Question de Mme CONWAY-MOURET Hélène (Français établis hors de France - SOC) publiée le 13/11/2014
Mme Hélène Conway-Mouret attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes sur le rôle joué par les infirmiers anesthésistes diplômés d'État (IADE) dans la sécurité anesthésique des patients. Le drame survenu à la maternité d'Orthez, à la fin de septembre 2014, soulève la question de la sécurité du patient en cas de complications ou dans les très rares cas de défaillance personnelle, en particulier lorsque le médecin anesthésiste-réanimateur (MAR) est seul au bloc opératoire. En France, en effet, la sécurité anesthésique repose sur le binôme MAR / IADE, l'infirmier spécialisé étant en mesure, le cas échéant, d'accomplir les gestes techniques du médecin anesthésiste, notamment en cas de défaillance (malaise) de celui-ci. Si la société française d'anesthésie et de réanimation (SFAR) préconise de procéder à une anesthésie à quatre mains, aucune obligation réglementaire ne l'impose et, en pratique, le nombre d'infirmiers spécialisés en anesthésie-réanimation par établissement est très disparate. On dénombre environ 8 000 IADE sur notre territoire (soit un pour deux médecins anesthésistes) dont seulement 1 500 dans les établissements privés qui font, pourtant, de la chirurgie de plus en plus complexe. Sans obligations autres que les recommandations de la SFAR pour ce qui est de la présence du « tandem » MAR / IADE au bloc opératoire ou en salle de surveillance post-interventionnelle, le risque que les structures privées qui reposent sur la rentabilité des actes se privent de la présence d'un IADE est bien réel. En conséquence, elle lui demande s'il est envisagé de rendre obligatoire la présence d'un infirmier anesthésiste dans certaines spécialités, telles que l'obstétrique et la chirurgie pédiatrique, dans lesquelles l'anesthésie est à haut risque. Elle souhaiterait également savoir s'il est envisagé de former davantage d'infirmiers anesthésistes pour faire progresser la sécurité des patients et préparer les nombreux départs à la retraite de ces personnels attendus dans les cinq années à venir.
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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargé des droits des femmes publiée le 17/12/2014
Réponse apportée en séance publique le 16/12/2014
Mme Hélène Conway-Mouret. Madame la secrétaire d'État, le décès d'une jeune femme survenu à la maternité d'Orthez en septembre dernier après un accouchement par césarienne sous anesthésie générale a éveillé en nous deux préoccupations : celle de la sécurité des patients et celle de la mortalité maternelle, qui est encore trop élevée dans notre pays.
En France, en effet, la mortalité maternelle s'élève à 9,6 pour 100 000 femmes, dont 46 % de morts « évitables » selon le rapport du comité national d'experts sur la mortalité maternelle paru en 2013. L'hémorragie du post-partum reste la première cause de mortalité maternelle, domaine dans lequel la France est, hélas ! mal classée en comparaison avec ses voisins européens.
La sécurité anesthésique repose en France sur le binôme formé par un médecin anesthésiste-réanimateur et un infirmier anesthésiste diplômé d'État. Si la décision médicale ne relève que du seul médecin, le travail en tandem permet le cas échéant à l'infirmier spécialisé d'accomplir les gestes techniques, notamment en cas de défaillance du médecin, par exemple lors d'un malaise.
La question de la sécurité anesthésique ne se pose d'ailleurs pas que dans les cas de défaillance personnelle du médecin - fort heureusement très rares -, mais, de façon générale, lorsque les interventions chirurgicales portent sur des patients à risques comme les femmes enceintes et les enfants.
Si la société française d'anesthésie et de réanimation, la SFAR, préconise de procéder à une anesthésie « à quatre mains », aucune obligation réglementaire ne l'impose, et, en pratique, le nombre d'infirmiers spécialisés par établissement est très variable. On dénombre environ 8 000 infirmiers anesthésistes diplômés d'État sur notre territoire, soit un pour deux médecins anesthésistes, dont seulement 1 500 dans les établissements privés, qui pratiquent pourtant une chirurgie de plus en plus complexe.
Sans autres obligations que les recommandations de la SFAR en matière de surveillance des patients sous sédation, que ce soit au bloc opératoire ou en salle de surveillance post-interventionnelle, le risque de voir les structures privées renoncer aux services d'un infirmier anesthésiste par souci d'économie est bien réel.
Dans le secteur obstétrical, l'infirmier anesthésiste a pourtant un rôle important dans l'équipe en matière de prise en charge des complications et des hémorragies dupost-partum. De surcroît, l'anesthésie pour césarienne des femmes enceintes est toujours à haut risque.
Madame la secrétaire d'État, ma question est donc double.
Premièrement, ne faut-il pas rendre obligatoire, au moins en obstétrique, la présence au bloc opératoire d'un infirmier anesthésiste au côté du médecin anesthésiste, à la fois dans le secteur public et dans le secteur privé ?
Deuxièmement, comment préparez-vous les départs massifs à la retraite qui sont attendus dans les cinq ans à venir et qui concerneraient 25 % des infirmiers anesthésistes ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Pascale Boistard,secrétaire d'État chargée des droits des femmes, auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes. Madame la sénatrice, en France, la responsabilité des anesthésies est confiée au médecin anesthésiste-réanimateur, qui peut être assisté par un infirmier anesthésiste pour la réalisation des actes et la surveillance du patient.
L'infirmier anesthésiste agit après que le médecin anesthésiste-réanimateur a examiné le patient et à condition que ce dernier puisse intervenir à tout moment.
Ainsi, même si la réglementation actuelle ne prévoit pas la présence systématique, au cours d'une intervention chirurgicale, d'un second professionnel compétent dans le domaine de l'anesthésie, l'existence d'infirmiers formés et spécialisés favorise le travail en équipe dans le domaine de l'anesthésie.
En effet, en fonction de la modalité d'anesthésie retenue, de l'état de santé du patient, du type de chirurgie pratiquée et de ses risques ou même de circonstances spécifiques, telles que l'anesthésie en urgence ou pédiatrique, la présence d'un second professionnel spécialisé auprès du médecin anesthésiste-réanimateur est raisonnable et justifiée.
Ces recommandations sont déjà mises en application dans les services d'anesthésie d'un grand nombre d'établissements. C'est en fonction de l'organisation des établissements que les conditions de fonctionnement de l'anesthésie-réanimation doivent être établies.
Cette approche doit conduire à agir de façon proportionnée selon le risque présenté par chaque activité de soins et ne se prête pas à la création d'une norme générale.
Les capacités d'accueil des écoles d'infirmiers anesthésistes sont actuellement fixées au niveau régional par les conseils régionaux, dans le cadre des schémas des formations sanitaires et sociales. Elles sont déterminées en lien avec les ARS, les agences régionales de santé, en fonction des besoins en professionnels sur les territoires de santé, notamment au regard des aspects démographiques.
Enfin, je précise qu'une enquête est en cours pour déterminer les circonstances de la tragédie survenue à la maternité d'Orthez.
M. le président. La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret.
Mme Hélène Conway-Mouret. Madame la secrétaire d'État, je me réjouis bien sûr de l'enquête en cours.
J'aurais néanmoins aimé vous entendre évoquer la possibilité de rendre obligatoires les recommandations de la SFAR. Notre pays est en pointe dans un grand nombre de secteurs médicaux et possède tous les atouts pour éviter les drames ; il serait donc à mon avis souhaitable de réaliser un effort en matière de prévention.
S'agissant du remplacement des infirmiers anesthésistes qui partiront massivement à la retraite, je regrette de n'avoir pas entendu une réponse précise de votre part, madame la secrétaire d'État.
Mme Pascale Boistard,secrétaire d'État. C'est aux régions d'apporter une réponse précise !
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