Question de M. RENAR Ivan (Nord - CRC-SPG) publiée le 15/05/2009

Question posée en séance publique le 14/05/2009

La parole est à M. Ivan Renar. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)

M. Ivan Renar. « Chronique d'une crise annoncée dans les universités » : tel était l'intitulé de la lettre, en date du 5 janvier dernier, que la conférence des présidents d'universités, la CPU, a adressée au Président de la République, avant même que ce dernier ne prononce, le 22 janvier, ses propos méprisants à l'égard de la communauté scientifique nationale.

La CPU faisait alors état de la vive inquiétude régnant sur les campus quant à la faiblesse des financements d'État parvenant réellement aux universités et à la mise en œuvre de la loi relative aux libertés et responsabilités des universités, dans un contexte de suppressions de poste et de remise en cause des statuts des personnels.

Après quatorze semaines d'un conflit inédit par son ampleur, le Gouvernement demeure sourd aux revendications exprimées par les syndicats et par les collectifs représentant les communautés scientifique et estudiantine. Pis encore, la stigmatisation, la dramatisation et les provocations verbales renforcent l'incompréhension et l'exaspération, jettent de l'huile sur le feu et compromettent le dialogue qu'il conviendrait de mettre en place, en urgence, afin de donner un nouveau souffle à l'enseignement supérieur et à la recherche dans notre pays.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Absolument !

M. Ivan Renar. En misant sur le pourrissement du conflit, le Gouvernement prend la responsabilité de fragiliser durablement les universités françaises.

Mme Éliane Assassi. Eh oui !

M. Ivan Renar. Il est pourtant grand temps de créer les conditions permettant à tous les étudiants de valider leur année.

Répétons-le, l'université de demain ne se fera pas contre les étudiants, contre les enseignants-chercheurs, contre les personnels IATOS.

La promotion de l'autonomie, à laquelle s'est encore livré ce matin M. le Président de la République, ne peut s'accompagner d'un manque total de confiance à l'égard des acteurs et des usagers des universités, des étudiants qui seront les cadres de demain.

Une société, un gouvernement qui ne veulent pas dialoguer avec la jeunesse ou qui ne savent plus le faire sont condamnés. Le grand Corneille disait ceci : « Ce que l'on appelle fermeté chez les rois se nomme entêtement chez les ânes ».

Mme Annie David. Très bien !

M. Ivan Renar. Monsieur le Premier ministre, le Gouvernement doit reprendre le chemin du dialogue. Quand allez-vous ouvrir de véritables discussions et concertations pour que les universités françaises puissent retrouver le calme nécessaire à l'accomplissement de leur mission de production et de transmission des connaissances ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste. –M. François Patriat applaudit également.)


Réponse du Premier ministre publiée le 15/05/2009

Réponse apportée en séance publique le 14/05/2009

M. François Fillon, Premier ministre. Monsieur le sénateur, depuis 1984, l'université française souffre d'un mauvais statut qui a mis à mal l'un de ses principes fondateurs : l'autonomie.

Après bien des efforts conduits par des gouvernements de gauche comme de droite et qui n'ont jamais été couronnés de succès, la majorité a soutenu une réforme de l'université, votée par l'Assemblée nationale et par le Sénat, qui offre un cadre nouveau à l'université française – l'autonomie –, que vingt universités ont déjà choisi.

Lors de la mise en œuvre de cette réforme, deux difficultés sont apparues.

La première d'entre elle était relative au statut des personnels. En l'espèce, un décret, dont la rédaction a suscité une forte opposition, a été réécrit, en concertation étroite avec l'ensemble de la communauté universitaire.

La seconde difficulté concernait la réforme de la formation des maîtres, qui fait elle aussi l'objet d'une concertation très étroite dans des délais impartis. L'objectif du Gouvernement est de faire en sorte que, demain, les professeurs des écoles reçoivent une formation de niveau bac+5,…

M. Paul Raoult. C'est déjà le cas !

M. François Fillon, Premier ministre. … ce qui ne paraît pas choquant eu égard au niveau exigé de professions moins stratégiques.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Présentation mensongère !

M. François Fillon, Premier ministre. Monsieur le sénateur, aujourd'hui, dans six universités – sur les quatre-vingts qui existent –, des blocages empêchent la tenue des examens, blocages qui, la plupart du temps, sont le fait d'une minorité qui refuse tout vote au sein des assemblées générales. Cette situation affecte 60 000 étudiants.

Vous êtes un démocrate, monsieur Renar. Vous pouvez comprendre qu'il est hors de question pour le Gouvernement, alors que l'immense majorité des universités françaises et des étudiants sont au travail et souhaitent que les examens soient organisés à la date initialement prévue, d'accéder à la demande, formulée par une petite minorité, de retrait d'une loi votée par le Parlement. (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s'exclame.)

En ce moment, avec la ministre chargée de l'enseignement supérieur, nous veillons à ce que tous les étudiants puissent passer leurs examens et à ce que ceux-ci soient tous de même niveau. En effet, il est hors de question de brader les examens dans notre pays ! Ce serait dramatique pour l'avenir de l'université, pour la réputation de nos établissements et, au fond, pour l'ensemble de notre jeunesse. (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s'exclame.)

Nous sommes donc en train d'examiner la situation des universités où le blocage perdure, pour déterminer s'il y a lieu de repousser les examens au mois de septembre prochain ou de mettre en œuvre les procédures nécessaires pour organiser ces épreuves dans d'autres établissements.

Mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement n'acceptera pas que l'on remette en cause une réforme qui est absolument fondamentale pour l'avenir de l'université…

MM. Alain Gournac et Gérard Dériot. Très bien !

M. François Fillon, Premier ministre. … et qui vise, tout simplement, à offrir à la communauté universitaire son autonomie et le contrôle de ses décisions !

Vingt universités françaises ont choisi, à la majorité absolue des membres de leur conseil d'administration, ce statut d'autonomie.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est un conte de fée pour le Vatican que vous nous racontez, monsieur le Premier ministre ! (Sourires sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

M. Paul Raoult. Et les moyens financiers nécessaires ?

M. François Fillon, Premier ministre. Le Parlement devrait avoir à cœur de défendre ce statut et de faire en sorte que l'université française soit au premier rang mondial des universités ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

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