Question de M. MASSON Jean Louis (Moselle - NI) publiée le 08/11/2007
M. Jean Louis Masson attire l'attention de Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur la part de subjectivité qui existe dans la différence entre la notion de secte et celle de religion. Aucune disposition législative ou réglementaire ne précise cette différence. Des exemples historiques et les comparaisons actuelles d'un pays à l'autre confirment d'ailleurs cette dimension subjective. Ainsi à l'origine, les premiers chrétiens étaient considérés comme une secte particulièrement dangereuse devant être réprimée. De même aujourd'hui, de nombreux pays européens considèrent que les Témoins de Jéhovah ou l'Eglise de Scientologie sont des religions (l'Espagne vient notamment de conférer le statut de religion à l'Eglise de Scientologie). Or en France, de nombreux politiciens font de la lutte contre les sectes, un fond de commerce électoral. Il souhaiterait savoir si, compte tenu des critères de liberté publique retenus dans le cadre des accords internationaux signés par la France (Convention internationale des droits de l'Homme, Convention européenne des droits de l'Homme ), il n'y a pas un risque qu'un jour, la France soit poursuivie en raison des dérives de la lutte antisecte. En particulier, ces dérives risquent tôt ou tard d'aboutir à ce qu'arbitrairement, certaines religions soient assimilées à des sectes et victimes de rétorsions diverses en totale contradiction avec les grands principes de liberté de religion et de liberté de pensée héritées de la Révolution française. Plus généralement, certaines religions peuvent autant conduire que les sectes à des atteintes graves aux personnes (abus sur les mineurs de la part de sectes, mais aussi application de la charia par des fondamentalistes musulmans ). Il lui demande si plutôt que de dresser des listes noires ou de créer une distinction arbitraire et imprécise entre secte et religion, il ne serait pas préférable de réprimer les dérives au sens objectif du terme tout en laissant pour le reste les croyants et notamment les adultes croyants totalement libres d'adhérer et de pratiquer la croyance qui leur convient.
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Réponse du Ministère de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales publiée le 22/05/2008
Conformément à sa conception de la laïcité, exprimée par l'article 10 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, la République française ne saurait s'immiscer dans les croyances auxquelles peuvent librement adhérer les personnes. Elle assure conjointement la protection de la liberté de conscience et la sauvegarde de l'ordre public, notamment en protégeant les personnes contre les dérives sectaires constitutives d'infractions pénales. Respectueux de ces exigences d'égale valeur, l'État n'a jamais donné de définition juridique des notions de secte et de religion. Seule la détermination objective de faits portant atteinte à l'ordre public, aux biens ou aux personnes, doit permettre de lutter contre les dérives sectaires. Cette conception est celle qui a prévalu lors de l'élaboration de la loi n° 2001-504 du 12 juin 2001 visant à renforcer la prévention et la répression des mouvements sectaires portant atteinte aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales. Ainsi, la répétition de condamnations pénales (parmi lesquelles on peut citer les atteintes volontaires ou involontaires à la vie ou à l'intégrité physique ou psychique de la personne, la mise en danger de la personne, l'exercice illégal de la médecine...) doit permettre d'obtenir la dissolution judiciaire de toute personne morale, sur le fondement de cette loi. Le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales a rappelé aux préfets de département, par circulaire du 25 février 2008, que le suivi des mouvements dont les agissements sont susceptibles de faire l'objet de procédures judiciaires nécessite un recoupement d'informations entre les services membres du groupe de travail spécifiquement consacré aux dérives sectaires au sein des conseils départementaux de prévention de la délinquance, d'aide aux victimes et de lutte contre la drogue, les dérives sectaires et les violences faites aux femmes, sur le modèle du fonctionnement des groupements d'intervention régionaux. L'action menée dans les départements l'est en étroite collaboration avec les procureurs de la République.
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