Question de M. BADINTER Robert (Hauts-de-Seine - SOC) publiée le 27/03/2008

M. Robert Badinter souhaite attirer l'attention de M. le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique sur la situation des ressortissants européens, anciens élèves de l'ENA, qui se voient refuser leur intégration dans la haute fonction publique française alors qu'ils exercent depuis plusieurs années des fonctions correspondantes dans l'administration de notre pays. À la date de leur entrée à l'ENA, la réglementation interne était contraire au cadre communautaire et les concours d'entrée de droit commun étaient réservés aux Français. Les intéressés ont alors passé un concours spécifique d'entrée à l'ENA, aussi sélectif que celui des candidats français. Ils ont ensuite suivi la même scolarité et ont été soumis aux mêmes épreuves de sélection, en fin de scolarité que leurs camarades français. Ayant manifesté leur intérêt pour l'administration française, ces cadres de haut niveau occupent depuis lors, en tant qu'agents contractuels, des postes de responsabilité dans différents ministères. Ils sont notamment amenés à représenter la France dans des enceintes multilatérales, ils peuvent avoir la qualité de commissaires du gouvernement au Parlement et au Conseil d'État et signer par délégation de leur ministre. Cette situation, annoncée initialement comme transitoire dans l'attente de la modification du droit français, perdure depuis mars 2004 ; elle est inacceptable. Il convient donc de tirer les conséquences au plan statutaire de l'engagement de ces personnes, qui contribue à la nécessaire diversification des profils de l'encadrement supérieur de l'État et favorise la prise en compte par l'administration des enjeux européens. En conséquence, il le remercie de bien vouloir lui faire connaître ses intentions concernant la résolution de cette anomalie. Alors que la France s'apprête à assumer la présidence de l'Union européenne, l'occasion paraît propice d'adapter notamment sur ce point notre législation et nos pratiques à nos engagements européens.

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Réponse du Ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique publiée le 24/07/2008

Le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique a pris connaissance avec intérêt de la question relative à la situation des ressortissants européens, anciens élèves de l'ENA, qui se voient refuser leur intégration dans la haute fonction publique française. La situation des élèves étrangers ayant accompli le cycle international long de l'ENA n'est pas comparable, à plusieurs égards, à celle des élèves recrutés par l'un des trois concours d'accès à cette école. Tout d'abord, ces élèves sont sélectionnés à partir de tests linguistiques et d'entretiens dans leur pays d'origine, tandis que les fonctionnaires stagiaires de l'école sont lauréats d'un concours de recrutement particulièrement sélectif, conformément aux dispositions de l'article 19 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État. Ensuite, la formation qu'ils accomplissent est différente de celle des lauréats de l'un des trois concours d'accès à l'ENA. Cette différence est justifiée, dès lors que les finalités pédagogiques du cycle international long (CIL) sont distinctes de celles de la scolarité sur laquelle débouchent les concours de recrutement de l'ENA. En effet, si les lauréats de l'un des concours de l'ENA sont des fonctionnaires stagiaires ayant vocation à être titularisés dans la fonction publique, le CIL n'a pas vocation, quant à lui, à former de futurs serviteurs de l'État français, mais permet à des ressortissants étrangers, notamment de l'Union européenne, de bénéficier d'un complément de formation en administration publique qu'ils pourront mettre à profit dans leur parcours professionnel, quel que soit leur employeur. Cette distinction, tant dans le mode de recrutement que dans la finalité de la scolarité, se retrouve dans la durée de la formation qu'accomplissent les élèves du CIL et les fonctionnaires stagiaires de l'ENA. Ainsi, les élèves du CIL suivent une scolarité de 18 mois, contre 27 mois pour les fonctionnaires stagiaires. Cette différence de durée ne permet pas d'effectuer une comparaison objective de la formation effectuée par les élèves du CIL et les stagiaires de l'ENA. Enfin, à l'issue de leur scolarité, les élèves étrangers ne sont pas soumis à une procédure de classement, à l'inverse des fonctionnaires stagiaires pour lesquels ce classement détermine en grande partie le choix de leur affectation dans la fonction publique. Compte tenu de ce qui précède, les élèves étrangers du CIL, y compris ceux d'entre eux qui sont ressortissants d'un pays membre de la Communauté européenne, ne peuvent prétendre aux mêmes droits que les fonctionnaires stagiaires de l'ENA, et notamment à la titularisation dans un corps de la fonction publique. Il en est de même pour les anciens élèves du CIL recrutés par voie contractuelle sur le fondement de l'article 4-2 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984. D'un point de vue juridique, la titularisation des contractuels dans un corps de la fonction publique n'est pas prévue par le statut général des fonctionnaires. Seul le concours de droit commun permet d'accéder à un corps ou cadre d'emploi de la fonction publique. Sur le fond, le contrat de droit public est une modalité de recrutement à part entière pour entrer dans la fonction publique. Son régime a fait l'objet d'importantes évolutions ces dernières années. Depuis la loi du 26 juillet 2005, les agents non titulaires employés en contrat à durée déterminée peuvent ainsi bénéficier de la reconduction, dans certaines conditions, de leur contrat en contrat à durée indéterminée. De nouvelles garanties leurs sont par ailleurs offertes par le décret n° 2007-338 du 12 mars 2007 : réexamen régulier de leur niveau de rémunération, nouveaux outils de mobilité, harmonisation des droits sociaux, généralisation des commissions consultatives paritaires pour l'examen des décisions individuelles, etc. Enfin, dans le sillage du Livre blanc sur l'avenir de la fonction publique, de nouvelles évolutions sont à prévoir s'agissant de l'équilibre entre les emplois statutaires et les emplois contractuels dans la fonction publique, et de l'harmonisation, à cet effet, des conditions d'emplois des agents. Ces évolutions permettront aux anciens élèves du CIL recrutés en qualité d'agents non titulaires de construire, plus facilement qu'aujourd'hui, un parcours professionnel durable et diversifié dans l'administration, dans des conditions comparables à celles des fonctionnaires titulaires recrutés par le concours de l'ENA.

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