Question de M. MAHÉAS Jacques (Seine-Saint-Denis - SOC) publiée le 08/04/2010

M. Jacques Mahéas attire l'attention de Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi sur les 180 milliards d'euros d'encours du fonds d'épargne qui sont de plus en plus sollicités. La Cour des comptes et les acteurs du logement social craignent que la première source de financement des HLM ne pâtisse de la crise et de l'ouverture à la concurrence du livret A.
Grâce à cet encours, la Caisse des dépôts (CDC) finance la construction et la rénovation des HLM. Les prêts de la Caisse aux organismes HLM couvrent 65 % à 75 % du coût des chantiers.
Or, le double effet de la crise financière et de l'ouverture à la concurrence du livret A pourrait mettre en péril l'équilibre financier du fonds d'épargne. Un équilibre qui permet à la CDC de prêter la moitié de l'encours à très long terme (32 ans en moyenne et jusqu'à 60 ans).
En effet, avec l'ouverture du fonds d'épargne à la concurrence depuis 2008, deux risques de fuites existent. En premier lieu, les nouvelles banques ayant le droit de le commercialiser peuvent être tentées de proposer d'autres placements; en second lieu, il est constaté un lobbying des banques pour diminuer peu à peu la part de l'encours total du livret centralisé à la Caisse des dépôts.
Surtout, à la faveur de la crise, le fonds d'épargne a été largement sollicité. Ainsi, le Gouvernement a décidé de réduire le taux de centralisation du livret d'épargne pour procurer 16,5 milliards d'euros de liquidités supplémentaires aux banques. Il a augmenté le nombre de projets hors logement social financés : transports, hôpitaux, universités, etc... pour 11 milliards d'euros de prêts. Une nouvelle enveloppe de 8 milliards d'euros, destinée à des infrastructures de transports, est programmée. Sans compter les 2 milliards prêtés à Oseo et les 5 milliards destinés aux collectivités locales dans le cadre du plan de relance.
C'est pourquoi un nouvel équilibre doit être défini rapidement pour ne pas obérer la capacité de prêt au logement social en 2012/2013.
Aussi, il lui demande de lui préciser les mesures qu'elle entend prendre pour assurer, dans les années à venir, l'octroi des prêts aux organismes du logement social nécessaires pour accomplir leur mission.

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Réponse du Ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi publiée le 29/07/2010

Concernant l'évolution des encours sur livret A, il convient de rappeler que, dans la continuité d'une année 2008 déjà exceptionnelle en termes de collecte (collecte nette de plus de 20 Md€ sur l'année, hors intérêts capitalisés), l'année 2009 a été marquée par deux mouvements contraires, mais d'ampleur inégale : une forte collecte sur les quatre premiers mois de l'année liée à la généralisation de la distribution du livret A (+ 23,6 Md€), suivie d'une lente décollecte plus limitée sur le reste de l'année (- 7,2 Md€). Au final, la collecte sur l'année 2009 a été de + 16,4 Md€ (deuxième année record après 2008) et, après prise en compte de la capitalisation des intérêts, l'encours sur livret A s'établit à fin 2009 à 184,9 Md€, soit une augmentation de 31 % par rapport à fin 2007. Les premiers mois de l'année 2010 montrent que la tendance à la hausse des encours se poursuit, avec plus de 2,8 Md€ de collecte supplémentaire pour le livret A à fin avril 2010. L'engouement des Français pour le livret A reste donc extrêmement marqué, notamment en raison de la simplicité d'utilisation et de fonctionnement de ce produit d'épargne, son caractère parfaitement sécurisé et son taux de rendement garanti à l'épargnant. Il n'y a donc pas, à ce stade, d'éléments de nature à craindre une désaffection des épargnants vis-à-vis du livret A. En ce qui concerne les besoins de financement du logement social, l'activité de prêts du fonds d'épargne a été marquée ces dernières années par une forte hausse des volumes de prêts nouveaux à destination du logement social (avec un encours de prêts au logement social et à la politique de la ville d'environ 99 Md€ à fin 2009) et les évolutions prévisionnelles effectuées par la Caisse des dépôts et consignations plaident en faveur d'une confirmation du dynamisme actuel. Le plafonnement à 160 Md€ (montant indexé en 2010 et 2011 en application du décret n° 2008-164) du montant centralisé au fonds d'épargne résulte d'un arbitrage macroéconomique entre les besoins du fonds d'épargne et du secteur bancaire au service du financement des PME. Les sommes sur livrets A et livrets de développement durable non centralisées doivent, en effet, être utilisées par les banques pour le financement des petites et moyennes entreprises et pour le financement de travaux d'économie d'énergie dans les bâtiments anciens. Il faut en conséquence veiller à ne pas centraliser au fonds d'épargne davantage de ressources que strictement nécessaire, dans la mesure où tout excès de centralisation réduirait la capacité des banques à financer l'économie, notamment via des crédits aux PME. La quote-part centralisée au fonds d'épargne a été plafonnée, uniquement sur les années 2009-2011, à un montant fixé en niveau absolu en raison notamment de la généralisation de la distribution du livret A et de la forte volatilité anticipée sur les encours. Par ailleurs, aucune décision n'a pour l'heure été prise sur le niveau de centralisation qui sera applicable à compter de 2012. La loi prévoit la fixation d'une règle pérenne de centralisation une fois passée la phase de transition et l'article 6 du décret n° 2008-1264 indique que les modalités de centralisation valables, à compter du 1er janvier 2012, devront être définies au plus tard par décret avant le 30 septembre 2011. Les débats à venir concernant le niveau adéquat de ressources centralisées au fonds d'épargne devront prendre en compte tant les besoins du fonds d'épargne pour les missions qui lui sont confiées (à titre prioritaire, le financement du logement social) que ceux du secteur bancaire pour le financement des PME (à partir des ressources non centralisées). L'Observatoire de l'épargne réglementée, institué par la loi de modernisation de l'économie, va notamment réfléchir au niveau adéquat de centralisation au fonds d'épargne, avec les différents acteurs prenant part à l'ensemble du dispositif et à la lumière, notamment, des dernières évolutions des encours de prêts au logement social et des besoins de financement des PME. La détermination du niveau adéquat de centralisation, à compter de 2012, devra prendre en compte l'ensemble des paramètres mentionnés précédemment pour identifier le juste équilibre afin de concilier les différents objectifs poursuivis. Il semble en tout état de cause nécessaire, ainsi que le préconisait le rapport Camdessus, de continuer d'associer les banques à la collecte, en envisageant un partage raisonnable des encours de livrets A et de livrets de développement durable entre les banques et le fonds d'épargne. Au-delà de la fixation du niveau de centralisation à compter de 2012, il convient de souligner que la loi de modernisation de l'économie a introduit un élément de nature à rassurer les acteurs du logement social, puisque l'article L. 221-5 du code monétaire et financier dispose désormais que « les ressources centralisées dans le fonds [d'épargne] sont au moins égales au montant des prêts consentis au bénéfice du logement social et de la politique de la ville par la Caisse des dépôts et consignations au titre de ce même fonds affecté d'un coefficient multiplicateur égal à 1,25 », ce qui signifie que les organismes de logement social disposeront, en toutes circonstances, de ressources suffisantes auprès du fonds d'épargne pour construire et acquérir des logements sociaux.

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