Question de M. ASSOULINE David (Paris - SOC) publiée le 24/01/2014
Question posée en séance publique le 23/01/2014
M. David Assouline. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, comme vous le savez, la presse est frappée lourdement par la crise économique.
Elle subit aussi de plein fouet la révolution des technologies de l'information et de la communication. Tout est bouleversé : techniques de fabrication, distribution, métiers, usages des lecteurs, et, bien sûr, l'ensemble du modèle économique.
Nous sommes dans ce moment où l'ancien meurt et le nouveau peine à naître.
L'enjeu est, bien sûr, de sauvegarder les titres et les emplois. Mais il y a un autre enjeu, plus global, intéressant toute la société : continuer à avoir une information de qualité, diverse et pluraliste, libre et indépendante, nécessité vitale pour notre démocratie.
Après la disparition de quelques titres nationaux et les menaces sur de nouveaux titres parmi les plus prestigieux, c'est maintenant la presse quotidienne régionale qui est aussi en grand danger.
Les aides de l'État sont très importantes,
M. Christian Poncelet. Eh oui !
M. David Assouline.
mais, elles sont critiquées, à raison : certains bénéficiaires sont très loin d'avoir ce « caractère d'intérêt général quant à la diffusion de la pensée », pourtant exigé pour bénéficier de ces aides. De plus, la répartition et les priorités retenues sont contestables.
Face à cette crise, quelle est l'action du Gouvernement pour réformer ces aides et aider notre presse à affronter avec succès le défi historique qui est devant elle ?
Dans ce cadre, monsieur le ministre chargé du budget, comment et quand comptez-vous mettre fin à une injustice fiscale entre la presse papier et la presse en ligne, laquelle ne bénéficie pas du même taux de TVA ? En effet, le taux de TVA « super-réduit » à 2,1 % sur les ventes, n'est pas appliqué à la presse en ligne. Pourtant, ce n'est pas l'édition papier qui justifiait cette aide lorsqu'elle a été instaurée. En 2012, 1 700 entreprises ont bénéficié de ce dispositif. Cet avantage fiscal est la principale aide à la presse, à côté de l'aide au transport postal.
Au-delà de l'injustice subie par tel ou tel titre de presse diffusé exclusivement en ligne, ce différentiel de taux de TVA représente un frein à la nécessaire modernisation et aux innovations dans tout le secteur de la presse y compris la presse traditionnelle, qui ne se conçoit plus sans le numérique et constitue à la fois un handicap économique et un frein à la migration des abonnés « papier » vers les offres numériques.
Depuis plusieurs années, je propose régulièrement au Sénat de voter la fin de cette injustice lors de la discussion du projet de loi de finances. Je sais que le Gouvernement, et notamment la ministre Aurélie Filippetti, est sensible à cette question et a engagé des négociations au niveau européen pour obtenir cet alignement de taux de TVA, mais qu'envisage-t-il de faire sans attendre, monsieur le ministre, pour remédier à cette injustice et rendre effectif le principe de neutralité technologique ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. M. André Gattolin applaudit également.)
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Réponse du Ministère chargé du budget publiée le 24/01/2014
Réponse apportée en séance publique le 23/01/2014
M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget. Monsieur Assouline, votre question me donne l'occasion de saluer votre implication constante sur ce sujet.
Avec plusieurs de vos collègues, vous avez mené ce combat en faveur de la neutralité des supports, à la fois pour les objets culturels - je pense notamment à votre volonté d'aligner le taux de TVA s appliquant au livre numérique sur le taux réduit, de 5,5 %, dont bénéficie le livre papier - et pour la presse, dont la situation est toutefois un peu différente de celle du livre.
Comme vous le savez, le taux de TVA applicable à la presse papier est de 2,1 %, pour des raisons qui tiennent au fait que, au moment où la directive sur la TVA a été adoptée, les taux réduits applicables à l'époque ont été conservés : c'est ce que l'on appelle la « clause de gel ». Lorsque ce taux a été défini, la presse numérique n'existait pas encore : c'est le progrès technologique, comme vous l'avez souligné, qui a permis à la presse numérique de se développer et de mener, notamment, des investigations aussi importantes et précieuses pour la démocratie, en France et en Europe, que celles de la presse papier.
Pour les mêmes raisons que celles qui nous ont conduits à nous mobiliser sur le taux réduit de TVA pour le livre numérique, Aurélie Filippetti a pris l'engagement, en juillet 2013, d'appliquer le taux réduit de TVA à la presse en ligne.
Il s'avère qu'un très grand nombre de pays de l'Union européenne s'associent à ce combat. Faut-il rappeler que, dans l'accord de coalition qui lie les différentes formations politiques présentes au sein du gouvernement dirigé par Angela Merkel, la mise en place d'un taux réduit de TVA sur la presse en ligne figure parmi les objectifs à atteindre ? Par ailleurs, dans le cadre des consultations en cours relatives à la rédaction de la nouvelle directive sur la TVA, de nombreux États membres de l'Union européenne nous ont rejoints.
Dans ce contexte, nous pensons que le moment est venu d'aligner le taux de TVA applicable à la presse en ligne sur celui de la presse papier. Le Gouvernement prendra une initiative législative dans les semaines à venir pour matérialiser cette volonté. Au moment où cette initiative législative sera prise, de manière à ne pas perdre de temps, nous diffuserons également une instruction qui permettra à cet alignement d'être appliqué sans délai.
Nous aurons ainsi répondu à votre préoccupation, monsieur le sénateur, et donné satisfaction à tous vos collègues qui mènent ce combat depuis de nombreuses années sur toutes les travées de cet hémicycle. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)
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