Question de M. BERNARD-REYMOND Pierre (Hautes-Alpes - UMP) publiée le 01/11/2007

M. Pierre Bernard-Reymond appelle l'attention de M. le ministre des affaires étrangères et européennes sur les graves difficultés que rencontre le projet Galileo. Alors que tous les pays de l'Union semblent reconnaître l'intérêt d'une telle réalisation du point de vue de l'indépendance stratégique de l'Europe, de son progrès technologique, de sa performance économique et de la création d'emplois, aucun accord politique n'a pu être trouvé jusqu'ici sur le montage juridique et financier qui doit porter ce projet. Cette situation semble très emblématique des difficultés que rencontre la construction concrète de l'Europe dans des domaines essentiels pour son avenir : interventions extérieures, nationalismes économiques, divergences de conceptions juridiques, malthusianisme financier, incapacité à surmonter des divergences qui apparaissent relativement mineures au regard des enjeux. Il lui demande quelle analyse fait le Gouvernement de cette situation et quelles initiatives il compte prendre pour assurer rapidement l'avenir de Galileo.

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Réponse du Secrétariat d'État chargé des affaires européennes publiée le 21/11/2007

Réponse apportée en séance publique le 20/11/2007

M. le président. La parole est à M. Pierre Bernard-Reymond, auteur de la question n° 87, adressée à M. le ministre des affaires étrangères et européennes.

M. Pierre Bernard-Reymond. Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie d'avoir pris le temps de venir informer le Sénat de l'état d'avancement du projet européen de radionavigation par satellite, le programme GALILEO, qui a été lancé sur l'initiative de la France.

Ce projet est essentiel pour l'indépendance stratégique de l'Europe, pour son progrès technologique et économique et pour l'emploi puisqu'il devrait créer au moins 100 000 emplois. Or, jusqu'ici, ce dossier a rencontré beaucoup de vicissitudes, de nature diverse, et a pris un retard de plus de quatre ans, tandis que les Etats-Unis mettent au point leur GPS de troisième génération et que la Russie et la Chine songent à se doter de systèmes analogues.

Le premier montage juridico-financier envisagé, selon une formule associant les secteurs public et privé qui rassemblait les constructeurs et les futurs utilisateurs du système, ayant fait long feu, on s'est orienté vers une structure à base de fonds publics, les uns souhaitant un financement communautaire et les autres un financement réalisé à partir de contributions nationales, au travers de l'Agence spatiale européenne.

En fait, nous vivons un nouvel épisode de la compétition industrielle franco-allemande, qui n'est pas toujours un long fleuve tranquille !

Cette question a été évoquée lors du dernier sommet franco-allemand, sans qu'un accord ait encore pu être trouvé.

Monsieur le secrétaire d'Etat, pourriez-vous faire le point sur l'avancement de ce dossier, très emblématique pour la construction d'une Europe concrète ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Jean-Pierre Jouyet, secrétaire d'État chargé des affaires européennes. Monsieur le sénateur, je vous remercie d'avoir posé cette question sur ce sujet, particulièrement important, qui me tient à coeur et que j'évoque souvent lors de mes différents déplacements européens, notamment à Bruxelles et à Strasbourg.

Trois questions se posent. De quoi s'agit-il ? Que s'est-il passé ? Où en sommes-nous ?

De quoi s'agit-il ? Comme vous l'avez largement rappelé, monsieur le sénateur, l'Europe s'est engagée, sur l'initiative de la France en 1999, dans le projet GALILEO, programme de radionavigation par satellite, ambitieux à la fois dans ses dimensions politiques, économiques, technologiques et industrielles.

L'enjeu pour l'Europe est son indépendance stratégique et son avenir technologique. Ce système, comme vous le savez, offre une gamme d'applications plus étendue que le GPS, tout en étant compatible avec le système américain. Il est absolument capital de le développer si la France veut garder son rang par rapport non seulement aux États-Unis, mais également à la Chine et à la Russie, qui font de grands progrès dans ce domaine. Chacun en convient.

Que s'est-il passé ? Nous nous sommes heurtés à des difficultés de financement. Le partenariat entre les secteurs public et privé n'a pas fonctionné en raison de l'ampleur des investissements à réaliser et des risques à prendre. Par conséquent, le conseil des ministres des transports du 8 juin dernier a mis fin à ce mode de développement initial et a décidé, sur proposition de la Commission, de financer sur fonds publics la mise en orbite de trente satellites.

Où en sommes-nous aujourd'hui ? Sur la base des nouvelles propositions de la Commission, trois points font l'objet de débats. Ils visent le financement, le partage de la charge industrielle et la gouvernance.

Tout d'abord, la Commission propose un financement entièrement communautaire de 2,4 milliards d'euros, somme qui s'ajoute au 1 milliard d'euros déjà alloué au précédent projet. Pour cela, elle suggère d'utiliser les crédits qui ne sont pas consommés sur les autres chapitres du budget communautaire de 2007. Cette proposition, qui doit encore être discutée à la fin de la semaine par les ministres du budget, devrait recueillir, selon moi, l'assentiment de l'ensemble de nos partenaires, à l'exception de l'Allemagne.

Ensuite se pose la question du partage de la charge industrielle. Je tiens à rappeler que, derrière les questions financières pour savoir si l'on retient un financement européen ou passant par l'Agence spatiale européenne, sont en jeu les retombées du programme en matière industrielle. Nos partenaires allemands souhaitent, évidemment, avoir des retours qui correspondent à leurs engagements financiers.

Il faut savoir aussi comment on travaille. On a besoin pour la réalisation des satellites et lanceurs, et conformément aux règles du droit communautaire, d'un certain degré de concurrence entre les opérateurs. La Commission a fait un certain nombre de propositions concrètes pour partager les marchés en différents lots. Sur ce point, nous sommes en contact étroit avec nos amis allemands. Depuis le conseil franco-allemand du 12 novembre dernier, un certain nombre de progrès ont été réalisés. Nous avons indiqué à nos amis allemands que nous étions prêts à opérer un partage équitable de la charge de travail entre les différents opérateurs, mais qu'il était également nécessaire de maintenir un certain degré de concurrence entre les différents lots susvisés, ce que, d'ailleurs, nous demanderaient nos autres partenaires.

Un compromis est, je le pense, à portée de main. Les opérateurs et la Commission peuvent trouver un accord dans le respect des règles de concurrence, et nous sommes relativement confiants. Cette question doit encore être finalisée au niveau politique.

Enfin, sur le plan de la gouvernance, la maîtrise d'ouvrage serait laissée à l'Agence spatiale européenne, la Commission étant associée au déroulement du projet. La mise en oeuvre technique devrait être, quoi qu'il en soit, effectuée par l'Agence. Ce sujet ne soulève aucune difficulté de la part de nos partenaires allemands.

Pour conclure, je dirai que chacun en Europe est attaché à la réalisation et au succès de ce projet. Chacun est déterminé à le voir aboutir.

Cela ne peut se faire évidemment sans un accord franco-allemand, mais cela ne se fera pas non plus sans que l'ensemble de nos partenaires y soit associé. Or, tous manifestent clairement la volonté de contribuer à la réalisation de GALILEO.

Ce projet est donc emblématique non seulement de l'avenir stratégique et technologique de l'Europe, mais aussi des relations franco-allemandes. Sur ce dernier aspect, je dirai même qu'il est emblématique des nouvelles relations qui existent entre la France et l'Allemagne dans le cadre de l'Europe à vingt-sept.

M. le président. La parole est à M. Pierre Bernard-Reymond.

M. Pierre Bernard-Reymond. Je remercie M. le secrétaire d'État de sa réponse très précise.

Nous sommes en présence d'un projet qui, sur le fond, recueille pratiquement l'unanimité de nos partenaires et qui est pour ainsi dire déjà financé. Je ne veux donc pas croire que nous puissions buter sur la dernière difficulté que vous avez évoquée.

Je vous remercie d'avance de tous les efforts que vous produirez pour faire en sorte que Galileo devienne très rapidement une réalité.

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