Question de M. DOLIGÉ Éric (Loiret - UMP) publiée le 10/01/2014

Question posée en séance publique le 09/01/2014

M. Éric Doligé. Monsieur le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement, selon les sondages, le ministre de l'intérieur, à qui s'adressait ma question, est promis à un avenir flatteur. Pour certains, Matignon serait à sa portée.

M. Gérard Longuet. Au minimum !

M. Éric Doligé. Pour d'autres, les portes de l'Élysée lui seraient grandes ouvertes. (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.) Dans ces conditions, pourquoi s'est-il engagé dans une opération de découpage de l'ensemble des départements qui confine à la manipulation ?

La loi relative à l'élection des conseillers départementaux a été votée dans la douleur : 278 députés et sénateurs l'ont approuvée, soit 38 % des votants, alors que 444 parlementaires ont voté contre, soit 62 %. Le Gouvernement a été sauvé par la Constitution, qui donne le dernier mot à l'Assemblée nationale.

Cette loi pose deux grands principes : la parité et l'équilibre démographique. Ils sont actés, et il n'est plus nécessaire que vous les commentiez. Je souhaite plutôt vous interroger sur la méthode employée pour découper.

M. Valls affirmait : « S'il n'y a pas de critères, c'est la loi de la jungle. ». Il a donc pris des engagements forts. Il a été, comme à l'habitude, ferme, précis, voire autoritaire. De plus, il tient la plume en rédigeant les décrets et les ciseaux en découpant à sa guise.

Il nous a fait plusieurs déclarations : « La représentation des territoires est une nécessité, notamment dans les départements à fort caractère rural » ; « des cantons trop étendus seraient absurdes. La superficie et le nombre de communes seront donc pris en compte » ; « les territoires ruraux seront mieux représentés, d'autant que les intercommunalités seront intégrées » ; « associer mon modeste nom à une révolution, tout en conservant la dimension rurale, c'est un motif de fierté ».

M. Alain Gournac. Paroles… Paroles…

M. Éric Doligé. Aucun de ces engagements, parmi tant d'autres, n'a été tenu.

M. Gérard Larcher. Absolument !

M. Éric Doligé. Nombre des cinquante-deux avis déjà rendus par les conseils généraux ainsi que des milliers de délibérations de communes, que vous vous êtes bien gardés de consulter, mais qui s'expriment, sont édifiants, voire cinglants. Ils constatent majoritairement, tous bords confondus, que vous étouffez la ruralité et que vous vous jouez des bassins de vie et des intercommunalités.

M. Jean-Louis Carrère. C'est ce que vous voulez faire croire !

M. Alain Fauconnier. Vous n'avez fait que cela pendant dix ans !

M. Éric Doligé. Évoquant les services publics et notamment les gendarmeries, M. Valls annonçait : « Je souhaite envisager une réorganisation des services publics en tenant compte de la carte cantonale. » Est-ce à dire que, divisant par deux le nombre de cantons, vous allez diviser par deux la présence des services publics ?

M. Gérard Larcher. Et oui !

M. Michel Berson. C'est excessif !

M. Éric Doligé. Les citoyens apprécieront !

J'en viens à mes questions.

Tiendrez-vous compte des avis des conseils généraux ? Avez-vous l'intention de publier en bloc, dans la seconde quinzaine du mois de février prochain, les quatre-vingt-dix-huit décrets vous permettant ainsi de paralyser la réaction des conseils généraux ?

En raison des milliers de recours qui viendront de tous bords, au-delà du 1er mars, le Conseil d'État pourrait procéder à quelques annulations. Prendrez-vous de nouveaux décrets quitte à ne pas respecter la loi de 1990 ?

Pouvez-vous nous préciser à moins de deux mois de l'échéance que les règles sur les comptes de campagne pourront fonctionner ? Maîtrisez-vous la situation nouvelle issue de cette loi, source de contentieux ? Envisagez-vous, si nécessaire, de revoir la date des élections ou de faire voter une nouvelle loi ?

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. Éric Doligé. Mme Lebranchu a affirmé mardi devant la Haute Assemblée que le Gouvernement avait une interprétation sur ces risques. Une interprétation... N'est-ce pas une aberration juridique et politique ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)

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Réponse du Ministère chargé des relations avec le Parlement publiée le 10/01/2014

Réponse apportée en séance publique le 09/01/2014

M. Alain Vidalies, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Monsieur le sénateur, il n'y a pas de lois votées dans la douleur : il n'y a que des lois de la République ! (Rires sur les travées de l'UMP.) C'est la loi de la République que nous allons appliquer, en respectant les principes énoncés par le Conseil constitutionnel.

M. Jean-Louis Carrère. Très bien !

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Ce n'est pas le moment d'y revenir, mais, vous l'avez vous-même rappelé, vous avez combattu cette loi, estimant même qu'elle n'était pas constitutionnelle. Tout cela est désormais derrière nous.

Cette loi de la République, validée par le Conseil constitutionnel, obéit à des principes que vous avez tus, je peux comprendre votre discrétion : l'objectif principal qui nous a amenés à choisir ce système, c'est de disposer enfin de la parité dans les conseils départementaux. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. Éric Doligé. Je l'ai dit !

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Le conseil général du Loiret, votre département, compte aujourd'hui sept femmes.

M. Éric Doligé. Ce n'est pas le sujet !

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Demain, grâce à cette loi, il en comptera vingt et une. Je pense que vous pouvez vous en féliciter. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. - Exclamations sur les travées de l'UMP.)

Mme Éliane Assassi. Eh oui !

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Dans votre département, le ratio entre le plus petit canton et le plus grand est de un à cinq. Demain, dans votre département comme partout en France, chaque voix comptera de la même manière. C'est l'objectif du redécoupage et des nouveaux critères démographiques retenus.

M. Éric Doligé. C'est faux !

M. Alain Vidalies, ministre délégué. La jurisprudence du Conseil constitutionnel, comme celle du Conseil d'État, vous donne toutes les garanties. Je ne répéterai pas ce que j'ai répondu à M. Marseille : ces règles sont précises, hiérarchisées, même au-delà de ce que l'on avait pu comprendre. La règle prioritaire est celle de l'équilibre démographique. Vous pouvez prendre connaissance des observations du Conseil d'État, y compris sur les propositions de redécoupage émises par le ministère de l'intérieur. C'est la raison pour laquelle ce redécoupage s'opère dans la clarté et selon une procédure transparente. (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.)

Vous vous étonnez de ces objectifs et de ce redécoupage. Permettez-moi de vous rappeler que la création des conseillers territoriaux, qui auraient remplacé les conseillers départementaux et les conseillers régionaux, rendait nécessaire le même redécoupage, avec les mêmes conséquences et le recours aux mêmes critères. (Protestations sur les travées de l'UMP.)

M. Alain Fauconnier. Voilà !

M. Éric Doligé. Ce n'est pas la question !

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Enfin, au nom du ministre de l'intérieur, je tiens à récuser certains de vos propos. Il n'y a strictement aucun lien entre le redécoupage cantonal ou la circonscription cantonale et l'implantation des services publics. Il est tout à fait inopportun de véhiculer l'idée que ce redécoupage entraînerait une remise en cause des services publics. Le ministre de l'intérieur s'inscrit en faux contre une telle affirmation. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

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