Question de M. LABBÉ Joël (Morbihan - ECOLO) publiée le 11/12/2014
M. Joël Labbé attire l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social sur la problématique des indemnités de temps de trajet dans le secteur du bâtiment. Ce régime des temps de trajet, défini par la convention collective nationale des ouvriers employés par les entreprises du bâtiment non visées par le décret du 1er mars 1962, du 8 octobre 1990, prévoit le versement par les entreprises d'une indemnité de trajet dédommageant le salarié du temps passé pour aller et revenir des chantiers, lorsque ce temps est réalisé en dehors des temps de travail applicables dans l'entreprise. Or, dans un nombre important d'entreprises, les ouvriers effectuent le temps de trajet quotidien, non en dehors des horaires de travail de l'entreprise, mais dans les horaires de travail de l'entreprise. Ce temps de trajet est alors rémunéré comme temps de travail, c'est-à-dire par du salaire, bien que le coût pour l'entreprise en soit plus important. Le 6 mai 1998 (pourvoi n° 94-40496), la Cour de cassation a rendu une décision qui pénalise financièrement les entreprises qui sont dans cette configuration, confirmée depuis par la jurisprudence : les salariés qui effectuent les temps de trajet quotidien sur leurs heures de travail doivent, en plus d'être rémunérés en temps de travail au titre de cette période, percevoir quand même l'indemnité de trajet. Compte-tenu de la situation conjoncturelle préoccupante du secteur du bâtiment et des problèmes de trésorerie de bon nombre d'entreprises, il lui demande quelles mesures le Gouvernement entend-il mettre en œuvre pour remédier à cette situation et pour exonérer les entreprises du versement de l'indemnité de trajet lorsque le temps de trajet est déjà rémunéré sur le temps de travail.
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Réponse du Ministère du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social publiée le 11/06/2015
La durée du travail effectif est définie à l'article L. 3121-1 du code du travail comme « le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ». Le temps de trajet entre deux lieux de travail (entre l'entreprise et le chantier ou entre deux chantiers) constitue du temps de travail effectif. La Cour de cassation considère, ainsi que le temps de transport des salariés entre l'entreprise et le chantier doit être considéré comme un temps de travail effectif, dès lors que le salarié doit se rendre dans l'entreprise avant d'être transporté sur le chantier (Cass. soc. , 31 mars 1993, no 89-40.865 ; Cass. soc. , 16 juin 2004, no 02-43.685). Dans ce cas, en effet, les salariés se trouvent à la disposition de l'employeur et ne peuvent vaquer à des occupations personnelles. Ce temps doit être rémunéré comme du temps de travail effectif et ne peut être considéré comme rémunéré ni par l'indemnité de transport, ni par l'indemnité de trajet prévues par la convention collective. Le régime institué par la convention collective nationale des ouvriers du bâtiment du 8 octobre 1990, prévoit l'attribution d'une indemnité de trajet qui a pour objet d'indemniser la sujétion que représente pour l'ouvrier la nécessité de se rendre quotidiennement sur le chantier et d'en revenir. Cette indemnité n'est pas due lorsque l'ouvrier est logé gratuitement par l'entreprise sur le chantier et à proximité immédiate du chantier. Compte tenu de son caractère forfaitaire, le juge judiciaire considère que cette indemnité ayant pour objet d'indemniser une sujétion pour le salarié, obligé chaque jour de se rendre sur le chantier et d'en revenir, est due indépendamment de la rémunération par l'employeur du temps de trajet inclus dans l'horaire de travail et du moyen de transport utilisé (Cass. soc. , 6 mai 1998, no 94-40.496). Le cumul de cette indemnité avec la rémunération du temps de trajet est en outre très claire dans la convention collective des ouvriers du bâtiment du 8 octobre 1990, que les partenaires sociaux n'ont pas souhaité réviser. Dans ces conditions, seule une adaptation de cette convention collective par les partenaires sociaux serait de nature à faire évoluer cette régle.
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