte de la cotisation réellement acquittée et non plus calculée sur les taux de l'année 1995. Cela représente un allégement total de 2,7 milliards d'euros en 2007, et de 3,4 milliards en 2008. Pour les collectivités territoriales et leurs groupements, une partie du plafonnement de la taxe professionnelle en fonction de la valeur ajoutée est mise à leur charge. Cette participation des collectivités locales correspond à la fraction des dégrèvements qui est imputable aux hausses des taux votées par chaque collectivité. Un mécanisme de réfaction peut s'appliquer en fonction de la situation de la collectivité. Cet allégement de la fiscalité directe locale, qui profite au développement économique des entreprises et donc de notre pays, est en partie compensé par l'État. Les différents rapports publiés ces derniers mois, s'ils écartent les polémiques sur la qualité de la gestion locale, dénoncent en revanche l'obsolescence du système fiscal attribué aux collectivités locales et critiquent la part grandissante de la fiscalité locale prise en charge par l'État au travers des compensations de dégrèvements et d'exonérations. Elle lui demande, en conséquence, vers quelles directions elle compte mener sa réflexion pour une future réforme de la fiscalité locale et notamment pour assurer une relative neutralité fiscale pour chaque contribuable, ménage ou entreprise, assurer un volume de ressources stables et dynamiques à chaque collectivité tout en confortant la responsabilité des acteurs locaux, et limiter l'impact de la réforme sur les finances de l'État.

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Réponse du Secrétariat d'État chargé des entreprises et du commerce extérieur publiée le 10/10/2007

Réponse apportée en séance publique le 09/10/2007

M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, auteur de la question n° 26, adressée à Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi.

Mme Catherine Procaccia. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, ma question porte sur la réforme de la taxe professionnelle et ses conséquences sur les ressources des collectivités locales.

Les collectivités constatent que ce sont elles qui supportent l'essentiel de l'effort financier, même si le principe de la compensation est effectivement bien respecté. Les différents rapports et études publiés à l'occasion du vingt-cinquième anniversaire de la loi du 2 mars 1982 et de la mise en oeuvre progressive de « l'Acte II de la décentralisation » ont établi que les finances des collectivités locales étaient saines, mais de plus en plus contraintes par des facteurs exogènes qui progressent plus vite que la richesse nationale - 3,6 % en volume contre 2,2 % pour le PIB sur cette même période.

La taxe professionnelle représente 50 % de leurs ressources fiscales. Or l'article 85 de la loi de finances pour 2006 a porté réforme de la taxe professionnelle pour 2007.

Ainsi, pour les entreprises, le dégrèvement de la taxe professionnelle pour investissements nouveaux entrant dans le champ des amortissements dégressifs est pérennisé à hauteur de 100 % la première année, deux tiers la deuxième année et un tiers la troisième année.

Les entreprises bénéficient également d'un plafonnement de leur taxe professionnelle à hauteur de 3,5 % de leur valeur ajoutée, soit un allègement total de 2,7 milliards d'euros en 2007 et de 3,4 milliards d'euros en 2008.

Pour les collectivités territoriales et leurs groupements, la partie du plafonnement de taxe professionnelle imputable aux hausses des taux votées est mise à leur charge. Un mécanisme de réfaction peut s'appliquer en fonction de la situation de la collectivité.

Cet allègement de la fiscalité directe locale, qui profite certes au développement économique des entreprises et donc au développement économique de notre pays, est en partie compensé par l'État. Mais les différents rapports publiés soulignent l'obsolescence du système fiscal des collectivités locales et critiquent la part grandissante prise en charge par l'État au travers des compensations de dégrèvements et d'exonérations.

Je vous demande donc, monsieur le secrétaire d'État, dans quelles directions vous comptez mener la réflexion sur la future réforme de la fiscalité locale afin, notamment, d'assurer une relative neutralité fiscale pour chaque contribuable, mais aussi et surtout un volume de ressources stables et dynamiques pour chaque collectivité.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé des entreprises et du commerce extérieur. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie tout d'abord d'excuser Mme Lagarde, qui est toujours retenue en commission à l'Assemblée nationale.

M. le président. Elle n'est pas prisonnière quand même ! (Sourires.)

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Non, monsieur le président, mais les questions des députés sont au moins aussi insistantes que celles des sénateurs. Elles sont peut-être parfois un peu moins aiguës, mais j'exprime là une opinion !

Madame Procaccia, en posant votre question, vous entrez d'emblée dans le coeur de la réforme de nos prélèvements obligatoires. Comme cela a été annoncé hier, Mme Lagarde a été chargée par le Président de la République et le Premier ministre d'une mission en vue de parvenir à une réforme de ces prélèvements obligatoires.

Aux termes de la lettre de mission, il s'agit d'animer une revue générale des prélèvements obligatoires. Cet exercice devra déboucher au printemps 2008 sur des propositions concrètes. Il y aura d'abord le diagnostic, nous aurons donc une évaluation de tous les prélèvements, y compris, bien sûr, de la taxe professionnelle. À la suite de ce diagnostic seront constitués des groupes de travail qui préciseront les modalités et le calendrier des réformes éventuelles envisagées ; enfin, après une phase de concertation, la réforme sera mise en oeuvre. La question que vous posez doit s'intégrer dans cette revue générale des prélèvements obligatoires.

Sur le plan spécifique de la réforme de la taxe professionnelle, je me dois de faire un rapide rappel avant d'ouvrir quelques pistes devant vous.

La réforme de la taxe professionnelle a institué un plafonnement des cotisations effectivement acquittées par les entreprises à hauteur de 3,5 % de leur valeur ajoutée.

Corrélativement, on a institué un mécanisme de partage du financement du coût du plafonnement entre l'État, les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale, les EPCI, dotés d'une fiscalité propre.

Madame le sénateur, je rappelle que le coût de cette réforme est pour la plus grande partie pris en charge par l'État sur la base d'une cotisation déterminée en retenant un taux de référence actualisé, en l'occurrence le taux de l'année 2005 dans la limite du taux de l'année 2004 majoré d'un pourcentage variable, ou le taux de l'année d'imposition s'il est inférieur.

La charge supplémentaire du dégrèvement résultant, le cas échéant, d'une augmentation de taux décidée par les collectivités territoriales et les EPCI dotés d'une fiscalité propre par rapport au taux de référence est financée par ces collectivités ou les EPCI.

La participation ou non au financement du dégrèvement au titre du plafonnement en fonction de la valeur ajoutée s'apprécie donc annuellement en fonction de la politique de taux de chaque collectivité ou chaque EPCI.

De plus, afin de tenir compte des situations particulières de certaines collectivités ou des EPCI, des mécanismes d'atténuation spécifiques s'appliquent sur le montant de cette participation.

Cette réforme, il ne faut pas l'oublier, était indispensable, au moins dans un premier temps par ce plafonnement, pour mettre fin aux situations de surimposition qui pesaient sur la compétitivité de nos entreprises et pour rendre à la taxe professionnelle son caractère d'impôt local.

À cet égard, un certain équilibre me semble aujourd'hui atteint quant aux charges et aux responsabilités pesant sur les collectivités, l'État et les contribuables.

J'en viens aux pistes de réforme de la fiscalité directe locale.

Comme vous l'avez rappelé, le système actuel est compliqué et il est en effet critiquable. Les réformes nécessaires doivent être menées en concertation avec les élus locaux, et ce dans deux directions : d'abord, moderniser les valeurs locatives ; ensuite, réfléchir à la mise en place de nouvelles relations avec les collectivités territoriales.

S'agissant de la modernisation des valeurs locatives, la révision prévue par la loi de 1990 n'a jamais été mise en oeuvre par crainte des transferts entre contribuables d'une même collectivité et entre collectivités. De fait, la fiscalité directe locale repose toujours sur des valeurs fixées en 1961 - il y a maintenant plus de quarante ans - pour les propriétés non bâties et en 1970 pour les propriétés bâties.

Cette situation n'est plus acceptable. Aussi, dans le cadre de la revue générale des prélèvements obligatoires à laquelle je faisais allusion, et en étroite concertation avec les associations des élus locaux, des propositions d'améliorations concrètes de notre système d'évaluation seront faites, notamment dans le sens d'un assouplissement des règles de mise à jour et d'un renforcement de la participation des élus locaux dans le processus de détermination de la valeur locative.

Il faut aussi, dans le même temps, réfléchir à la mise en place de nouvelles relations avec les collectivités territoriales. Comme vous le soulignez, nous devons redonner de la lisibilité au lien entre les collectivités territoriales et les contribuables. Pour ce faire, quatre principes guideront notre réflexion : premièrement, proscrire autant que faire se peut la superposition des autorités ayant un pouvoir de taux sur une même assiette ; deuxièmement, attribuer à chaque collectivité territoriale un niveau de diversification suffisant de ses ressources fiscales ; troisièmement, supprimer à terme toute interposition de l'État entre les collectivités et les contribuables ; quatrièmement, enfin, limiter les transferts entre collectivités.

Pour le Gouvernement, le chantier de la rénovation de la fiscalité locale est un chantier difficile, compliqué mais essentiel. Madame le sénateur, vous pouvez être assurée de la détermination du Gouvernement à aboutir en étroite collaboration, bien sûr, avec les élus locaux. C'est l'engagement qui a été pris par le Premier ministre le 4 octobre dernier, lors de la réunion d'installation de la Conférence nationale des exécutifs. Des décisions interviendront sans nul doute au printemps 2008...
M. Roland Courteau. Après les municipales !

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État.... après cette revue générale des prélèvements obligatoires à laquelle Mme la ministre a été priée de se livrer sous l'autorité du Président de la République et du Premier ministre.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia.

Mme Catherine Procaccia. Je constate que ma question était à la fois prémonitoire, puisque Mme Lagarde a été nommée hier et que ma question a été déposée avant, et prématurée, puisque la réflexion n'est pas encore lancée.

Cela dit, les pistes de réflexion que vous avez annoncées dans votre réponse me paraissent aller dans le bon sens.

Le Sénat étant le représentant des collectivités locales, j'ai souhaité, à travers cette question, vous faire part de notre inquiétude, en tant qu'élus locaux, quant à l'avenir du financement de nos projets car, pour engager des projets, il faut être sûr des sources de financement. Or, pour l'instant, ces sources ne sont pas sûres.

Vous nous annoncez une réflexion qui va durer plusieurs mois, je conçois bien qu'elle ne puisse aboutir en quelques jours, et je pense que les élus apprécieront que vos services les associent aux réflexions qu'ils mèneront sur le plan tant local que national.

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