Question de Mme BLANDIN Marie-Christine (Nord - SOC-EELVr-R) publiée le 16/12/2011
Question posée en séance publique le 15/12/2011
Mme Marie-Christine Blandin. Ma question s'adresse à M. le ministre de la culture et de la communication.
M. Didier Boulaud. Il n'est pas là !
Mme Marie-Christine Blandin. Elle concerne la situation d'urgence dans laquelle se trouvent plusieurs titres de la presse nationale. Je pense à l'agonie de France-Soir, version papier, un journal créé par Pierre Lazareff, mais également aux difficultés de La Tribune, dont le sort se joue demain en tout cas pour une première étape au tribunal de commerce, qui recueillera les éventuelles offres de reprise.
Les écologistes, avec la majorité de gauche, considèrent l'existence d'une presse d'opinion, le pluralisme du bouquet de titres en vente comme fondement et gage d'une vraie démocratie.
La dégradation du système de soutien à la presse ainsi que le silence du Gouvernement sur les titres en péril La Tribune ou France-Soir : c'est plus de 150 journalistes ! suscitent l'inquiétude quant au devenir des aides à la presse, dont certaines, malgré des critères comme l'aide au portage, semblent solubles dans des plans sociaux opportunistes ou la trésorerie d'éphémères repreneurs.
Je rappelle que la disparition d'un ou plusieurs titres amorce un effet domino, une spirale fatale : augmentation du coût de diffusion pour les autres, fragilisation de leur modèle économique, dégradation des contenus, concentration des impressions, avec des horaires trop avancés pour certains, voire fermeture d'imprimeries.
La seule disparition de la publication Paru Vendu menace, par exemple, l'imprimerie Hebdoprint et ses 500 salariés dans des sites comme Lomme, dans le Nord, ou Les Angles, dans le Gard.
Monsieur le ministre, parce qu'il s'agit de milliers d'emplois qualifiés, de pluralisme et de qualité de la presse, donc de démocratie, parce qu'il y a urgence et devoir pour notre pays, qui ne saurait confondre groupe de presse et vulgaire terrain spéculatif pour groupe industriel en mal d'image, parce que 2012 ne peut s'envisager sans diversité d'analyses et d'opinions, que comptez-vous faire pour sauver ces titres ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste-EELV, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
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Réponse du Ministère chargé des relations avec le Parlement publiée le 16/12/2011
Réponse apportée en séance publique le 15/12/2011
M. Patrick Ollier, ministre auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Madame Blandin, je vous prie d'abord d'excuser l'absence de M. Frédéric Mitterrand, qui est en Guyane pour les états généraux du multilinguisme.
Vous dites que l'existence d'une presse d'opinion est gage de démocratie. Le Gouvernement est tout à fait d'accord avec vous ; c'est d'ailleurs la raison pour laquelle, en 2009, le Président de la République a pris l'initiative d'un vaste plan d'accompagnement pour la presse : 580 millions d'euros en moyens nouveaux sur trois ans.
Mme Marie-Christine Blandin. Où sont-ils passés ?
M. Patrick Ollier, ministre. Jamais l'État n'avait réformé si rapidement et si profondément le secteur de la presse.
Cette initiative, unique en Europe, a permis d'enregistrer des résultats prometteurs sur plusieurs fronts : d'abord, le redressement du chiffre d'affaires du secteur en 2010, après l'effondrement enregistré en 2009 ; ensuite, des chiffres de vente de la presse quotidienne nationale d'information qui affichent une stabilité à la hausse ; enfin, une progression générale de la presse d'actualité.
Malgré ces signes encourageants, le contexte global reste troublé et certains journaux historiquement plus fragiles sont particulièrement touchés par la crise financière.
Les situations ne sont pas comparables, vous l'avez dit, et plusieurs cas sont actuellement d'une brûlante actualité.
La Tribune, d'abord, a prouvé depuis sa création qu'elle contribuait à l'enrichissement et à la diversité d'une information économique de qualité, et, si le journal n'a jamais atteint l'équilibre financier, il a, lui, rencontré son public.
Une vingtaine de propositions de reprise auraient été déposées à ce jour - c'est bon signe - dont certaines s'appuieraient sur un modèle bimédia. C'est encourageant pour la qualité et la crédibilité du titre. La Tribune a toute sa place dans le paysage de la presse économique française. Attendons les décisions qui vont être prises.
De son côté, France-Soir subit les conséquences d'un long déclin, qui remonte à plus de vingt ans. Le journal ne parvient à trouver ni le public ni les ressources publicitaires nécessaires à un grand quotidien populaire. Sauf à injecter des dizaines de millions d'euros, comme cela a déjà été fait, il est difficile d'aller plus loin. Pour que le titre survive, il faut en revoir radicalement la formule, et le passage au tout-numérique est l'option privilégiée par la direction.
M. David Assouline. C'est la fin de France-Soir !
M. Patrick Ollier, ministre. Le pari est risqué - monsieur Assouline, vous avez raison - pour la survie du titre et la garantie des emplois, principal sujet de préoccupation du travail lancé le 11 décembre dernier sous l'égide du Syndicat de la presse quotidienne nationale, qui apporte son expertise.
Il importe que les éléments économiques et sociaux, notamment sur l'avenir du titre à moyen terme, soient établis. C'est pourquoi Frédéric Mitterrand a demandé à Alexandre Pougatchev d'apporter toutes les garanties nécessaires.
M. David Assouline. Il ne les apporte pas !
M. Patrick Ollier, ministre. Bien entendu, madame Blandin, vous avez raison : il y aura des conséquences sur l'emploi dans la région d'Île-de-France. Toutefois, au travers d'une convention signée entre le ministère de la culture et celui du travail, nous allons renforcer les moyens mis à disposition par Pôle emploi, en particulier ceux du Centre national de reclassement des journalistes, qui pourra apporter son aide aux professionnels en difficulté.
Sans l'action du Gouvernement, le paysage de la presse ne serait déjà plus ce qu'il est encore aujourd'hui et le pluralisme de l'information en aurait été la première victime. C'est donc bien la preuve que le Gouvernement est à vos côtés, madame, pour soutenir la presse d'opinion. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. David Assouline. Pas France-Soir, que vous avez abandonné !
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