Question de M. KALTENBACH Philippe (Hauts-de-Seine - Socialiste et républicain) publiée le 04/02/2016
M. Philippe Kaltenbach demande à Mme la ministre de la décentralisation et de la fonction publique si le Gouvernement est favorable à l'intégration des départements de Paris, des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne au sein de la métropole du Grand-Paris et, si oui, à quelle échéance et dans quelles conditions. Avec comme objectif de garantir une gouvernance plus solidaire et plus cohérente à Paris et dans sa proche banlieue, la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République a concrétisé un projet de métropole ambitieux au sein de la zone la plus dense de l'Île-de-France. Ainsi, le 1er janvier 2016, un établissement public de coopération intercommunale inscrit sur le périmètre de Paris, des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne, s'est-il substitué aux intercommunalités existantes. À même de répondre plus efficacement aux attentes des habitants et aux déséquilibres des territoires, la métropole du Grand-Paris a pour ambition de proposer une meilleure coordination des politiques publiques locales au sein de la capitale et des départements de la petite couronne parisienne. Or, la conjugaison sur le territoire de la métropole de quatre politiques départementales distinctes est de nature à contrarier la réalisation de cet objectif. De plus, la création d'un échelon supplémentaire complexifie l'architecture territoriale. Aussi, la question de la suppression d'un échelon se pose-t-elle et passe par la suppression de l'échelon départemental sur le territoire de la métropole du Grand-Paris. En effet, l'objectif poursuivi de rationalisation des politiques publiques locales ne paraît pas compatible avec le maintien, sur le territoire de la future métropole, de quatre politiques départementales distinctes et de cinq échelons : communes, établissements publics territoriaux (EPT), département, métropole, région. Dès janvier 2014, M. Jean-Marc Ayrault, alors Premier ministre, s'est prononcé en faveur de la suppression des départements sur le territoire de la métropole du Grand-Paris. De la même manière, Manuel Valls, en octobre de la même année, a considéré l'intégration des départements dans la métropole du Grand-Paris, comme « une évidence ». Une telle évolution - qui semble de bon sens et qui a été largement évoquée lors des débats sur la loi du 7 août 2015 mais sans trouver de concrétisation législative - suscite néanmoins des résistances. Certains élus veulent conserver leurs sièges et leurs pouvoirs. La péréquation nécessaire entre les départements fait peur à certains, qui désirent conserver leurs recettes liées à l'activité économique (activité qui n'est pourtant possible que grâce au travail de nombreux salariés ne vivant pas dans leur département) et demeurer dans « l'entre-soi ». Les présidents des conseils départementaux des Yvelines et des Hauts-de-Seine ont annoncé la fusion de leurs départements. Si celle-ci devait aboutir, elle compromettrait la métropole du Grand-Paris et n'offrirait aucune perspective, ni pour la population de ces départements, ni pour les habitants de la métropole.
Il convient de ne pas céder aux intérêts particuliers mais de privilégier les intérêts de tous les habitants de la métropole du Grand-Paris. Nos concitoyens attendent aujourd'hui des initiatives fortes de la part du Gouvernement et de la représentation nationale. La création de la métropole du Grand-Paris est une première étape. La suppression de l'échelon départemental sur son territoire, doit être la prochaine. Elle viendra ainsi parfaire cette réforme déjà très ambitieuse. Il ne saurait être question du simple rajout d'un échelon supplémentaire de décision en Île-de-France. Que ce soit en termes d'efficacité, de cohérence ou de coût, il lui demande si la création d'une métropole à Paris peut se faire sans la disparition des départements présents sur le territoire sur lequel elle s'inscrit.
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Transmise au Ministère de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales
Réponse du Ministère de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales publiée le 11/05/2016
Réponse apportée en séance publique le 10/05/2016
M. Philippe Kaltenbach. Monsieur le ministre, ma question concerne la métropole du Grand Paris. Je souhaite vous interroger sur la perspective de la fusion des quatre départements au sein de cette métropole - Paris, les Hauts-de-Seine, le Val-de-Marne et la Seine-Saint-Denis - en vue de la création d'un nouvel établissement.
La loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite « loi NOTRe », a créé la grande métropole de Paris, mais, nous le savons, l'idée sous-jacente était d'aller plus loin dans l'intégration, notamment en faisant disparaître les quatre départements, lesquels seraient fusionnés au sein de cette métropole. Un débat a eu lieu au Sénat : la ministre d'alors nous avait fait part de cette perspective en précisant que les choses n'étaient pas mûres et qu'il fallait encore attendre.
D'ailleurs, les Premiers ministres qui se sont succédé, que ce soit Jean-Marc Ayrault ou Manuel Valls, ont affirmé leur volonté de réaliser la fusion des départements avec les métropoles. À Paris, c'est véritablement, me semble-t-il, une nécessité. On se retrouve aujourd'hui avec cinq échelons territoriaux : la commune, l'établissement public territorial, qui remplace les anciennes intercommunalités, le département, la métropole et la région.
En empilant ces cinq niveaux de responsabilité, on dilue la décision, on crée des coûts supplémentaires, on ne rend pas les décisions lisibles pour les populations. In fine, c'est la qualité du service public local rendu par ces collectivités qui en pâtit.
Aussi, je souhaite connaître la position du Gouvernement sur le rapprochement et la fusion des départements et de la métropole, au sein d'une collectivité dont l'évolution serait un peu à l'image de celle qu'a connue la métropole de Lyon.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, vous évoquez la question de l'intégration du département de Paris ainsi que des départements de la petite couronne parisienne au sein de la métropole du Grand Paris.
L'achèvement de la carte intercommunale est une étape importante pour l'efficacité et la mise en cohérence de l'action publique, mais aussi pour l'attractivité et la cohésion du Grand Paris. Je ne doute pas qu'elle sera également un outil puissant de solidarité. C'est d'ailleurs une nécessité.
La création de la métropole du Grand Paris touche un périmètre regroupant 131 communes et près de 7 millions d'habitants. Elle intervient dans quatre grands domaines de compétences stratégiques : l'aménagement de l'espace métropolitain, la politique locale de l'habitat, le développement économique, ainsi que la protection de l'air et de l'environnement.
Dans son périmètre au 1er janvier 2016, la métropole intègre l'ensemble des communes et des départements de Paris, des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint Denis et du Val-de-Marne, ainsi que des communes de l'Essonne et du Val-d'Oise. Elle est par conséquent la seule métropole dans laquelle des départements sont inclus dans leur totalité.
La constitution de la métropole interroge dès lors l'avenir des quatre conseils départementaux du cur de l'agglomération. L'intégration au sein de la métropole de leurs compétences constituerait l'une des voies permettant de garantir une plus grande solidarité entre les habitants, et de simplifier le dispositif institutionnel, ce qui, dans ce secteur de l'Île-de-France et du Grand Paris, est particulièrement nécessaire.
Cette réforme me semble toutefois prématurée à ce stade. La suppression des départements de la petite couronne parisienne rendrait en effet nécessaire la transformation de la métropole en collectivité à statut particulier et nécessiterait une réforme des règles organisant la composition du conseil métropolitain. Vous suggérez en ce sens, dans votre proposition de loi, d'aligner son statut sur celui de la métropole de Lyon.
Le législateur, tenant compte de l'histoire particulière de l'Île-de-France et du retard de l'intercommunalité dans cette zone, a fait le choix d'organiser une montée en puissance de la métropole, échelonnée sur plusieurs années - contrairement à ce qui s'est fait ailleurs, notamment à Marseille -, avec une prise des compétences liées à l'aménagement et au logement au 1er janvier 2017, la nécessaire définition de l'intérêt métropolitain sur un certain nombre de compétences devant elle intervenir avant le 1er janvier 2018.
Il convient également de rappeler que des dispositions spécifiques sont applicables en matière fiscale aux établissements publics territoriaux jusqu'au 31 décembre 2020.
Ainsi, la question de l'avenir des conseils départementaux inclus dans la métropole du Grand Paris, si légitime soit-elle, ne se posera véritablement qu'à partir du moment où cette métropole aura achevé sa montée en puissance, c'est-à-dire en 2020.
Je crois cependant utile, et vous avez raison d'avoir posé cette question, d'y réfléchir dès maintenant, car cette orientation est davantage de nature à assurer la cohérence de l'action métropolitaine et la solidarité que les hypothèses de rapprochements de départements de l'Ouest francilien.
M. le président. La parole est à M. Philippe Kaltenbach.
M. Philippe Kaltenbach. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse. Je note que vous ouvrez la perspective d'un rapprochement entre les départements et la métropole, même si cela prendra du temps. La loi de 2015 a créé une première étape ; il faudra ensuite gravir les différents échelons.
C'est dans ce sens, d'ailleurs, que le débat avait été conduit en 2015. J'espère contribuer à la réflexion avec une proposition de loi que j'ai déposée, visant à aller dans le sens du modèle lyonnais.
Je l'avoue, j'ai été incité à accélérer le mouvement, car je suis inquiet du projet de fusion des départements des Yvelines et des Hauts-de-Seine. De l'aveu même de leurs présidents, cette perspective n'a qu'un seul objectif, celui de saboter la métropole. J'incite donc le Gouvernement à être vigilant.
On ne peut pas accepter que deux départements qui n'ont pas grand-chose en commun fusionnent simplement pour permettre à leurs élus de conserver leurs pouvoirs et à leurs collectivités de garder leur coffre-fort financier pour éviter de le partager au niveau métropolitain. En définitive, je le redis, il s'agit uniquement de saboter la mise en place d'une métropole que tout le monde appelle de ses vux et qui correspond aux aspirations de la population.
Nous sommes confrontés à une opération de déstabilisation. Il est très important que le Gouvernement rappelle que le projet de fusion entre les Hauts-de-Seine et les Yvelines n'est pas souhaitable, que la perspective est bien la métropole du Grand Paris et, à terme - nous avons le temps d'y réfléchir d'ici à 2020 -, la fusion des départements et de la métropole pour créer une nouvelle collectivité.
Nous devons poursuivre nos réflexions dans cette voie. Je suis bien sûr disposé à y participer avec ma proposition de loi, qui peut, bien entendu, être discutée et amendée. Je suis tout à fait favorable à ce que le Gouvernement prenne vraiment les choses en mains dans ce dossier.
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