Question de M. NÈGRE Louis (Alpes-Maritimes - UMP) publiée le 09/08/2012
M. Louis Nègre attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la question des aménagements de peines.
La juridiction de l'application des peines peut aménager les peines d'emprisonnement ferme en prononçant soit la libération conditionnelle, soit la suspension de peine pour raisons médicales, soit la semi-liberté, soit le placement à l'extérieur ou encore le placement sous surveillance électronique.
Des permissions de sortir peuvent également être accordées sous certaines conditions. Le tribunal correctionnel peut aussi décider, dès la condamnation, que la peine d'emprisonnement fera l'objet d'un aménagement.
Il aimerait savoir pourquoi la justice fonctionne ainsi, car nos concitoyens ont du mal à comprendre qu'un condamné qui a commis un délit et doit être puni se voie proposer des aménagements de peine, bien souvent sans justification et cela contre toute logique.
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Réponse du Ministère de la justice publiée le 06/12/2012
En matière pénale, l'effectivité de l'exécution des peines constitue une composante essentielle de la politique générale de lutte contre la délinquance et la récidive. L'exécution des peines constitue ainsi l'une des priorités de l'action de la garde des sceaux, ainsi que l'a rappelé la circulaire de politique pénale générale du 19 septembre 2012. Cette politique pénale tire les conséquences des conclusions de toutes les analyses françaises et étrangères qui convergent vers des résultats identiques à savoir que la prison aggrave le risque de récidive. Il ne s'agit pas de remettre en cause la prison comme mode de punition légitime mais de prendre sérieusement en compte son impact sur le risque de récidive. Il résulte ainsi de ces analyses que 63 % des personnes détenues ayant achevé leur peine sans aménagement sont à nouveau condamnées dans un délai de cinq ans, contre 55 % pour les personnes bénéficiaires d'un aménagement de peine au cours de leur détention du type placement à l'extérieur, semi-liberté ou encore placement sous surveillance électronique et 39 % pour celles qui ont terminé leur peine sous le régime de la libération conditionnelle (Cahiers d'études pénitentiaires et criminologique Mai 2011 n° 36, Annie Kensey et Abdelmalik Benaouda). Conformément aux dispositions de l'article 132-24 du code pénal, la juridiction prononce les peines et fixe leur régime en fonction des circonstances de l'infraction et de la personnalité de son auteur. La loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 a par ailleurs érigé en dernier recours le prononcé d'une peine d'emprisonnement si la gravité de l'infraction et le prononcé d'une peine d'emprisonnement et la personnalité de son auteur rendent cette peine nécessaire et si toute autre sanction est manifestement inadéquate. Dans ce cas, la loi ajoute que la peine d'emprisonnement doit, si la personnalité et la situation du condamné le permettent, et sauf impossibilité matérielle, faire l'objet d'une mesure d'aménagement de peine. De même, conformément à l'article 707 du code de procédure pénale, l'exécution des peines favorise, dans le respect des intérêts de la société et des droits des victimes, l'insertion ou la réinsertion des condamnés ainsi que la prévention de la récidive. À cette fin, les peines sont aménagées avant leur mise à exécution ou en cours d'exécution si la personnalité et la situation matérielle, familiale et sociale du condamné ou leur évolution le permettent. Les juridictions de jugement et de l'application des peines disposent ainsi de la possibilité, dans les conditions, notamment de délai prévues par la loi, d'aménager les peines d'emprisonnement ferme du condamné dans le cadre d'un retour progressif de ce dernier à la liberté. Les aménagements de peine que sont la libération conditionnelle, le placement sous surveillance électronique ainsi que le placement à l'extérieur et la semi-liberté favorisent la réinsertion des condamnés et la prévention de la récidive en évitant les sorties « sèches » de détention. L'octroi d'un aménagement de peine exige de la personne condamnée qu'elle remplisse un certain nombre de conditions fixées par la loi. Ainsi, conformément aux dispositions de l'article 729 du code de procédure pénale, la libération conditionnelle ne peut être accordée qu'après exécution d'un temps d'épreuve en fonction des efforts sérieux de réadaptation sociale du condamné et lorsqu'il justifie : - de l'exercice d'une activité professionnelle, d'un stage ou d'un emploi temporaire ou de son assiduité à un enseignement ou à une formation professionnelle, - de sa participation essentielle à la vie de famille, - de la nécessité de suivre un traitement médical, - de ses efforts en vue d'indemniser les victimes, - de son implication dans tout autre projet sérieux d'insertion ou de réinsertion. En tout état de cause, l'octroi d'une mesure d'aménagement de peine résulte de la décision souveraine des juridictions de l'application des peines prise en fonction de la personnalité, de la situation matérielle, familiale ou sociale des condamnés. Loin de constituer un traitement de faveur ou une indulgence injustifiée, l'aménagement des peines constitue le moyen le plus efficace de lutter contre la récidive qui a juste titre préoccupe nos concitoyens.
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