Question de M. JEANNEROT Claude (Doubs - SOC) publiée le 16/05/2013
M. Claude Jeannerot attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur concernant le taux de suicides très élevé dans la Police nationale.
Depuis de nombreuses années, les chiffres en matière de suicides dans la Police nationale sont inquiétants. Le risque de suicide est supérieur de 36 % à celui du reste de la population française. Le taux de suicide s'élève à un peu plus de 35 pour 100 000 agents. On dénombre une cinquantaine de suicides de policiers chaque année, souvent avec leur arme de service et sur leur lieu de travail. Si certains de ces gestes fatals sont liés à des problèmes d'ordre privé, cette sursuicidité ne saurait être analysée comme étant dénuée de tout lien avec le milieu professionnel. D'ailleurs le taux de suicide chez les jeunes policiers de moins de 36 ans apparaît nettement plus élevé en raison de leur manque de préparation face aux troubles sociaux, humains et à la violence auxquels ils sont parfois quotidiennement confrontés. Ces derniers se retrouvent parfois dans une situation de stress intense et présentent des signes de détresse psychologique pouvant accélérer le passage à l'acte.
Dans ces conditions, il aimerait savoir quelles mesures sont envisagées par le Gouvernement afin de prévenir les suicides particulièrement nombreux des agents de la Police nationale.
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Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 29/08/2013
Au sein de la police nationale, la moyenne des suicides déplorés au cours des cinq dernières années est de 42 par an. Le suicide par arme de service est le plus fréquent (55 % de l'ensemble des suicides). En 2011 et 2012, années au cours desquelles une étude spécifique a été effectuée, respectivement 10 % et 20 % des suicides ont été commis sur le lieu de travail (dont le véhicule de service). Il n'est pas observé de surreprésentation de jeunes policiers dans ces drames, puisque la tranche d'âge la plus concernée est celle des 40-44 ans. S'il est établi que les causes sont majoritairement d'ordre privé, la difficulté du métier de policier ne peut être niée dans les facteurs déclenchant le passage à l'acte. Le suicide au sein de la police nationale est une préoccupation majeure du ministère de l'intérieur qui conduit depuis plusieurs années une politique volontariste. Le ministère dispose depuis 1996 d'un service de soutien psychologique opérationnel (SSPO) composé, sous l'autorité d'une psychologue, clinicienne de formation, de soixante psychologues cliniciens répartis sur l'ensemble du territoire. Ces professionnels sont chargés de répondre aux demandes d'assistance psychologique des fonctionnaires de police et des interventions urgentes à la suite d'événements traumatiques. Ils assurent une écoute, un soutien et un accompagnement des policiers en difficulté, organisent des permanences et des séances d'information. Des actions de prévention sont également menées, notamment avec des groupes de parole. Depuis la mise en uvre de ce dispositif de prévention, le nombre de suicides, même s'il reste humainement toujours trop élevé, a régressé dans la police nationale, passant de 70 par an dans les années 1990 à moins de 50 par an. A la suite d'une réunion extraordinaire du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail sur le sujet en 2008, l'effort de prévention a été renforcé. Le directeur général de la police nationale a adressé le 22 décembre 2009 une instruction aux directeurs et chefs de service de police, les invitant à intensifier la mobilisation de tous les acteurs (agents et hiérarchie) pour mieux détecter les situations de vulnérabilité pouvant mener dans certains cas au suicide, et à renforcer l'indispensable attention qui doit leur être apportée. Par ailleurs, un rapport d'étude épidémiologique sur le suicide au sein des services de police, remis en juin 2010 par l'institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM), a préconisé une coordination renforcée de l'ensemble des réseaux institutionnels de professionnels de soutien (médecins de prévention, assistants de service social, psychologues...). Des mesures allant en ce sens ont été prises. Le ministre de l'intérieur, pour qui ce phénomène constitue une préoccupation constante, a demandé dès septembre 2012 au directeur général de la police nationale de renforcer le dispositif de prévention. À la suite d'une instruction du 13 novembre 2012 du directeur général de la police nationale, des pôles de vigilance suicide sont ainsi progressivement institués depuis le 1er janvier 2013 au sein de chaque département dans les services territoriaux de la police nationale. Sous l'égide du médecin de prévention, ils réunissent les professionnels de soutien pour la mise en uvre d'une prévention coordonnée et anticipée. Le service de soutien psychologique opérationnel (SSPO) va en outre être renforcé par un médecin expert et doté d'un numéro vert. Il va également prochainement faire l'objet d'une évaluation par un collège d'inspections. Il doit également être souligné que, dans le cadre de la cartographie des risques du ministère de l'intérieur, les services d'inspection (inspection générale de l'administration, inspection générale de la police nationale, inspection générale de la gendarmerie nationale) ont rendu en janvier 2013 un rapport d'audit sur la prévention du suicide au sein des personnels des forces de police et de gendarmerie, dont les préconisations seront mises en uvre dans les mois qui viennent. Les services de formation prennent également davantage en compte la prévention du suicide, aussi bien au stade du recrutement que des stages proposés à l'encadrement (santé et sécurité au travail, prévention des risques psycho-sociaux - RPS). Les écoles de formation initiale des cadres de la police nationale ont ainsi intégré des modules spécifiques de formation au management en sécurité et santé au travail, centrés sur le stress, les RPS et le suicide. Cette mesure est entrée en vigueur dans la scolarité en 2012.
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