Question de M. LAURENT Pierre (Paris - Communiste républicain et citoyen) publiée le 04/05/2016
Question posée en séance publique le 03/05/2016
M. Pierre Laurent. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.
Depuis deux mois, les manifestations se succèdent. La loi dite « travail » est très majoritairement rejetée par l'opinion publique. Ces mobilisations ont toute légitimité à se poursuivre.
Le Gouvernement s'obstine. Il n'a pas de majorité pour adopter ce texte aujourd'hui. Il serait, paraît-il, prêt à utiliser une nouvelle fois l'arme antidémocratique de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, alors que le retrait du texte serait la seule issue raisonnable.
Dans ce contexte, les consignes données aux forces de l'ordre soulèvent de lourdes interrogations.
Depuis le 9 mars, un scénario identique se répète. La présence inhabituelle des forces de police, en tenue ou en civil, dans les cortèges de manifestants provoque des tensions croissantes et des violences. Des arrestations concernent non des casseurs, mais de jeunes manifestants, des syndicalistes ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Jusqu'où va-t-il aller ?
M. Pierre Laurent. Et les témoignages s'accumulent !
Nous rejetons la violence de quelques casseurs. Elle dessert les mouvements. D'ailleurs, elle est utilisée la droite vient encore de le faire pour tenter de discréditer les mobilisations.
Nous connaissons aussi la fatigue des policiers et la dangerosité de l'exécution d'ordres mettant en cause leur sécurité et celle des manifestants.
Mais les comportements inadmissibles formellement constatés se multiplient. L'usage de la force est disproportionné : utilisation massive de gaz lacrymogènes et, plus grave, de nouveaux lanceurs de balles de défense, qui ont fait perdre un œil à un jeune étudiant en géographie de vingt et un ans ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Éliane Assassi. Un peu de respect, quand même !
M. Pierre Laurent. Monsieur le ministre, allez-vous enfin renoncer à cette stratégie de tension et d'intimidation pour faire respecter, dans la sécurité des manifestants comme des forces de l'ordre, le droit constitutionnel de manifester ?
Allez-vous interdire l'utilisation des lanceurs de balles de défense dans les manifestations, comme le recommande depuis le mois juillet dernier le Défenseur des droits ?
M. le président. Il faut conclure !
M. Pierre Laurent. Je le rappelle, l'usage de ces armes a provoqué trente-neuf blessés graves et un mort entre 2014 et 2015 ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
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Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 04/05/2016
Réponse apportée en séance publique le 03/05/2016
M. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur, au cours de cette séance, j'aurai donc dû répondre à une question de la majorité sénatoriale accusant le Gouvernement de laxisme et à la vôtre, dans laquelle vous affirmez que nous donnons des consignes de violence aux forces de l'ordre !
Mme Éliane Assassi. Contrairement à M. Trillard, nous sommes dans les manifestations !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. En résumé, lorsqu'il s'agit de manipuler et de travestir la réalité de l'action des forces de l'ordre, le parti de l'outrance sait se réunir ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du RDSE. - Vives protestations sur les travées du groupe CRC et du groupe Les Républicains.)
Monsieur Laurent, dans votre question, vous n'avez eu aucun mot pour les dix-huit mille policiers blessés et leurs huit collègues décédés, victimes de violences, l'an dernier ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)
Vous n'avez eu aucun mot pour les policiers et les gendarmes qui assurent depuis des mois, face à un niveau de menace terroriste extrêmement élevé, la protection des lieux de culte, la protection des Français, quelle que soit leur origine, pour maintenir la paix sociale et préserver les libertés publiques !
C'est proprement scandaleux ! (Applaudissements sur les mêmes travées. - Protestations sur les travées du groupe CRC.)
Je veux rendre hommage à tous nos policiers et gendarmes, qui exposent leur vie pour assurer la protection des autres Français. Nous leur devons reconnaissance et la gratitude. Au cas où cela vous aurait échappé, monsieur Laurent, les policiers sont aussi des travailleurs !
Vous n'avez pas eu un mot pour dénoncer ceux qui manifestent avec masques et cocktails Molotov !
Mme Éliane Assassi. Si !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Nous protégeons les cortèges de ces casseurs pour que ceux qui sont d'authentiques manifestants puissent manifester ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)
Vous n'avez pas eu un mot non plus pour dénoncer les affiches indignes mettant en cause les forces de l'ordre qui accomplissent leur mission ! (Mêmes mouvements.)
M. le président. Il faut conclure !
M. Bernard Cazeneuve, ministre. Dans la République, quand on veut l'apaisement, on ne joue pas constamment la tension ! On ne fait pas croire que le ministre de l'intérieur aurait donné des consignes qu'il n'a pas données ! On recherche la vérité ! C'est cela, la dignité ! Et la dignité, elle n'était pas dans votre question ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC. - Vives protestations sur les travées du groupe CRC.)
M. Pierre Laurent. Monsieur le président, les propos de M. le ministre méritent une réponse.
M. le président. C'est impossible, mon cher collègue ; votre temps de parole est épuisé.
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