Question de M. BOUTANT Michel (Charente - SOC) publiée le 17/03/2011
M. Michel Boutant attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire sur les inquiétudes des producteurs de lait, à quelques semaines de la mise en place de la contractualisation issue de la loi n° 2010-874 du 27 juillet 2010 de modernisation de l'agriculture et de la pêche.
Les mois puis les années s'écoulent, et les producteurs, notamment les indépendants, sont de plus en plus inquiets pour leur avenir. On ne compte plus les cessations d'activité. La situation est véritablement dramatique pour bon nombre d'éleveurs.
Il lui rappelle qu'il avait déjà adressé une question écrite (14974) concernant le prix du lait à l'été 2010. Il avait bien pris note de sa réponse, mais constate, malgré tout, que les motifs d'inquiétudes demeurent. Les agriculteurs craignent ainsi tout particulièrement la mise en place, au 1er avril 2011, de la contractualisation telle que définie par la loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche. Il semble ainsi bien difficile de garantir que les petits producteurs pourront se défendre dans la négociation avec les coopératives.
C'est au quotidien que les éleveurs se sentent pris au piège face aux coopératives ; ils ont le sentiment de ne disposer d'aucune marge de manœuvre face à des structures qui leur laissent peu de pouvoir.
Aussi, soucieux de répondre aux craintes légitimes des producteurs de lait, il lui demande de bien vouloir lui indiquer si la voix des éleveurs sera bien respectée dans le cadre de la contractualisation.
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Réponse du Ministère de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire publiée le 28/04/2011
La loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche (LMAP) du 27 juillet 2010 a notamment pour objectif de renforcer le pouvoir de négociation des producteurs et d'améliorer la transparence du fonctionnement des marchés. L'article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime et le décret n° 2010-1753 qui en sont issus prévoient que, à partir du 1er avril 2011, tout acheteur de lait cru devra proposer aux producteurs de lait qui le fournissent un contrat écrit conforme aux dispositions définies par la loi et le décret. Pour les coopératives, des dispositions spécifiques s'appliquent puisqu'elles doivent proposer à leurs adhérents un exemplaire des statuts ou du règlement intérieur intégrant les obligations définies par décret. C'est donc sur l'acheteur que repose l'obligation de proposer un contrat, sous peine d'une amende administrative. Les producteurs de lait ne seront pas obligés de signer les contrats qui leur seront proposés par les industriels s'ils les jugent déséquilibrés. La négociation des clauses du contrat pourra alors se dérouler ou être prolongée et la relation commerciale poursuivie dans les conditions antérieures. En cas de difficultés liées à la mise en place ou à l'exécution de ces contrats, et notamment de clauses qu'ils jugent abusives, les producteurs de lait pourront faire appel au médiateur prévu par la loi. Le renforcement du pouvoir de négociation des producteurs face à leurs acheteurs est essentiel. Aujourd'hui, le regroupement des producteurs de lait en organisations avec mandat de négociation est déjà permis par le droit. Aller plus loin nécessite une modification des règles de la concurrence au niveau communautaire. La proposition de règlement dit « paquet lait » que la Commission a présenté en conseil des ministres de l'agriculture le 13 décembre 2010 va dans ce sens. Il s'agit d'une avancée considérable avec l'introduction d'une dérogation au droit des ententes portée par le ministre chargé de l'agriculture dès l'automne 2009 en pleine crise laitière. Dans ce cadre, des organisations de producteurs, propriétaires ou non du lait, regroupant jusqu'à 3,5 % de la production laitière européenne, soit environ 5 millions de tonnes de lait, auront la capacité de négocier collectivement les prix pour leurs producteurs. Pour bénéficier de cette dérogation, les organisations de producteurs devront avoir été reconnues par l'État membre. Un décret sur les organisations de producteurs sera publié dès l'adoption de ce règlement qui devrait intervenir courant 2011. La contractualisation est un dispositif qui est discuté avec l'ensemble des professionnels de la filière laitière depuis plus de deux ans et qui a été votée dans la LMAP après un très riche et très complet débat. Elle a également fait l'objet d'expérimentations concrètes sur le terrain en 2010. Sa mise en place au 1er avril 2011 ne se fait donc ni dans l'urgence ni dans la précipitation.
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