Question de M. JARLIER Pierre (Cantal - UDI-UC) publiée le 08/11/2013
Question posée en séance publique le 07/11/2013
Concerne le thème : La montagne : aménagement du territoire, problématiques foncières, développement économique
M. Pierre Jarlier. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les territoires de montagne sont soumis à des handicaps spécifiques qui nécessitent des réponses adaptées des pouvoirs publics. Mes collègues montagnards et moi-même l'avons souvent rappelé dans cet hémicycle, notamment Jean-Paul Amoudry qui s'associe à mon propos.
L'Europe et l'État ont reconnu ces difficultés en matière agricole en ouvrant la voie à une meilleure prise en compte des spécificités de notre agriculture de montagne dans la nouvelle politique agricole commune.
À ces particularités, s'ajoutent parfois un certain isolement, une faible densité démographique, ainsi que des contraintes géographiques et climatiques qui rendent plus difficile la vie quotidienne. Cette situation est particulièrement vraie en moyenne montagne, qui subit une réelle mutation sociale liée à une perte très importante d'actifs agricoles, qui constituaient pourtant le socle de l'économie locale. Or il faut bien reconnaître que les collectivités de montagne sont souvent confrontées à un manque de moyens pour surmonter à la fois ces mutations et ces handicaps naturels, d'autant que les contraintes qui pèsent sur elles, en matière d'urbanisme notamment, sont de plus en plus lourdes.
Si les territoires de montagne constituent le socle incontournable pour la préservation des grands équilibres écologiques de notre pays, il faut aussi veiller à un juste équilibre entre la protection de la montagne et son développement, indispensables à un aménagement équitable et durable du territoire. Tel était le sens de la loi Montagne de 1985, fondatrice d'une politique nationale de la montagne.
Près de trente ans plus tard, le contexte économique, institutionnel et social de ces territoires a changé et cette loi mérite maintenant d'être revisitée. Les nouvelles possibilités de développement ne manquent pas : le désenclavement numérique, le télétravail, la pluriactivité, les filières de qualité ou encore le maillage des services de proximité, pour ne citer que ces exemples je pense aussi à la transition énergétique.
De leur côté, les collectivités territoriales organisent la solidarité locale en développant l'intercommunalité autour de projets de territoire, mais elles ont aussi besoin de la solidarité nationale pour parvenir à surmonter leurs difficultés.
Madame la ministre, vous avez annoncé un prochain projet de loi sur l'égalité des territoires : un chapitre consacré à la montagne y trouvera-t-il sa place ? Comment comptez-vous associer les forces vives de la montagne à la concertation préalable ?
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Réponse du Ministère de l'égalité des territoires et du logement publiée le 08/11/2013
Réponse apportée en séance publique le 07/11/2013
Mme Cécile Duflot, ministre de l'égalité des territoires et du logement. Monsieur le sénateur Jarlier, vous avez raison, les territoires de montagne subissent des contraintes fortes et, vous l'avez compris, à l'occasion de nombreux débats ici même, ma vision de l'égalité des territoires repose sur une prise en compte différenciée de ces contraintes, car l'égalité n'est pas l'uniformité, c'est une évidence. Tel est l'esprit de la stratégie que j'entends développer, esprit qui a également inspiré la création du commissariat général à l'égalité des territoires. Tel était également l'esprit qui a inspiré les auteurs de la loi Montagne, que vous avez évoquée et dont nous allons bientôt fêter le trentième anniversaire.
J'ai par ailleurs pleinement conscience des contraintes particulières qui pèsent sur les territoires de montagne et sur leur développement. À l'occasion de la discussion du projet de loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, le projet de loi ALUR, nous avons intégré un certain nombre de ces problématiques dans la loi pour l'adapter le plus possible aux réalités et aux besoins des territoires de montagne.
Le Gouvernement a bien compris l'enjeu que représentent, dans leur globalité, les territoires de montagne et un effort de péréquation important a été consenti en 2013 en faveur des territoires les plus fragiles. Je tiens notamment à souligner la disposition qui a permis de comptabiliser, pour les zones montagnardes, le double du kilométrage de routes à leur charge pour déterminer leurs dotations et tenir ainsi compte des difficultés d'entretien de ces infrastructures. En ce qui concerne le très haut débit, la spécificité des territoires ruraux et de montagne est aussi prise en compte.
Nous travaillons également à de nouvelles dispositions législatives, dans le cadre du titre « Promouvoir l'égalité et la solidarité des territoires » du projet de loi de mobilisation des régions pour la croissance et l'emploi et de promotion de l'égalité des territoires, mais une remise en cause de la loi Montagne n'est aujourd'hui pas prévue, dans ce qu'elle avait d'essentiel pour ces territoires, c'est-à-dire la consécration de leur spécificité. En revanche, je le répète, dans le cadre du projet de loi ALUR, un certain nombre de ces préoccupations sont prises en compte.
Par ailleurs, j'aimerais évoquer un autre sujet essentiel, à savoir l'accès aux services au public. Je peux vous indiquer, monsieur le sénateur, que je souhaite que l'État puisse participer de façon pérenne, d'ici à 2017, à un réseau de mille points d'accès aux services publics, les maisons de services au public. Une expérimentation est née au sein du réseau « Plus de services au public ». Ce réseau sera fondé sur l'initiative locale, ce qui permet, là encore, une adaptation maximale à la typologie des territoires. En montagne, des opérateurs que l'on ne trouve peut-être pas sur d'autres territoires auront toute leur place dans ces maisons de services au public.
Nous pouvons aussi travailler ensemble, si nécessaire, à d'autres dispositions qui pourraient être incluses dans le projet de loi et seraient de nature à répondre à d'autres enjeux des territoires ruraux, de manière générale, et de la montagne, en particulier. J'ai ainsi indiqué que je souhaitais, en ce qui concerne le schéma départemental d'accès aux services, pouvoir travailler avec les conseils généraux qui seraient volontaires, avant même l'adoption de cette loi, dans un cadre expérimental, qui permettrait de nourrir le travail législatif. J'espère que des départements de montagne pourront se joindre à cette démarche.
Par ailleurs, je suis très attentive, vous le savez, aux travaux du Conseil national de la montagne et je ne verrais que des avantages à ce que des réflexions puissent se développer au sein de cette instance en vue de la préparation du titre « Égalité des territoires ». Je peux ainsi vous indiquer, monsieur le sénateur, que la délégation interministérielle à l'aménagement du territoire et à l'attractivité régionale, la DATAR, est à votre disposition pour travailler à ces propositions.
M. le président. La parole est à M. Pierre Jarlier, pour la réplique.
M. Pierre Jarlier. Madame la ministre, je vous remercie de vos propos. Les montagnards seront sensibles au fait que vous reconnaissiez que le mot « égalité » ne signifie pas « uniformité ».
Dans le même ordre d'idées, je crois que, face à des situations inégales, il faut savoir apporter des solutions différenciées. Tel était le but de la loi Montagne qui mérite sans doute d'être revisitée, mais dont le fondement doit être maintenu, comme vous l'avez dit. Nous avons donc de longs débats en perspective. Avec la discussion du projet de loi ALUR, un certain nombre d'avancées ont déjà été opérées. Beaucoup reste à faire, parce qu'il ne faut pas sanctuariser les territoires ruraux, notamment en montagne.
S'agissant des dotations, des avancées ont également été obtenues dans le projet de loi de finances pour 2014, mais nous devrons mieux prendre en compte, dans le calcul de la dotation globale de fonctionnement, les charges territoriales auxquelles les collectivités locales doivent faire face. Une réflexion est en cours sur ce sujet, le Gouvernement s'y est engagé devant le congrès des élus de la montagne. Nous espérons donc que ces charges seront mieux prises en compte à l'avenir.
En ce qui concerne les services publics, je constate avec satisfaction que vous avez la volonté de mailler le territoire avec des maisons de services au public. Tout reste à faire et les territoires ruraux éprouvent une véritable inquiétude à ce sujet.
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