Question de M. RAINAUD Marcel (Aude - SOC) publiée le 22/11/2007

M. Marcel Rainaud interroge Mme la garde des sceaux, ministre de la justice sur la pertinence de sa décision de fermer les tribunaux d'instance de Limoux et de Castelnaudary.

L'annonce faite le 10 Novembre dernier, à Montpellier, de la fermeture de ces deux tribunaux dans le département de l'Aude, suscite de vives réactions.

Elle vient confirmer la publication faite dans un quotidien national le jour même de la réunion dite de concertation organisée en préfecture, d'une liste des tribunaux condamnés, illustrant ainsi qu'il ne s'agissait là que d'un simulacre de concertation.

Si une réforme de la justice est en effet indispensable, elle aurait dû se traduire par le désengorgement des tribunaux de grande instance, en transférant notamment de droit des familles vers les tribunaux d'instance, ce qui aurait aussi permis de rapprocher la justice de la population et d'en améliorer l'efficacité.

Ainsi la décision de centraliser encore plus de dossiers sur les TGI soulève-t-elle de lourdes interrogations sur l'aggravation des difficultés déjà existantes, en termes de délais d'instruction et de traitement des dossiers.

Il lui demande de préciser les réponses qu'elle entend formuler à ces légitimes inquiétudes, ainsi que les moyens qu'elle envisage de mettre en œuvre afin d'évaluer les conséquences de sa décision sur l'efficacité de la justice.

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Réponse du Ministère de la Justice publiée le 28/02/2008

La garde des sceaux, ministre la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que la réorganisation des juridictions est une nécessité pour garantir au justiciable une justice de qualité et aux magistrats, fonctionnaires et professions judiciaires des conditions, dignes de travail. La réforme de la carte judiciaire, maintes fois évoquée, est devenue aujourd'hui impérieuse et urgente pour répondre tant aux obligations de la loi qu'à la nécessité d'améliorer le fonctionnement des juridictions. En effet, après le drame d'Outreau, l'Assemblée nationale et le Sénat ont adopté la loi du 5 mars 2007 qui vise à éviter l'isolement des juges, à encadrer les jeunes magistrats et à renforcer la collégialité en instituant les pôles de l'instruction. Ces pôles de l'instruction, dès le 1er mars 2008, imposeront des formations collégiales de deux juges d'instruction pour l'instruction des crimes et des délits les plus graves ou les plus complexes. Ils concerneront toutes les affaires soumises à l'instruction à partir du 1er janvier 2010, avec des formations collégiales de trois juges d'instruction. La mise en place de ces pôles de l'instruction impose une réorganisation territoriale, 119 tribunaux de grande instance sur 181 ne disposant au maximum que de deux juges d'instruction. De plus, dans les juridictions de petite taille, les magistrats sont appelés à connaître de contentieux très divers (affaires correctionnelles, affaires familiales, affaires de surendettement...). Cette pluralité des fonctions ne permet pas d'acquérir une compétence optimale dans des domaines de plus en plus techniques, avec une procédure de plus en plus exigeante. Ces petites juridictions connaissent également des difficultés d'organisation et de fonctionnement, dès qu'il y a une absence pour congé ou pour formation. Pour répondre à ce constat, la réforme de la carte judiciaire a été engagée au mois de juin 2007 avec l'ouverture d'une phase de concertation avec l'ensemble des élus et des acteurs judiciaires. Les chefs de cour ont procédé à des consultations de terrain, en vue de concilier l'organisation de la justice avec les contraintes locales, dans une logique d'amélioration du fonctionnement de la justice et d'aménagement du territoire. L'ensemble des magistrats, personnels des greffes, avocats, avoués, huissiers de justice ainsi que toutes les personnes qui concourent au fonctionnement de la justice ont pu s'exprimer et ont été entendus. Les préfets ont, en présence des chefs de cour, rencontré les élus afin d'entendre leurs propositions et de mieux appréhender les contraintes territoriales. Les consultations ainsi menées ont permis l'élaboration par les chefs de cour de propositions de réorganisation de la carte judiciaire qui ont été adressées à la Chancellerie fin septembre 2007. L'examen approfondi de ces contributions a permis d'établir le schéma de réorganisation de la carte judiciaire qui a été présenté par la garde des sceaux, sur le terrain, pour être débattu avec l'ensemble des acteurs concernés. À l'issue de cette phase de concertation, les projets de décrets ont été préparés. Ils ont été soumis au Conseil d'État le 29 janvier dernier. La seconde étape de la réforme de la carte judiciaire sera engagée dans les prochains jours, avec comme objectif de poursuivre la modernisation de l'institution judiciaire. En effet, la nature des contentieux et la façon dont le besoin de justice est ressenti ont profondément évolué. La répartition des contentieux entre les juridictions du premier degré et les règles de procédure induites par cette organisation doivent donc être simplifiées. Parallèlement, le traitement de certains contentieux nécessite de plus en plus souvent une haute technicité et une jurisprudence mieux harmonisée sur l'ensemble du territoire national. Dans ces affaires particulièrement complexes, la spécialisation des juges est indispensable pour garantir une justice de meilleure qualité. Ce constat impose que certaines juridictions soient spécialisées dans la connaissance de certains contentieux. Enfin, ainsi que l'a demandé le conseil de modernisation des politiques publiques, le 12 décembre dernier, il importe d'engager une réflexion approfondie sur la déjudiciarisation de certains contentieux comme le divorce par consentement mutuel, les infractions routières ou autres. Il importe en effet de recentrer l'action du juge sur le litige qui doit être réglé par l'application des règles de droit. C'est pourquoi il convient également de réfléchir aux modes de traitement des affaires et aux critères de l'intervention du juge. Pour mener à bien ces réflexions, un groupe de travail composé de magistrats et de fonctionnaires des juridictions et de membres de l'administration centrale, de représentants des professions judiciaires concernées ainsi que d'universitaires, et dont la présidence a été confiée à M. le recteur Serge Guinchard, a été installé le 18 janvier dernier et présentera un rapport pour le 30 juin 2008 faisant état de toute mesure susceptible d'améliorer l'organisation judiciaire actuelle. La réforme de la carte judiciaire procède ainsi d'une recherche de qualité de la justice tant en termes de structures qu'en termes de répartition des contentieux et l'efficacité de cette réforme pourra être mesurée par les indicateurs quantitatifs et qualitatifs déjà en vigueur.

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