Question de Mme SCHILLINGER Patricia (Haut-Rhin - SOC) publiée le 15/09/2011

Mme Patricia Schillinger souhaite rappeler l'attention de M. le ministre chargé des affaires européennes sur la situation des travailleurs frontaliers exerçant en Suisse, et plus particulièrement sur les différences de traitement pratiquées entre salariés, selon qu'ils sont de nationalité suisse ou française. En effet, il y a un an, elle avait évoqué la situation des salariés français de l'entreprise Stöklin, discriminés en raison de la santé du franc suisse par rapport à l'euro.

Alors que dans sa réponse le secrétaire d'État s'était voulu rassurant en voyant dans ces pratiques un acte isolé, les associations de travailleurs frontaliers dénoncent, elles, le nombre croissant d'entreprises ayant recours à ce genre de méthodes (Angestein; Rondo; Hakama).

Ces dernières ont pour objet de faire supporter aux seuls travailleurs frontaliers l'effort lié à la crise et sont toutes fondées sur la santé du franc suisse par rapport à l'euro.

En conséquence, elle lui demande si le Gouvernement, dans le cadre de la collaboration franco-suisse, compte une nouvelle fois rappeler à celle-ci, ses obligations issues des accords bilatéraux qu'elle a ratifiés avec l'Union européenne et l'encourager vivement à combattre ces comportements qui sont contraires au principe de libre circulation voulu par ces accords.

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Réponse du Ministère chargé des affaires européennes publiée le 12/01/2012

D'une manière générale, la coopération et les questions frontalières constituent une dimension fondamentale de la relation bilatérale entre la France et la Suisse. Celles-ci font l'objet, depuis 2005, d'un dialogue politique annuel au niveau des hauts fonctionnaires, conduit par les ministères français et suisse des affaires étrangères, auquel sont associés, côté français, des représentants d'autres administrations et services de l'État dans les régions concernées ainsi que les conseils régionaux directement intéressés. La 7e session de ce dialogue s'est tenue à Berne le 15 novembre 2011. Le ministère des affaires étrangères et européennes est tout particulièrement attentif à la situation de nos compatriotes qui, tout en ayant leur résidence en France, exercent leur activité professionnelle en Suisse et dont le nombre n'a cessé d'augmenter depuis ces dernières années pour dépasser à ce jour les 120 000. À l'occasion de la dernière session du dialogue politique sur les relations transfrontalières, la délégation française a veillé à ce que soit traitée la situation des travailleurs frontaliers français qui se sont vu imposer par leurs employeurs suisses le versement de leur salaire en euros. Elle a rappelé avec force notre position : la pratique de plusieurs entreprises suisses consistant à verser aux seuls travailleurs frontaliers des salaires en euros plutôt qu'en francs est constitutive d'une discrimination « à raison de la nationalité contraire à l'article 2 de l'accord UE-Suisse sur la libre circulation des personnes » (ALCP). En effet, bien que la détermination du salaire relève principalement de la relation contractuelle entre l'employeur et le salarié, cette dernière ne saurait avoir pour effet d'établir une discrimination entre différentes catégories de salariés (une pratique dérogatoire aux termes de la législation du travail ou de la convention n'est acceptable que si elle implique un traitement plus favorable). Si les autorités fédérales suisses n'encouragent pas cette pratique à laquelle le Conseil de surveillance du marché de l'emploi (CSME) du canton de Genève a d'ailleurs marqué son opposition, elles se refusent à condamner les entreprises concernées et à intervenir dans ce qu'elles considèrent comme relevant du droit du travail privé. Pour elles, il appartient aux salariés qui seraient victimes de telles pratiques d'engager une action devant les tribunaux suisses compétents en vue de faire valoir leurs droits (un tribunal bâlois jugera début 2012 le licenciement de 6 frontaliers - français et allemands - par la société Stocklin, au motif qu'ils avaient refusé la baisse de salaire de 6 % imposée par leur employeurs). Au-delà du ministère des affaires étrangères et européennes, ce dossier a fait l'objet d'une mobilisation interministérielle puisque le ministre du travail, via le secrétariat général pour les affaires européennes a décidé de saisir le commissaire européen chargé de l'emploi, des affaires sociales et de l'égalité des chances de ce dossier afin qu'il l'examine et détermine si cette pratique contrevient effectivement au principe de non-discrimination applicable en droit suisse depuis l'adhésion de la Suisse à l'accord relatif à la libre circulation des personnes. Le ministère des affaires étrangères et européennes, tout à fait conscient de l'importance que revêt ce sujet pour les travailleurs frontaliers et pour les élus des zones frontalières, reste mobilisé sur la question et ne manquera pas de tenir l'honorable parlementaire informée de l'état d'avancement de ce dossier.

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