Question de M. RALITE Jack (Seine-Saint-Denis - CRC-SPG) publiée le 12/11/2009
M. Jack Ralite rappelle à M. le ministre de la culture et de la communication que depuis 2004, Google a commencé un programme international de numérisation de grandes bibliothèques. Il atteint à ce jour des millions de livres. Ce projet arrive en France, via le récent accord au contenu toujours secret de la bibliothèque de Lyon avec le moteur de recherche américain et les discussions non publiques entamées avec lui par les ministères domiciliés à Bercy et la Bibliothèque Nationale de France.
Nous souhaitons bien sûr saisir l'immense et heureuse possibilité, aujourd'hui concrète, de permettre à tous et à chacun le libre accès au « livre de la famille humaine ». Il ne faut pas prendre de « retard d'avenir » mais pas à n'importe quel prix.
Or, si Google, devenu un géant, diversifiant toujours plus ses interventions sur le livre notamment avec Google Édition, annonce offrir gracieusement aux institutions publiques les moyens de numérisation, cette gratuité est illusoire et dangereuse. On a pu parler de « pacte faustien » nous mettant d'abord et avant tout sous tutelle d'un véritable monopole, s'appropriant le patrimoine des bibliothèques publiques à des fins exclusivement commerciales, au mépris du droit d'auteur et du droit moral, au mépris du bien public de ses animateurs et de ses destinataires. Les auteurs américains ont déjà du recourir à la justice.
L'enjeu est fondamental pour le devenir du « grenier à mémoire » de nos sociétés, pour le livre, la lecture, les lecteurs, la librairie, l'édition, les bibliothèques et les initiatives à développer vite et fort que sont Gallica, vivement encouragé par la francophonie, Europeana et la très récente bibliothèque numérique universelle créée par l'UNESCO.
Quelles mesures nationales, quelles propositions au plan européen et international entend prendre le Gouvernement français face à cette grave perspective dominée par l'esprit des affaires contre les affaires de l'esprit ?
Il lui demande quel est le plan de numérisation du livre dans notre pays, ses priorités et son coût ? Quels sont les possibilités industrielles existantes ou à créer en France ou en Europe pour la numérisation ? Quel est son avis sur la nécessité d'avoir un ou plusieurs « pôles de compétitivité » sur la numérisation, comprenant la recherche publique, la recherche privée et l'industrie ? Est-il admissible que l'entreprise Google exige le secret sur les accords qu'elle passe avec des services publics et sur la propriété des œuvres numériques qu'elle revendique pour un grand nombre d'années. Que lui inspire l'incertitude sur la pérennité de la conservation numérique ? Quel montant du grand emprunt envisage-t-il de consacrer à la numérisation ?
La magnifique bibliothèque du Sénat mène actuellement une numérisation de son fond concernant d'abord les débats sous la Vème République dans le cadre d'un partenariat public-privé en France qui n'entache pas la responsabilité publique. Tout cela « bourdonne d'essentiel » dirait René Char.
Beaucoup de grandes bibliothèques dans le monde s'étaient félicitées de la réaction française face à Google en 2004. Elles ne comprendraient pas que la France renonce à cette attitude en adoptant une politique d'impuissance démissionnaire.
Comment dire non aux règles autoritaires du chiffre, de l'argent et oui, à la liberté humaine de déchiffrer le monde. « L'Histoire n'est pas ce qu'on subit mais ce qu'on agit » dirait Boulez.
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Réponse du Ministère de la culture et de la communication publiée le 17/11/2009
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