Question de M. ABATE Patrick (Moselle - Communiste républicain et citoyen) publiée le 28/01/2016
M. Patrick Abate indique à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes que le régime local d'assurance maladie est avantageux pour les presque trois millions de personnes qu'il couvre. Toutefois, son avenir est, aujourd'hui, fragilisé, en raison de l'application de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l'emploi et de la généralisation des assurances complémentaires, du fait d'un problème d'articulation entre les deux dispositifs.
Il lui demande si elle croit possible et si elle entend introduire une cotisation « employeur » au régime local, pour respecter le principe d'égalité de participation des employeurs et des salariés et, ainsi, intégrer la totalité du « panier de soins » minimum prévu par la loi, comme le prévoit une préconisation de la commission d'harmonisation du droit local d'Alsace-Moselle de 2013.
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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère des affaires sociales et de la santé, chargé des personnes âgées et de l'autonomie publiée le 11/05/2016
Réponse apportée en séance publique le 10/05/2016
M. Daniel Chasseing. Madame la secrétaire d'État, comme j'ai déjà eu l'occasion de l'exprimer, notamment dans cet hémicycle, le numerus clausus régissant l'effectif des médecins en France me paraît aujourd'hui obsolète.
M. Loïc Hervé. Eh oui !
M. Daniel Chasseing. D'ailleurs, nous sommes de plus en plus nombreux à le constater, dans toutes les familles politiques.
À l'heure où la génération née après la guerre part en retraite, si nous ne faisons rien, les médecins ne seront bientôt plus assez nombreux, surtout dans les zones très rurales, au risque d'aggraver le phénomène de désertification sanitaire, mais aussi dans certaines villes et certaines banlieues, où les praticiens hésitent à s'installer.
Il est toujours possible, naturellement, d'importer des médecins étrangers - cette pratique existe -, mais ceux-ci ne restent pas toujours. Au demeurant, pourquoi écarter nombre de jeunes Français des facultés de médecine de notre pays, les conduisant ainsi à aller étudier ailleurs, en Roumanie notamment, si c'est pour faire venir, ensuite, des médecins de l'étranger ? Cette situation absurde dure pourtant depuis des décennies.
Le Gouvernement a décidé d'augmenter le numerus clausus dans quelques régions, dont la mienne, le Limousin. Cette mesure va dans le bon sens, mais est insuffisante.
Je ne parle évidemment pas des médecins spécialistes - et pourtant, il en manque ! Mon propos porte uniquement sur les médecins généralistes exerçant dans les zones sous-dotées, dont la formation pourrait être spécifiquement adaptée à ces territoires.
Ces médecins pourraient être recrutés parmi les étudiants ayant échoué de peu au concours, à leur première ou seconde tentative, mais ayant obtenu des notes au-dessus de la moyenne. Ils seraient ainsi repêchés, à la condition de s'engager à exercer la médecine générale dans des zones fléchées par les agences régionales de santé, les ARS, pour une période qui pourrait être d'environ dix ans.
Il est incontestable que les territoires concernés auront besoin de médecins aux compétences multiples : prévention, soins, accompagnement...
J'entends dire ici ou là que la présence d'infirmières pourra suffire, par exemple pour renouveler les ordonnances. Rien n'est plus faux : être médecin ou être infirmière, ce n'est pas la même chose ! Les ordonnances ne doivent pas faire l'objet d'un renouvellement systématique, sans auscultation sérieuse ni réflexion d'un praticien. Il est toujours possible qu'une maladie évolue ou qu'une intolérance médicamenteuse ou une nouvelle pathologie se déclare.
Les médecins généralistes ont également un rôle décisif à jouer, dans les territoires éloignés des hôpitaux, en matière d'urgences.
Pour toutes ces raisons, et parce qu'une telle mesure relève du domaine réglementaire, je souhaite savoir, madame la secrétaire d'État, s'il peut être envisagé de procéder rapidement à une augmentation de 10 % du numerus clausus à l'échelle nationale, en calculant au préalable - c'est tout à fait possible - les besoins des territoires en médecine générale, en concertation avec les facultés de médecine, afin d'adapter au mieux les formations.
Cette évolution a été suggérée par mon confrère et collègue député Gérard Bapt ; j'y adhère totalement.
Elle permettrait de garantir une représentation médicale suffisante sur l'ensemble du territoire de la République.
MM. Michel Canevet et Loïc Hervé. Très bien ! (MM. Michel Canevet et Loïc Hervé applaudissent vivement.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie. Monsieur le sénateur, améliorer l'accès aux soins de tous les Français et réduire les inégalités entre les territoires sont des objectifs prioritaires du Gouvernement. En atteste le pacte territoire-santé, lancé par Marisol Touraine dès la fin de l'année 2012.
Trois ans plus tard, nous constatons que le pacte a impulsé une dynamique nouvelle dans les territoires confrontés à des difficultés démographiques. Il mobilise un ensemble de leviers, de la formation aux conditions d'exercice, pour attirer, en particulier, de jeunes médecins sur des territoires manquant de professionnels.
Afin d'amplifier cette dynamique, Marisol Touraine a annoncé, à la fin de l'année 2015, le lancement d'un « pacte territoire-santé 2 », enrichi de mesures innovantes.
Ainsi, nous avons fait le choix d'augmenter le nombre de médecins qui pourront être formés dans dix universités, situées dans des régions où la densité médicale est la plus faible.
En effet, nous savons que l'augmentation du numerus clausus national ne permet pas de répartir la hausse des étudiants de façon égale sur le territoire. J'en veux pour preuve que, entre 2004 et 2008, la densité médicale a continué de faiblir dans certaines zones, alors que le numerus clausus a doublé.
C'est pourquoi Marisol Touraine a voulu réserver à certaines régions le bénéfice de la nouvelle hausse du numerus clausus.
M. Yannick Vaugrenard. Très juste !
M. Martial Bourquin. Oui !
Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État. Par ailleurs, cette augmentation est liée à un programme de fidélisation des étudiants dans ces territoires en tension.
Dans le cadre de la grande conférence de la santé, le Premier ministre a annoncé que cette adaptation régionale du numerus clausus serait étendue à la prochaine rentrée universitaire, en tenant compte des besoins en professionnels et des capacités de formation.
Le nouveau volet du pacte territoire-santé a également permis de développer les stages des futurs médecins en cabinet de médecine générale, car, pour attirer les jeunes vers la médecine libérale, il est essentiel de les former dans des conditions réelles d'exercice.
Monsieur le sénateur, c'est un ensemble de mesures pragmatiques, incitatives, s'appuyant sur la mobilisation de tous les acteurs, qui nous permettront d'assurer l'égalité de tous les Français dans l'accès aux soins et de lutter contre la désertification médicale.
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse.
Le maintien de la vie dans les territoires ruraux ne se fera pas sans médecins. Beaucoup de retraités choisissent de s'installer dans ces territoires, ce qui compense la dépopulation agricole, notamment dans les zones d'élevage. Mais, s'il n'y a plus de médecins, ils ne viendront pas !
Madame la secrétaire d'État, je n'ai pas dit que rien n'était fait. Cependant, il faut cibler les territoires, ainsi que vous l'avez vous-même indiqué.
Des aides sont effectivement mises en place, mais le numerus clausus me semble encore trop restrictif.
Alors que 70 % des étudiants en médecine sont des étudiantes, on constate que tous les jeunes médecins, y compris les hommes - je ne voudrais pas paraître sexiste... (Sourires.) -, aspirent désormais à des horaires plus réguliers. Ils ne veulent plus travailler soixante heures par semaine !
Dans ces conditions, à défaut d'une augmentation du numerus clausus, le territoire de la République ne pourra être entièrement couvert. Je renouvelle donc ma demande en ce sens.
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