Question de M. MARIE Didier (Seine-Maritime - SOC) publiée le 12/06/2014
M. Didier Marie attire l'attention de Mme la secrétaire d'État, auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie sur les difficultés rencontrées par les associations d'aides à domicile.
L'État a confié aux départements la charge de financer les prestations sociales, correspondant aux risques de dépendance, à savoir, en 2002 l'allocation personnalisée d'autonomie (APA), puis, en 2006, la prestation de compensation du handicap (PECH).
Le conseil général de la Seine-Maritime aide, dans le cadre de l'APA, 28 000 personnes, pour un budget supérieur à 120 millions d'euros en 2013, et le taux de bénéficiaires d'une allocation personnalisée d'autonomie en Seine-Maritime est bien supérieur à la moyenne nationale (soit 251,4 pour 1 000 habitants de plus de 75 ans, contre 208,1 au niveau national).
Malgré cet important effort, plusieurs associations connaissent des difficultés financières, l'une d'elle a été placée en liquidation judiciaire et ce sont plus de 450 salariés qui voient leur emploi menacé. D'autres associations mettent en œuvre des plans de sauvegarde de l'emploi. Les causes de ces difficultés sont multiples: d'abord, le dispositif de l'APA est arrivé à saturation, un grand nombre de bénéficiaires étant concernés par le plafonnement national des plans d'aides, insuffisamment revalorisés ; ensuite, la concurrence accrue du secteur commercial de l'aide à domicile place les associations dans un univers concurrentiel ; enfin, la convention collective de la branche, en date du 1er janvier 2012, est une véritable avancée pour les salariés et constitue un progrès indéniable mais, ne s'appliquant qu'aux seules associations, elle a créé une distorsion importante et inacceptable au bénéfice du secteur commercial.
Le département examine aujourd'hui les possibilités d'augmenter encore sa participation mais ne peut, à lui seul, régler tous les problèmes de ces structures.
Par exemple, les associations d'aides à domicile de l'aide familiale populaire (AAFP) et de l'aide à domicile en milieu rural (ADMR) de Seine-Maritime effectuent, par an, quelque 1 320 000 heures d'intervention, pour près de 6 583 bénéficiaires dans le cadre de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) et de la prestation de compensation du handicap (PCH). Elles ont demandé au département une subvention d'équilibre et une urgente revalorisation des aides pour l'année en cours. Au total, ce sont 2 710 emplois qui seront menacés à moyen terme sur le département.
Aussi lui demande-t-il, d'une part, dans quels délais le projet de loi d'orientation et de programmation pour l'adaptation de la société au vieillissement sera présenté au Parlement et, d'autre part, dans quelles conditions il est possible d'harmoniser les conventions collectives qui doivent s'imposer à tous les acteurs.
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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale publiée le 09/07/2014
Réponse apportée en séance publique le 08/07/2014
M. Didier Marie. Je souhaite attirer l'attention du Gouvernement sur les difficultés rencontrées par les associations d'aide à domicile.
L'État a confié aux départements la charge de financer les prestations sociales correspondant aux risques de dépendance, à savoir, en 2002, l'allocation personnalisée d'autonomie, ou APA, puis, en 2006, la prestation de compensation du handicap.
Le département de la Seine-Maritime voit, depuis plusieurs années, le nombre de personnes concernées par ces prestations croître très régulièrement. Aujourd'hui, le taux de bénéficiaires d'une allocation personnalisée d'autonomie y est bien supérieur à la moyenne nationale, avec 251,4 bénéficiaires pour 1 000 habitants de plus de 75 ans, contre 208,1 au niveau national. Le conseil général accompagne ainsi 28 000 personnes, pour un budget supérieur à 120 millions d'euros. Parmi les quatre-vingt-dix services d'aide à domicile, les associations assurent les trois quarts des interventions au titre de l'APA et sont, de ce fait, les principaux employeurs des 13 000 salariés du secteur.
Comme dans de nombreux départements, plusieurs de ces associations sont en très grande difficulté. Ainsi, l'une d'elles vient d'être placée en liquidation judiciaire, 450 emplois étant menacés. D'autres associations mettent en uvre des plans de sauvegarde de l'emploi. Parmi celles-ci, l'aide familiale populaire et l'aide à domicile en milieu rural effectuent, chaque année, 1 320 000 heures d'intervention, pour près de 6 580 bénéficiaires, et comptent 2 710 salariés. Ces associations viennent de lancer un SOS au conseil général, qui leur a répondu en adoptant une revalorisation du taux de prise en charge de 38 centimes par heure d'intervention dans le cadre du budget de 2014, ce qui représente une dépense supplémentaire de 2 millions d'euros par an.
La mobilisation du conseil général auprès de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie a abouti au versement d'une aide exceptionnelle de 1,3 million d'euros, et une nouvelle aide de 810 000 euros est attendue par la région. Par ailleurs, le département a approuvé, il y a quelques mois, son schéma départemental d'autonomie, qui vise notamment à contribuer à la structuration, à la modernisation et à la professionnalisation du secteur.
Cependant, le département ne peut régler seul tous les problèmes, et les raisons des difficultés des associations demeurent. On peut citer la saturation du dispositif de l'APA, un grand nombre de bénéficiaires de cette allocation atteignant le plafond fixé dans les plans d'aide, aujourd'hui insuffisamment revalorisés. On peut également citer le développement, à la suite de l'entrée en vigueur de la loi du 6 juillet 2005, de l'offre de services du secteur commercial, qui a projeté les associations dans un univers concurrentiel. Enfin, si elle constitue une véritable avancée pour les salariés, la convention collective de la branche, entrée en vigueur le 1er janvier 2012, ne s'applique qu'aux seules associations, créant ainsi une distorsion de concurrence importante et inacceptable au bénéfice du secteur commercial.
Ces deux dernières causes ont entraîné, en Seine-Maritime, un transfert d'activité représentant près de 1 million d'euros de recettes depuis le secteur associatif non lucratif vers le secteur commercial.
Le Gouvernement a annoncé que le projet de loi relatif à l'adaptation de la société au vieillissement serait soumis prochainement au Parlement. Monsieur le secrétaire d'État, pouvez-vous me préciser le calendrier de cet examen ? En outre, le Gouvernement envisage-t-il d'étendre au secteur marchand toutes les dispositions qui s'imposent désormais aux associations d'aide à domicile ? Enfin, pouvez-vous me confirmer qu'une enveloppe supplémentaire de 810 000 euros sera attribuée à la région et m'indiquer si elle sera prioritairement fléchée vers les associations les plus en difficulté, que j'ai précédemment citées ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation, de la réforme de l'État et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale. Monsieur le sénateur, je vous prie, tout d'abord, de bien vouloir excuser Mme la secrétaire d'État chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie, retenue par d'autres obligations.
La situation des services d'aide à domicile intervenant auprès des publics fragiles est un dossier prioritaire pour le Gouvernement, qui a d'ores et déjà mobilisé 130 millions d'euros, de 2012 à 2014, pour soutenir ce secteur dans le cadre du Fonds de restructuration des services d'aide à domicile, dont 1,2 million d'euros pour le département de la Seine-Maritime, sans compter les 810 000 euros de l'enveloppe complémentaire prévue en 2014 pour la région Haute-Normandie. L'attribution départementale par le biais des agences régionales de santé est en cours.
Il convient désormais de construire des réponses pérennes, notamment au travers du projet de loi relatif à l'adaptation de la société au vieillissement.
Ce texte d'orientation et de programmation, qui a fait l'objet d'une large concertation avec l'ensemble des acteurs, vise à mobiliser la société autour des enjeux du vieillissement, de la prévention et de la prise en charge de la perte d'autonomie, en s'attachant à répondre à l'attente de nos concitoyens, à savoir, pour résumer, vivre le plus longtemps possible et dans les meilleures conditions à domicile.
Le projet de loi repose sur trois piliers : anticiper le vieillissement, adapter la société et accompagner la perte d'autonomie.
En ce qui concerne le financement, dans le contexte budgétaire difficile que connaît notre pays, la mise en uvre de cette loi va mobiliser 645 millions d'euros, au travers de la contribution additionnelle de solidarité pour l'autonomie, la CASA.
Le volet « anticipation et prévention » sera doté d'une enveloppe de 185 millions d'euros. Le volet « accompagnement » est, quant à lui, doté de 460 millions d'euros, dont 375 millions d'euros pour la revalorisation de l'APA à domicile, qui est une mesure phare, sans oublier les 78 millions d'euros consacrés au droit au répit pour les aidants. Pendant la phase de montée en charge, 84 millions d'euros seront dégagés pour financer le volet « adaptation » de la loi, notamment pour l'aménagement des logements. Ainsi, la CASA sera bien affectée à 100 % à la mise en application de cette loi, dès son entrée en vigueur.
Le Gouvernement est en effet déterminé à aller vite : le texte a été adopté en conseil des ministres le 3 juin 2014 ; les travaux de la commission des affaires sociales ont débuté dans la foulée et une première lecture à l'Assemblée nationale pourrait avoir lieu à la rentrée.
Ce projet de loi apporte des réponses concrètes aux gestionnaires de services à domicile.
Au travers notamment de la réforme importante de l'APA à domicile, l'accessibilité financière des prestations sera largement améliorée : plus d'heures seront assurées, avec des plans d'aides diversifiés et une participation financière des usagers réduite. L'ensemble des bénéficiaires en profitera, l'effort étant accentué pour les personnes en perte d'autonomie importante et les foyers aux revenus modestes. En résumé, ce texte apportera une meilleure réponse aux attentes et aux besoins des personnes et plus de justice sociale.
Toutefois, si une meilleure solvabilisation des personnes aidées permettra de développer l'activité, elle ne résoudra pas toutes les difficultés des services d'aide à domicile que vous avez évoquées, monsieur le sénateur. Il sera nécessaire d'aller plus loin pour restructurer, moderniser et professionnaliser ces services, qui sont des maillons essentiels du dispositif de maintien à domicile.
Concernant l'harmonisation des conventions collectives du secteur, un grand pas a été franchi avec la signature, le 21 mai 2010, de la convention collective nationale de la branche de l'aide, de l'accompagnement, des soins et des services à domicile, cela après dix ans de négociations. Cette convention, qui est entrée en vigueur le 1er janvier 2012, remplace quatre textes : la convention collective nationale de l'UNADMR, l'Union nationale des associations d'aide à domicile en milieu rural, la convention collective des organismes d'aide ou de maintien à domicile, la convention collective nationale concernant les personnels des organismes de travailleuses familiales et les accords collectifs UNACCSS -Union nationale des associations coordinatrices de soins et santé. Cette convention collective, majoritaire dans le secteur privé non lucratif, regroupe 220 000 salariés.
Le secteur privé lucratif a également avancé, avec la signature, le 3 avril 2014, d'un arrêté portant extension de la convention collective nationale des entreprises de services à la personne, qui a été publié le 30 avril 2014. Les entreprises ont jusqu'au 1er novembre 2014 pour se mettre en conformité avec ce texte.
Le mouvement d'harmonisation des cadres d'emploi du secteur du domicile est, vous le voyez, notable. La nécessaire poursuite de cette tendance dépend des négociations entre les partenaires sociaux, dont le Gouvernement ne doute pas qu'elle sera fructueuse.
M. le président. La parole est à M. Didier Marie.
M. Didier Marie. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'État, de votre réponse et de l'intérêt que le Gouvernement porte aux associations d'aide à domicile, ainsi qu'aux personnes âgées et handicapées qui bénéficient de leurs prestations.
Mme la secrétaire d'État chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie, Laurence Rossignol, qui a annoncé un plan d'action pour le secteur de l'aide à domicile en septembre prochain, a promis « des avancées structurelles, des simplifications, une meilleure régulation de l'offre et une intégration des services à domicile, afin de mieux évaluer le juste coût des prestations nécessitant un plus juste financement ». Nous serons bien évidemment très attentifs à cette refondation.
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