Question de Mme DEMESSINE Michelle (Nord - CRC-SPG) publiée le 04/03/2011
Question posée en séance publique le 03/03/2011
Concerne le thème : Situation en Afghanistan
Mme Michelle Demessine. Monsieur le ministre, le 24 février, un soldat français a encore été tué en Afghanistan ; c'est le cinquante-quatrième.
Bien sûr, il faut rendre un hommage appuyé à nos militaires pour leur mission difficile sur le terrain. Il n'empêche que la douleur des familles est immense, car aucune réponse convaincante n'est apportée à la question cruelle qu'elles se posent : pourquoi sont-ils morts ?
Monsieur le ministre, sondage après sondage, une majorité de plus en plus écrasante de Français affirment leur opposition croissante à la présence de nos troupes en Afghanistan.
Le dernier en date, celui de l'IFOP pour l'Humanité, le 23 février, indique que 72 % d'entre eux n'approuvent pas l'intervention militaire, soit 2 % de plus qu'en juillet, mais 8 % de plus qu'en août 2009.
Même les sympathisants de votre majorité, l'UMP, affichent désormais à 55 % leur hostilité à cette guerre. La majorité des sondés ne voient dans cette aventure militaire ni perspective de rétablissement de la paix ni soutien réel à la population afghane, laquelle paie le prix fort, prise en otage entre les insurgés talibans et les forces occidentales.
Ils sont 88 % à considérer que la situation sur place est très difficile, que nos militaires y sont exposés et que le risque d'enlisement est réel. Le conflit est plus meurtrier que jamais : 10 000 morts sur la seule année dernière, dont 711 soldats de l'OTAN, 1 200 policiers et au moins 2 500 civils et 30 000 blessés dont on ne parle jamais.
C'est la guerre la plus longue de notre histoire ! Elle a, du reste, maintenant largement dépassé celle des Soviétiques. Aligné sur la position américaine, le Président de la République, drapé dans ses certitudes de pseudo-amélioration de la situation toujours démentie par les faits, n'a rien d'autre à nous offrir que le leitmotiv « on y restera le temps qu'il faudra ».
M. le président. Votre question !
Mme Michelle Demessine. S'agissant de la stratégie des Américains, sur le plan politique, le moins que l'on puisse dire, c'est qu'elle est fluctuante et peu claire. Robert Gates n'a-t-il pas déclaré
M. Alain Gournac. La question !
Mme Michelle Demessine.
que son ambition, aujourd'hui, se limiterait à laisser l'Afghanistan au moins dans l'état où les Soviétiques l'avaient laissé ?
M. le président. Posez votre question !
Mme Michelle Demessine. Rien ne pourra se construire durablement dans ce pays où le peuple rejette l'occupation des troupes étrangères. La France, qui a un autre rôle à jouer, devrait commencer à retirer progressivement son contingent
M. Alain Gournac. La question !
Mme Michelle Demessine.
et augmenter son aide civile au développement.
Monsieur le ministre, les Français ne vous suivent plus ! On n'a pas le droit de conduire une guerre en silence ! C'est à la nation de confirmer ou d'infirmer la mise en jeu de la vie de nos soldats dans ce pays. Quand allez-vous enfin permettre aux Français de se prononcer, à commencer par la représentation nationale, en organisant un débat public au Parlement, sanctionné par un vote ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG. Mme Virginie Klès, MM. Jean-Louis Carrère et Daniel Reiner applaudissent également.)
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Réponse du Ministère de la défense et des anciens combattants publiée le 04/03/2011
Réponse apportée en séance publique le 03/03/2011
M. Gérard Longuet, ministre. Madame Demessine, je vous remercie pour l'hommage que vous avez rendu à l'armée française et à son action.
Justement, parlons-en, des résultats globaux de l'Alliance ! Sans revenir sur les élections, je citerai la reconstruction d'un État dans lequel la liberté d'expression est désormais garantie par près de 700 journaux, 110 radios et 30 chaînes de télévision.
Je me tourne vers votre collègue Jean-Louis Carrère : cet État se reconstruit avec une prise en considération de la femme qui n'existait plus, nous le savons. En Afghanistan, près de 28 % des parlementaires sont des femmes et les jeunes filles, pour 35 % d'entre elles, sont désormais scolarisées.
Sur le plan de la santé, qui est un indicateur de paix sociale et de sérénité de vie, la mortalité infantile chute de façon particulièrement spectaculaire. Quant aux soins de première nécessité, 85 % de la population y ont maintenant accès, contre 8 % seulement en 2001 (M. Jean-Louis Carrère fait un signe de dénégation.). Il y a bien les éléments de la reconstruction d'une société.
Je vous épargne l'accès à l'éducation, les infrastructures réhabilitées, le triplement de la production de l'électricité et la diffusion des communications, qui est sûrement un bien. Quoi qu'il en soit, 30 % de la population sont couverts par le téléphone. Auparavant, cela n'existait en rien. La France prend naturellement une part toute particulière dans cette reconstruction.
Au sujet des cinquante-quatre morts que vous avez évoqués, madame le sénateur, leurs familles peuvent avoir la fierté de considérer qu'ils ont participé à une uvre de paix, à la reconstruction d'un État. Il s'agit de permettre à près de 20 millions d'habitants d'espérer accéder, à un moment ou à un autre, au minimum de sérénité. Nous devons notamment faire en sorte que les droits de l'homme qui sont inscrits dans la Constitution afghane soient une réalité, déclinée sur le terrain.
Nous passons du Moyen Age au siècle actuel, en épousant progressivement des valeurs qui sont des valeurs de démocratie et de République. C'est une uvre de longue haleine, à laquelle nous sommes associés, prenant notre part de responsabilité. Les résultats en termes de société sont suffisamment significatifs pour que chacun mesure que cet effort porte des fruits, même s'il ne porte pas tous les fruits. (Applaudissements sur les travées de l'UMP. M. Yves Pozzo di Borgo applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Michelle Demessine, pour la réplique. Vous disposez de quelques secondes seulement. Je demande à chacun, y compris au Gouvernement, de respecter son temps de parole.
Mme Michelle Demessine. Monsieur le ministre, cela fait des années que l'on nous parle d'amélioration, chiffres à l'appui. Mais nous le savons aussi, derrière ces chiffres, il y a très peu de réalité, très peu de contenu !
S'agissant de la scolarisation des filles, nous avons lu, dans un récent rapport, que si elles sont bien présentes dans les écoles, aucun service éducatif ne leur est délivré, faute de moyens pour ces écoles !
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