Question de Mme TASCA Catherine (Yvelines - SOC) publiée le 07/07/2011
Mme Catherine Tasca attire l'attention de M. le ministre chargé des affaires européennes sur l'application du règlement (CE) n° 1236/2005 du Conseil du 27 juin 2005 concernant le commerce de certains biens susceptibles d'être utilisés en vue d'infliger la peine capitale, la torture ou d'autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.
Ce règlement, adopté par le Conseil de l'Union européenne le 27 juin 2005, consiste à soumettre à un contrôle l'autorisation d'exporter ces produits. Il est entré en vigueur en juillet 2006. Malheureusement, son application est manifestement imparfaite. Des substances chimiques fabriquées au sein de l'Union européenne, comme le thiopenthal sodique, sont exportées dans d'autres pays afin d'y faire appliquer des peines capitales. Ainsi, le Royaume-Uni a-t-il exporté cet anesthésiant vers les États-Unis qui l'ont ensuite utilisé pour l'exécution d'un condamné à mort, le 26 octobre 2010.
La Commission européenne prend prétexte d'un classement dans l'annexe II du règlement, c'est-à-dire celle des biens qui ne sont pas sujet à contrôle avant exportation, pour justifier l'exportation de ces produits chimiques. Mais, comme ces produits peuvent aussi être utilisés à des fins louables en médecine traditionnelle, il ne s'agit pas de demander leur bannissement total des échanges. Leur inscription dans l'annexe III, qui conditionnerait leur exportation à un contrôle de la fin visée, permettrait d'exclure tout usage proscrit par les objectifs du règlement.
La Commission doit être dotée des moyens humains et techniques nécessaires au contrôle des produits, leur classement doit être revu, l'ensemble des pays membres doit s'unir pour appliquer efficacement le règlement adopté. Il est inconcevable d'interdire chez nous une pratique que nous alimentons ailleurs.
Elle lui demande de lui indiquer la position du Gouvernement sur cette question et les mesures qu'il entend porter pour réconcilier ce règlement et son application.
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Réponse du Ministère chargé des affaires européennes publiée le 25/08/2011
La France est fortement engagée en faveur de l'abolition universelle de la peine de mort, qui constitue une priorité de notre politique en matière de droits de l'Homme. Conformément à cet engagement et en dépit des faibles probabilités d'exportation du thiopenthal sodique à partir du territoire français où il ne serait plus disponible actuellement, la France s'est mobilisée dans le cadre européen et dans le cadre national afin d'empêcher l'exportation de ce produit vers tout pays susceptible de l'utiliser pour des exécutions capitales. Le ministre chargé des affaires européennes a signé, avec treize autres ministres européens, une lettre adressée au commissaire européen au commerce, en date du 8 avril 2011, demandant à ce que le thiopental sodique soit inscrit dans l'annexe III du règlement n° 1236/2005 du 27 juin 2005 qui liste les produits dont les exportations sont soumises à autorisation préalable au regard de leur utilisation possible dans le cadre de traitements cruels, inhumains ou dégradants. L'ouverture d'une discussion concernant l'ajout d'autres produits à cette liste a également été demandée à cette occasion et l'ajout d'une « clause balai » dans le règlement, permettant d'interdire le commerce des éléments ne figurant pas dans les annexes mais dont il y aurait des raisons sérieuses de penser qu'ils peuvent être utilisés pour infliger la peine de mort ou tout traitement inhumain ou dégradant, pourrait être évoqué à cette occasion. Enfin, la France souhaite prendre des mesures, au niveau national, pour interdire l'exportation éventuelle du thiopental sodique vers les États-Unis sur la base de l'article 10 du règlement (CE) n° 1061/2009, qui permet des restrictions quantitatives à l'exportation si elles sont justifiées par des raisons de moralité publique, d'ordre public, de sécurité publique, de protection de la santé et de la vie des personnes.
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