Question de M. REICHARDT André (Bas-Rhin - UMP) publiée le 14/04/2011
M. André Reichardt attire l'attention de M. le secrétaire d'État chargé du logement sur les réelles difficultés posées par l'application des dispositions de l'article 55 de loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite loi SRU qui, afin de permettre la mise en place d'une mixité sociale, impose à certaines communes de plus de 3 500 habitants la réalisation de 20 % de logements sociaux d'ici 2020.
De nombreux obstacles à l'application de cette loi ont déjà été mis en avant : le prix du foncier, la nécessité de préserver le foncier agricole et la crise économique que connait notre pays depuis bientôt deux ans. Par ailleurs, de nombreuses communes se voient aujourd'hui pénalisées par le prélèvement proportionnel prévu par la procédure du constat de carence, parce qu'elles ne parviennent pas à atteindre l'objectif fixé par la loi. Elles font pourtant beaucoup d'efforts en ce sens afin d'y parvenir et les maires ressentent cela comme une réelle injustice. En 2008, par exemple, sur les 730 communes qui comptaient moins de 20 % de logements sociaux, 330 n'ont pu réaliser leurs objectifs de construction.
Sans vouloir remettre en cause ou contester l'obligation qui s'impose aux communes de disposer de logements locatifs sociaux, il aimerait souligner la difficulté de la mise en œuvre de cette loi. Ainsi, pour de nombreuses communes, il ne sera jamais possible de rattraper le retard accumulé, à moins de ne créer que des logements sociaux, ce qui va à l'encontre de la lettre de la loi qui a pour objectif de favoriser la mixité sociale. La commune de Souffelweyersheim, par exemple, dont il a été maire pendant quinze ans, a réalisé 238 logements sociaux dans les dix dernières années. En 2001, il lui manquait 467 logements sociaux au titre de la loi SRU. Or, en 2009, malgré tous les efforts faits par la commune, ce nombre s'élevait encore à 476. En effet, il est clair qu'à chaque nouveau logement construit correspond une nouvelle obligation à hauteur de 20 % de ce même logement. Ce qui fait que, à terme, sauf à ne créer que des logements sociaux, l'objectif prévu par la loi est totalement irréaliste. La logique serait de déclarer que le quota s'applique aux nouvelles constructions, mais n'est pas être rétroactif, ou du moins pas dans les mêmes proportions.
En conclusion, les communes peuvent et souhaitent appliquer le quota pour les nouveaux logements, et vont même souvent au-delà de cette exigence. Mais elles ne pourront jamais rattraper le retard accumulé avant la promulgation de cette loi. Cette obligation grève donc injustement les budgets des communes sans pour autant leur permettre d'être en conformité avec la loi.
Il tenait à lui faire part de ces remarques et le remercie de bien vouloir lui faire savoir si, au regard de ces éléments, le Gouvernement est disposé à faire évoluer l'article 55 de la loi du 13 décembre 2000.
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Réponse du Secrétariat d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation publiée le 22/06/2011
Réponse apportée en séance publique le 21/06/2011
M. André Reichardt. J'ai souhaité attirer l'attention de M. le secrétaire d'État chargé du logement sur les difficultés posées par l'application des dispositions de l'article 55 de la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite loi SRU. Ce texte, afin de permettre la mise en place d'une mixité sociale, impose à certaines communes de plus de 3 500 habitants la réalisation de 20 % de logements sociaux d'ici à 2020. Parmi les communes de plus de 3 500 habitants, seules sont concernées celles qui sont situées dans une agglomération d'au moins 50 000 habitants, ce qui constitue une première anomalie et une injustice par rapport aux autres collectivités de même taille.
Par ailleurs, de nombreuses communes se voient pénalisées par le prélèvement proportionnel prévu par la procédure du constat de carence, car elles ne parviennent pas à atteindre l'objectif fixé par la loi. Elles font pourtant beaucoup d'efforts afin d'y parvenir. Les maires ressentent cela et je partage leur sentiment comme une deuxième injustice. En 2008, par exemple, sur les 730 communes qui comptaient moins de 20 % de logements sociaux, 330 communes n'ont pu réaliser leurs objectifs de construction.
Sans vouloir remettre en cause ou contester l'obligation qui s'impose aux communes de disposer de logements locatifs sociaux, j'aimerais souligner la difficulté de la mise en uvre de cette loi.
Ainsi, pour de nombreuses communes, il ne sera jamais possible de rattraper le retard accumulé à moins de ne créer que des logements sociaux, ce qui n'est pas conforme à l'esprit de la loi qui a pour objet de favoriser la mixité sociale. Par exemple, la commune dont j'ai été le maire pendant seize ans a réalisé 238 logements sociaux au cours des dix dernières années, dont 209 logements depuis la promulgation de la loi SRU. Or, en 2001, soit juste après l'adoption du texte, il lui manquait 467 logements sociaux au titre de la loi SRU. Et, en 2009, malgré tous les efforts faits par la commune, le déficit s'élevait encore à 476 logements sociaux, soit neuf logements manquants de plus par rapport à 2001 alors que 238 logements ont pourtant été construits depuis !
Il est clair qu'à chaque nouveau logement construit correspond une nouvelle obligation à hauteur de 20 % de ce même logement. C'est donc la course à l'échalote ! À terme, sauf à ne créer que des logements sociaux, l'objectif prévu par la loi est totalement irréaliste. La logique serait de déclarer que le quota s'applique aux nouvelles constructions mais qu'il n'est pas rétroactif, du moins pas dans les mêmes proportions.
En conclusion, les communes peuvent et souhaitent appliquer le quota pour les nouveaux logements, et vont même souvent au-delà de cette exigence. Mais elles ne pourront jamais rattraper le retard accumulé avant la promulgation de la loi SRU. Cette obligation grève donc injustement les budgets des communes sans pour autant leur permettre d'être en conformité avec la loi.
Je souhaitais, monsieur le secrétaire d'État, vous faire part de ces remarques. Je vous remercie de bien vouloir me faire savoir si, au regard de ces éléments, le Gouvernement est disposé à faire évoluer l'article 55 de la loi du 13 décembre 2000.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation. Monsieur André Reichardt, vous avez interrogé Benoist Apparu sur les difficultés d'application des dispositions prévues par l'article 55 de la loi SRU.
Dès 2002, les communes n'atteignant pas le seuil de 20 % de logements sociaux se sont engagées dans un plan de rattrapage par période de trois ans. Vous soulignez que, lors de la période triennale 2005-2007, 325 communes n'avaient pas atteint leurs objectifs de production de logements locatifs sociaux. Il convient cependant de noter que, sur cette même période, 405 communes avaient atteint leurs objectifs, contre 356 communes sur la période 2002-2004. Cela signifie qu'un certain nombre de communes parviennent à réaliser les efforts nécessaires.
Au vu des premiers éléments du bilan triennal de la période 2008-2010, je peux vous affirmer que cette tendance se confirme puisque plus de 570 communes auraient atteint leurs objectifs triennaux. Cette évolution positive traduit la volonté croissante des communes de rattraper leur déficit en logements sociaux et prouve qu'elles ont la capacité de le faire. C'est notamment le cas de la commune de Souffelweyersheim, dont vous avez été maire, qui a réalisé près de 240 % de son objectif de rattrapage pour la période 2005-2007 et a atteint ses objectifs pour la période 2008-2010, ce qui reflète une nette amélioration par rapport à la première période triennale.
En parallèle des efforts de rattrapage accomplis par cette commune, le parc de résidences principales de celle-ci s'est considérablement développé au cours des dernières années. Ainsi, le renforcement des objectifs au titre de la loi SRU dans cette commune vient mécaniquement d'une production de logements locatifs sociaux inférieure à 20 % des nouvelles résidences principales construites, visée qui participe pourtant bien à la mixité sociale dans les nouveaux quartiers urbanisés.
S'agissant du rattrapage, tout comme vous, Benoist Apparu ne souhaite pas que le développement de l'offre en logements, tous types confondus, nuise à la préservation du foncier agricole. C'est la raison pour laquelle mon collègue encourage l'équipe municipale de Souffelweyersheim à s'engager dans un urbanisme plus respectueux de son environnement par le biais, notamment, du renouvellement urbain et de la densification plutôt que par l'urbanisation nouvelle sur des terrains non bâtis.
Par ailleurs, s'agissant du budget des communes, Benoist Apparu tient à vous rassurer. En effet, les dispositions législatives plafonnent les prélèvements à 5 % des dépenses réelles de fonctionnement des communes. En outre, afin d'accompagner et de valoriser les efforts des communes, les dépenses engagées par ces dernières en vue de soutenir le développement de l'offre locative sociale peuvent être déduites des montants de prélèvement calculés. Ainsi, concrètement, dans ces communes volontaires, les prélèvements sont minorés afin d'encourager la poursuite des efforts de production.
Compte tenu de la capacité de rattrapage des communes dans le respect de leurs finances publiques, il ne paraît pas opportun au Gouvernement de revenir sur l'objectif de 20 % de logements sociaux, notamment dans le contexte de sortie de crise économique que vous avez-vous-même évoqué, monsieur le sénateur, car il importe de faciliter l'accès de tous les ménages au logement, et particulièrement je sais combien ce point est important pour vous des plus modestes d'entre eux.
M. le président. La parole est à M. André Reichardt.
M. André Reichardt. Monsieur le secrétaire d'État, naturellement, cette réponse ne me satisfait pas.
Mon intention, ce matin, n'était pas spécialement de défendre les intérêts de ma commune. Pour être équitable avec les communes de plus de 3 500 habitants situées dans une agglomération de plus de 50 000 habitants, il faudrait faire un état des lieux global tenant compte de la situation en 2001, soit au moment de la promulgation de la loi SRU, par rapport au seuil de 20 % du parc de logements sociaux.
Il est clair que si la commune était proche à cette époque du seuil des 20 % de logements sociaux, l'engagement aura été facile à tenir pour elle. Mais dans les communes comme la mienne, périurbaines et essentiellement rurales, où, par le fait du hasard, le taux de logements sociaux était de 0 % en 2001, le delta est énorme. Dans ma commune, il est franchement impossible, à terme, d'atteindre la réalisation de 500 logements sociaux alors que nous en avons pourtant construit 238.
Enfin, monsieur le secrétaire d'État, la mesure, même si elle est plafonnée à 5 % des dépenses réelles du budget de chaque commune, est considérée comme une véritable sanction a priori. Il serait largement préférable que l'État et les communes s'engagent par contrat pluriannuel de telle sorte que la sanction tombe a posteriori si l'objectif n'est pas atteint.
Je vous remercie par avance, monsieur le secrétaire d'État, de bien vouloir relayer ces remarques auprès de M. Apparu. La situation, de mon point de vue, est frappée du sceau de l'injustice, ce qui n'est pas acceptable.
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