Question de M. ANTOINETTE Jean-Étienne (Guyane - SOC-A) publiée le 20/09/2012

M. Jean-Étienne Antoinette interroge Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les effets juridiques sur les actes accomplis en violation des incompatibilité édictées par les articles 118, 119 et 120 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991.
La profession d'avocat est une profession réglementée qui prévoit des interdictions d'exercice dans certains cas pour les avocats titulaires de mandats électifs. Ainsi, l'article 118 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 modifié organisant la profession d'avocat, dispose : « L'avocat investi d'un mandat de conseiller régional ou de membre de l'assemblée de Corse ne peut, pendant la durée de son mandat, accomplir aucun acte de sa profession, directement ou indirectement, contre la région ou la collectivité territoriale, les départements et communes qui en font partie ainsi que les établissements publics de ces collectivités territoriales ». Les articles 119 et 120 de ce décret énoncent des dispositions similaires pour l'avocat investi d'un mandat de conseiller général et de conseiller municipal. Dans un arrêt rendu le 20 décembre 2011, le Conseil d'État a indiqué que les dispositions des articles 118 et 119 ne portaient pas atteinte à la liberté d'exercice de leurs mandats par les élus locaux concernés ainsi qu'à la liberté du commerce et de l'industrie. La Haute Juridiction a indiqué qu'il appartient tant au législateur qu'au pouvoir réglementaire de fixer des règles s'agissant d'une profession réglementée. Les dispositions précitées visent à éviter les conflits d'intérêts afférents. En spécifiant les termes « aucun acte de sa profession » et « directement ou indirectement », le texte institue donc une incapacité absolue pour l'avocat élu local concerné ainsi que pour tout membre de son cabinet à intervenir dans des affaires où il se retrouverait contre des collectivités territoriales relevant de son ressort électif.
Il lui demande donc de bien vouloir préciser les effets juridiques qui s'appliquent aux actes professionnels qui sont accomplis par l'avocat concerné en violation de l'interdiction posée par les articles 118, 119 et 120 du décret du 27 novembre 1991 modifié.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 10/01/2013

L'indépendance de l'avocat, qui représente pour ce dernier un devoir et pour son client un droit, garantit un accès effectif à la justice en assurant un conseil et une défense libres. C'est une exigence de l'État de droit. De ce principe découle le régime des incompatibilités d'exercice prévu par les articles 111 à 123 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat, et notamment les articles 118, 119 et 120 relatifs aux mandats de conseiller régional ou de membre de l'assemblée de Corse, de conseiller général et de conseiller municipal. Ces dispositions visent à limiter les risques de conflits d'intérêts auxquels les avocats pourraient être exposés ; elles assurent, en outre, qu'ils sont en mesure de se consacrer à leur mission d'assistance des justiciables et de représentation des parties en justice dans le plein respect des règles déontologiques qui leur sont applicables. Il appartient aux ordres de contrôler l'existence ou non d'un conflit d'intérêts dans l'accomplissement par un avocat de son mandat, les principes essentiels de la profession devant guider le comportement de l'avocat en toutes circonstances. Conformément à l'article 183 du décret du 27 novembre 1991, toute contravention aux lois et règlements, toute infraction aux règles professionnelles, expose l'avocat qui en est l'auteur aux sanctions disciplinaires énumérées à l'article 184. Le décret précité ne comprend cependant aucune disposition relative à l'effet juridique des actes accomplis en méconnaissance de ces dispositions. Il s'ensuit que l'avocat, qui accomplit un acte professionnel en méconnaissance des incompatibilités prévues aux articles 118 à 120 du décret du 27 novembre 1991, est susceptible de faire l'objet d'une procédure disciplinaire ; pour autant, l'efficacité des actes ainsi accomplis ne saurait être remise en cause.

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