Question de M. LEFÈVRE Antoine (Aisne - UMP) publiée le 26/07/2012
M. Antoine Lefèvre attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la mise en œuvre du décret n° 2012-284 du 28 février 2012 relatif à la possession obligatoire d'un éthylotest par le conducteur d'un véhicule terrestre à moteur et ce, à compter du 1er juillet 2012. Or, la notion de «véhicule terrestre à moteur» englobe également les engins agricoles. Ceci suscite de façon compréhensible l'étonnement et l'incompréhension des agriculteurs : en effet, cette disposition est inadaptée aux tracteurs agricoles (conditions de stockage de ces dispositifs sensibles et fragiles, conducteurs multiples), sachant de surcroît que ces engins sont beaucoup plus souvent dans les champs que sur la route. Il lui demande par conséquent de lui indiquer sa position à ce sujet.
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Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 21/11/2012
Réponse apportée en séance publique le 20/11/2012
M. Antoine Lefèvre. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis 2006, l'alcool est la première cause de mortalité sur les routes françaises, avec près d'un tiers des tués.
Dans le cadre de leur politique visant à limiter les cas de conduite sous l'empire d'un état alcoolique, les autorités publiques ont décidé d'imposer la possession d'un éthylotest par le conducteur d'un véhicule terrestre à moteur c'est le décret en date du 28 février 2012.
La mise en uvre de cette disposition était initialement prévue à compter du 1er juillet 2012, les premières verbalisations devant intervenir à partir du 1er novembre. Mais, monsieur le ministre, vous venez de repousser cette dernière date de quatre mois, soit au 1er mars 2013.
Ce report s'explique par la pénurie d'éthylotests dans les différents commerces, avec pour conséquence une forte augmentation des prix, ces derniers passant de un à cinq euros.
Selon le dernier baromètre de la sécurité routière, 90 % des Français sont maintenant informés de l'obligation de détenir un éthylotest, ce qui est révélateur d'un réel consensus.
Néanmoins, une difficulté d'application n'a pas été anticipée, puisque la notion de « véhicule terrestre à moteur » englobe également les engins agricoles, tels que tracteurs, moissonneuses, etc.
Cette extension de la mesure suscite, de façon compréhensible, l'étonnement et l'incompréhension des agriculteurs, cette disposition semblant inadaptée aux tracteurs agricoles.
En effet, l'appareil doit satisfaire aux conditions de validité, tenant notamment à sa date de péremption, définie par le fabricant. Pour un éthylotest chimique, cette dernière varie de dix-huit à vingt-quatre mois ; il faudra donc en changer tous les deux ans.
Par ailleurs, ces éthylotests ne doivent pas être conservés en deçà de zéro degré Celsius ou au-delà de trente degrés Celsius. Il s'agit donc de conditions difficilement respectables, en été comme en hiver, notamment pour les engins agricoles non équipés de la climatisation, qui sont encore la grande majorité sur le territoire. Autrement dit, les tracteurs sont ouverts tantôt au vent et à la pluie, tantôt aux fortes chaleurs estivales. De plus, ces engins sont beaucoup plus souvent dans les champs que sur la route, et les conducteurs de chaque véhicule sont multiples.
Monsieur le ministre, un hebdomadaire rapportait récemment que votre collègue ministre de l'agriculture, M. Le Foll, se serait rapproché de vous pour demander que cette mesure ne s'applique pas aux tracteurs. Par conséquent, je vous remercie de bien vouloir nous indiquer votre position sur ce sujet.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Manuel Valls, ministre de l'intérieur. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, j'observe que M. Garot, ministre chargé de l'agroalimentaire, reste là pour surveiller attentivement ma réponse, étant donné ses fonctions auprès de M. Le Foll, qui s'est effectivement rapproché quelque peu de moi ! (Sourires.)
Monsieur Lefèvre, vous l'avez rappelé, la conduite sous l'empire d'un état alcoolique reste la première cause d'accidents mortels routiers. Les conducteurs de tous les véhicules sont concernés. Il est donc important de permettre à chacun d'auto-évaluer le plus rapidement possible son imprégnation alcoolique au moyen d'un éthylotest chimique ou électronique. L'amélioration de la sécurité routière est notre objectif. Depuis l'engagement très fort du président Jacques Chirac en 2002, tous les gouvernements qui se sont succédé depuis lors ont poursuivi ce travail.
Le décret du 28 février 2012 oblige tout conducteur d'un véhicule terrestre à moteur à posséder un éthylotest non usagé, disponible immédiatement. J'espère que chacun de vous en possède déjà un ; je sais que M. Garot en a plusieurs. (Sourires.)
Comme vous le savez, les premiers contrôles du respect de cette obligation et, le cas échéant, les premières verbalisations pour défaut de présentation d'un éthylotest devaient intervenir à compter du 1er novembre dernier. Compte tenu de difficultés d'approvisionnement recensées dans certaines régions, j'ai décidé de reporter cette date au 1er mars 2013.
Aussi, j'ai demandé à M. Péchenard, délégué interministériel à la sécurité routière, de mettre à profit ce délai pour évaluer de manière plus générale l'efficacité et la lisibilité de cette obligation, en étroite association avec le Conseil national de la sécurité routière, lequel sera réinstallé le 27 novembre prochain. Le périmètre de l'évaluation pourra comprendre l'examen de l'intérêt de cette mesure pour les conducteurs des véhicules que vous avez évoqués, lorsqu'ils sont amenés à emprunter les voies ouvertes à la circulation publique, ce qui peut arriver. En attendant cette évaluation, j'ai eu l'occasion d'évoquer ce problème avec MM. Le Foll et Garot. Disons le clairement : si, comme ils me l'ont dit, la mesure n'est pas justifiée, au vu de la vitesse et de l'absence d'accidents constatés, une mesure concernant directement ces véhicules pourra alors être prise. Mais vous comprendrez que j'attende la réinstallation du Conseil national de la sécurité routière et l'évaluation qui me sera présentée pour arrêter définitivement notre position.
M. le président. La parole est à M. Antoine Lefèvre.
M. Antoine Lefèvre. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse. Comme vous, nous attendrons l'évaluation et serons très attentifs aux mesures qui seront décidées en faveur des agriculteurs.
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