Question de M. FOUCAUD Thierry (Seine-Maritime - CRC) publiée le 20/06/2014

Question posée en séance publique le 19/06/2014

M. Thierry Foucaud. Madame la ministre, le mouvement de grève des intermittents du spectacle démontre, s'il en était besoin, que la culture ne peut pas vivre sans eux. Ils demandent que le Gouvernement n'agrée pas le nouvel accord du 22 mars 2014 sur le régime d'assurance chômage.

Non seulement cet accord entérine les régressions de la réforme de 2003, qui avait alors été combattue par toute la gauche, je le rappelle, mais il les aggrave encore, en précarisant davantage les artistes et techniciens bénéficiaires de l'assurance chômage. Il entérine ainsi le calcul des 507 heures sur dix mois et dix mois et demi, la suppression de la date anniversaire et du calcul des droits à date fixe, tout en instaurant une surcotisation de deux points pour les employeurs et les intermittents, ainsi que de nouvelles règles de calcul du différé d'indemnisation, qui vont priver d'indemnisation du chômage et de revenus 47 % des intermittents du spectacle, au lieu de 9 % actuellement, pendant des périodes pouvant aller jusqu'à quarante-cinq jours.

Les intermittents du spectacle demandent donc l'ouverture de nouvelles discussions pour examiner les propositions alternatives formulées depuis onze ans, qui ont fait l'objet de nombreux rapports. Le dernier d'entre eux, rendu par le SYNDEAC, démontre qu'il est possible de rétablir le caractère mutualiste de ce régime et de garantir plus d'équité dans les règles d'accès et d'indemnisation, tout en assurant un meilleur équilibre économique.

Le Gouvernement, face à la montée des protestations, a nommé un médiateur qui doit rendre son rapport la semaine prochaine, nous a-t-on dit,… (Exclamations.)


M. Roger Karoutchi. Vous n'avez pas écouté !


M. Thierry Foucaud. … non, cet après-midi, excusez-moi !


M. Alain Fouché. Il faut remettre de l'ordre dans les services publics qui emploient des intermittents !


M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Et privés !


M. Thierry Foucaud. Sans anticiper sur ses conclusions, je vous le dis, il est illusoire d'envisager de mettre fin à ce conflit sans renoncer à cet accord injuste : son fondement est mauvais, il ne peut donc être ni aménagé ni retardé, il doit être refondé ! Il faut de véritables négociations, qui envisagent, cette fois, l'ensemble des propositions de substitution formulées, sans exclusive ni parti pris.

Le ministre du travail signait, le 9 mars dernier, une tribune dans laquelle, comme nous le faisons aujourd'hui, il dénonçait les conditions dans lesquelles ces négociations avaient lieu et appelait à une nouvelle réforme. Vous venez également de le faire à l'instant, madame la ministre, mais vous avez aujourd'hui le pouvoir de réaliser cette réforme. Je vous le demande donc : allez-vous enfin renoncer à l'agrément de cet accord ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe écologiste.)

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Réponse du Ministère de la culture et de la communication publiée le 20/06/2014

Réponse apportée en séance publique le 19/06/2014

Mme Aurélie Filippetti,ministre de la culture et de la communication. Monsieur le sénateur, je connais votre attachement, comme celui de tous les parlementaires, à la situation des artistes et des techniciens de ce pays.

Je veux redire que ces artistes et ces techniciens, que l'on appelle intermittents, sont des hommes et des femmes qui travaillent pour faire vivre la culture sur tous nos territoires. Ils ne sont pas des privilégiés ! Au contraire, leurs conditions de vie et de travail sont extrêmement spécifiques, et ils sont exposés à une forte précarité, qui s'est encore accrue.

Depuis dix ans, d'innombrables travaux ont été menés sur cette question, qu'il s'agisse des travaux de ceux du comité de suivi, des missions parlementaires - notamment le rapport de Maryvonne Blondin au Sénat ou celui de Jean-Patrick Gille et Christian Kert à l'Assemblée nationale -, ou des propositions du SYNDEAC, le Syndicat des entreprises artistiques et culturelles.

Nous disposons donc tous d'un corpus de mesures et de réflexions, pour rebâtir enfin un système qui accorde une véritable sécurité professionnelle à ces artistes et à ces techniciens, tout en préservant bien sûr la vitalité du tissu créatif en France.

Jean-Patrick Gille, dans sa mission de médiation, a rencontré tous les acteurs de la négociation. Le rapport qu'il va rendre cet après-midi même, et non pas la semaine prochaine, a été nourri de son expérience, mais aussi de tous les travaux qui l'ont précédé. Ce travail sera suivi d'annonces du Premier ministre qui viseront un double objectif : sortir de la crise où nous nous trouvons et préserver la vie de nos festivals.

En effet, nous ne voulons pas que le silence, la mort et la tristesse règnent cet été dans les rues de nos villes, qu'il s'agisse d'Avignon, d'Aix-en-Provence, d'Aurillac ou de Marciac, car on trouve des festivals formidables partout en France.

Le but de ce rapport est de sortir de la crise, mais aussi de refonder profondément un système qui soit plus juste et plus équitable, pour protéger de la précarité les artistes et les techniciens du spectacle et de l'audiovisuel. C'est absolument indispensable ! Il n'est pas normal que ce genre de crise revienne régulièrement et que nous ne puissions pas trouver collectivement de solution.

M. Roland Courteau. Exactement !

Mme Aurélie Filippetti,ministre.Nous le savons, nous avons tous besoin d'un régime spécifique d'indemnisation du chômage pour les artistes et pour les techniciens. Il nous reste à bâtir ensemble une méthode qui permette d'y arriver.

Comme l'a dit le Premier ministre, une grande réforme est nécessaire, et le Gouvernement prend évidemment toutes ses responsabilités pour que chacun retrouve sa place autour de la table des négociations, afin de dégager une solution commune.(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du groupe écologiste.)

M. Didier Guillaume. Très bien !

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