Question de M. LEROY Philippe (Moselle - UMP) publiée le 18/10/2007
M. Philippe Leroy appelle l'attention de Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur la nécessaire modernisation de l'organisation des services de secours à personnes. En effet, ce dispositif révèle au quotidien ses limites, suscitant l'inquiétude et l'émoi légitimes de nos concitoyens. Aussi, il lui demande de bien vouloir lui donner des précisions sur les orientations concrètes de cette modernisation, sur le calendrier des discussions à mener et sur les moyens financiers qui seront engagés à cet effet, notamment la réévaluation du montant affecté au fonds d'aide à l'investissement (FAI) des services départementaux d'incendie et de secours (SDIS).
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Réponse du Ministère de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales publiée le 07/11/2007
Réponse apportée en séance publique le 06/11/2007
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Leroy, auteur de la question n° 69, adressée à Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.
M. Philippe Leroy. Madame le ministre, le récent congrès de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France a ranimé le débat permanent sur la nécessaire modernisation de l'organisation de nos services de secours à personnes et démontré la difficulté à réformer un système complexe aux multiples acteurs.
Ce sujet, maintes fois abordé au sein de notre assemblée par nombre de mes collègues et moi-même, semble aujourd'hui trouver une écoute attentive et résolue du Président de la République et du Gouvernement. Madame le ministre, je ne peux que m'en réjouir.
Notre dispositif de secours d'urgence à personnes révèle au quotidien ses limites, suscitant l'inquiétude et l'émoi légitimes de nos concitoyens sur ce sujet, notamment dans les zones rurales.
En raison, surtout, de la rigidité de nos systèmes centralisés de régulation des appels d'urgence, il n'est pas rare que les moyens engagés tardent à se rendre sur le lieu de l'intervention ou ne soient pas adaptés à la situation, nécessitant l'envoi de nouveaux moyens et allongeant d'autant plus le délai d'attente. J'ai pu moi-même en être témoin devant mon domicile, ce qui a déclenché, depuis deux ans, mon vif intérêt pour cette question.
En outre, le problème de la répartition des effectifs des médecins généralistes libéraux, notamment en zones rurales, et la mise en place, depuis 2004, de gardes assurées sur la base du volontariat accentuent encore le manque de disponibilité des médecins et, de ce fait, compliquent la mise en place des secours d'urgence.
La nécessité de faire évoluer notre système afin d'obtenir une meilleure adéquation entre les besoins de la population et les moyens est aujourd'hui reconnue par tous.
La reconstruction d'un dispositif d'urgence pertinent et efficace devra chercher à établir - et je pense, madame le ministre, que vous en êtes convaincue -, un commandement unique, tout en assurant une collaboration évidemment respectueuse des différents acteurs, et la mise en place d'un seul numéro de secours à l'échelon départemental de façon à éviter la confusion dans ces appels. Un seul numéro de secours permettrait ensuite de graduer notre système de réponse. Le département de la Moselle, dont je préside le conseil général, est candidat à une expérimentation allant dans ce sens.
Il nous faut aussi clarifier l'organisation institutionnelle du dispositif. Je défends depuis longtemps - sans succès, d'ailleurs - l'idée d'intégrer l'organisation de la permanence des soins, qui est également un sujet d'importance, et de la gestion des secours d'urgence comme volets du schéma régional d'organisation sanitaire, le SROS. Cela permettrait une meilleure coordination entre votre ministère et le ministère de la santé.
Je souscris, madame le ministre, à l'idée exprimée par la Fédération nationale des sapeurs-pompiers selon laquelle la notion d'urgence doit conduire le déclenchement immédiat des secours, ce qui n'est pas évident dans notre système.
Si, à l'alerte, l'appel est urgent, ou semble l'être, il ne faut pas se poser de questions. Les secours des sapeurs-pompiers doivent être déclenchés automatiquement. C'est une mesure simple qui nous permettrait de pallier les nombreuses insuffisances que nous constatons aujourd'hui.
Pour que ce système fonctionne, la coopération entre les services départementaux d'incendie et de secours et les services d'aide médicale urgente, les SAMU, doit être facilitée par la mise en place d'outils de communication très modernes. Je sais que vous y réfléchissez, notamment à travers le système ANTARES, acronyme pour « adaptation nationale des transmissions aux risques et aux secours ».
Cette modernisation ne pourra se faire sans le concours financier de l'État, madame le ministre, et, à cet égard, un problème se pose. L'État devra consentir à une réévaluation substantielle du montant affecté au fonds d'aide à l'investissement des SDIS en 2008. Ce fonds a été fortement ponctionné en 2007 et ce désengagement, au motif d'une sous-consommation de crédits, ne peut pas se justifier, parce que nous savons comment, dès 2008, utiliser ces crédits. Le système ANTARES est une nécessité absolue.
Enfin, je ne voudrais pas poser ma question sans rendre légitimement hommage au dévouement et à la compétence de l'ensemble des professionnels et volontaires des secours à personnes, qui, malgré ce contexte difficile, oeuvrent chaque jour à la sécurité de nos concitoyens.
Madame le ministre, pouvez-vous nous indiquer les orientations concrètes qui guideront votre démarche de modernisation des services de secours à personnes, et le calendrier selon lequel vous escomptez mener les discussions ? Pouvez-vous également nous assurer que les moyens financiers nécessaires seront engagés dès l'année prochaine ?
Mme la présidente. La parole est à Mme le ministre.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. Monsieur Leroy, le problème que vous soulevez intéresse nos concitoyens, qu'ils vivent en zone rurale ou en zone urbaine. Un certain nombre de dysfonctionnements ou, plus exactement, de retards dans le secours aux personnes exigent effectivement que nous prêtions attention à cette question et que nous rassurions nos concitoyens en leur donnant une ligne très claire de la politique qui est suivie par le Gouvernement.
Je précise tout d'abord que la mission de secours à personnes assurée par les SDIS représente près de 70 % de leurs interventions. C'est d'ailleurs une activité en croissance puisqu'elle a augmenté de près de 7 % entre 2005 et 2006. D'ailleurs, cela est probablement lié au problème que vous avez également soulevé, celui de la présence médicale dans les zones rurales.
Ces missions de secours aux personnes sont effectuées soit d'initiative, dans le cas de ce que l'on appelle le « prompt secours », le besoin immédiat, soit avec une régulation médicale, dans le cadre de l'aide médicale d'urgence. Elles impliquent, de toute façon, que des relations extrêmement étroites et régulières soient établies entre les différents acteurs et, en particulier, avec les SAMU.
À ce jour, onze départements bénéficient d'un centre de réception unique pour les appels d'urgence, ce qui permet de traiter les demandes émises par les personnes intéressées à partir des numéros 15, 18 et 112 d'une façon commune, c'est-à-dire de déterminer qui est le plus près et le plus à même d'apporter le secours nécessaire.
J'ai moi-même vu un modèle, en quelque sorte, de ce fonctionnement à la caserne Champerret, où, pour la région parisienne, existe ce système de centre d'appels commun et où, avec la présence de pompiers et de médecins du SAMU, est effectuée une répartition immédiate en fonction des besoins, ce qui implique donc une réactivité très grande ainsi qu'une adéquation des moyens mis en oeuvre.
Je soutiens très fermement cette démarche. Mon ministère contribue d'ailleurs au financement des équipements nécessaires à la mise en oeuvre de ces dispositifs, notamment par le biais du fonds d'aide à l'investissement des SDIS, que vous avez évoqué tout à l'heure.
Ce modèle est en voie de généralisation puisque dix-huit départements préparent actuellement un projet qui leur permettra de rejoindre les onze départements qui sont déjà équipés en ce sens.
Le renforcement de la coordination opérationnelle entre les différents acteurs de secours fait l'objet aujourd'hui de travaux qui sont menés en commun entre le ministère de l'intérieur et le ministère de la santé afin d'essayer de faire sauter les blocages techniques ou psychologiques qui peuvent exister.
D'ailleurs, je note qu'à plusieurs reprises des tentatives de régler ces problèmes ont été faites. Ainsi, une circulaire du 29 mars 2004 avait prévu l'établissement de conventions tripartites entre les SDIS, les SAMU et les transporteurs sanitaires privés. Aujourd'hui, soixante-quatre départements, disposent d'une telle convention.
Cela dit, des problèmes demeurent. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle une évaluation qualitative est actuellement en cours auprès des préfets pour voir ce que donne l'application de cette convention.
Mais il faut aller plus loin. Comme l'a souligné le Président de la République devant le congrès national des sapeurs-pompiers de France le 29 septembre, il est nécessaire de revoir ces dispositifs sans querelle de chapelle ni souci de chasse gardée. L'important est d'abord de répondre aux besoins de nos concitoyens qui se trouvent dans une situation d'urgence.
Sans remettre en cause dans son principe la régulation médicale assurée par les centres 15, nous devons désormais, et c'est aussi le sens de votre souhait, mettre en place une réponse graduée des secours devant l'urgence, les besoins étant différents suivant les cas.
Une expérimentation sera donc lancée, dès 2008, dans quelques départements avec, pour objectif, de valider une généralisation nationale du dispositif.
J'ai bien noté, monsieur le sénateur, que vous étiez candidat à l'expérimentation, en tant que président du conseil général de la Moselle. J'en prends acte, certaine que votre demande sera accueillie avec beaucoup d'intérêt : nous allons vérifier si les conditions techniques sont remplies. Quoi qu'il en soit, je souhaite que la généralisation du dispositif puisse intervenir dès 2009.
En ce qui concerne le fonds d'aide à l'investissement des SDIS, certains équipements, certains éléments structurants du secours aux personnes, comme les centres de traitement des appels, leur interconnexion ou les systèmes d'information partagée, qui relèvent des orientations nationales retenues avec les élus, sont bien entendu éligibles. C'est aussi le cas du réseau ANTARES, qui vise à améliorer très sensiblement, en les modernisant, les échanges d'informations entre les SAMU et les SDIS. La réalisation est en cours et je vous confirme que la prise en charge du bouclage du réseau ANTARES a bien été prévue dans les crédits alloués au Fonds pour 2008. Il n'y a donc pas de problème à cet égard.
Monsieur le sénateur, vous le voyez, le Gouvernement partage vos préoccupations et son action va dans le sens que vous préconisez. C'est d'ailleurs tout à fait naturel puisque nous menons ces travaux en liaison étroite avec les élus, qui sont les plus à même de connaître et de comprendre les attentes de nos concitoyens.
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Leroy.
M. Philippe Leroy. Madame le ministre, je vous remercie de la qualité de votre réponse et des engagements que vous prenez. Je réitère la proposition d'une expérimentation dans le département de la Moselle. J'insiste aussi, et je vous prie de m'en excuser, sur l'aspect financier du problème et sur la nécessité d'alimenter le fonds d'aide à l'investissement : si, aujourd'hui, les départements doivent investir, ils n'ont cependant pas les moyens de se substituer complètement à l'État.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Bien sûr !
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