Question de M. RAPIN Jean-François (Pas-de-Calais - Les Républicains) publiée le 09/06/2016
M. Jean-François Rapin attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur les fortes inquiétudes exprimées par les responsables des établissements privés de santé.
Le Gouvernement remet actuellement en cause l'existence même des cliniques privées qui emploient pourtant plus de 150 000 personnes et qui prennent en charge plus de 8,5 millions de patients par an. Ce secteur doit faire face à la baisse inique des tarifs hospitaliers et aux inégalités de traitement entre le secteur public et celui du privé qui créent une réelle distorsion de concurrence.
Aussi lui demande-t-il quelles mesures le Gouvernement va prendre afin de préserver les établissements privés de santé, indispensables aux soins dispensés aux Français et créateurs d'emplois sur les territoires.
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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du Premier ministre, chargé de la réforme de l'État et de la simplification publiée le 01/07/2016
Réponse apportée en séance publique le 30/06/2016
M. Jean-François Rapin. Monsieur le secrétaire d'État, je souhaite attirer l'attention du Gouvernement sur les fortes inquiétudes exprimées par les responsables des établissements privés de santé.
Notre système de santé repose sur la diversité et la complémentarité des modes d'exercice des professionnels de santé, libéraux et salariés, et des statuts des établissements de santé, publics et privés.
Si le Gouvernement a, à plusieurs reprises, indiqué son attachement à notre système de santé et à sa richesse, à savoir l'existence de secteurs différents et complémentaires permettant un libre choix pour les citoyens, il remet actuellement en cause l'existence même des cliniques privées, qui emploient pourtant plus de 150 000 personnes et prennent en charge plus de 8,5 millions de patients par an.
Pourquoi asphyxier ce secteur, en prenant à l'encontre de celui-ci des mesures hostiles, qui menacent sa pérennité ?
Permettez-moi, monsieur le secrétaire d'État, d'en citer quelques-unes.
La baisse des tarifs hospitaliers est à l'origine de tarifs inférieurs aux coûts de prise en charge. À cet égard, je trouve très éloquent que les tarifs de 2016 soient inférieurs à ceux qui avaient été fixés en 2004 - et je ne vous décris pas l'évolution des charges...
En outre, moins de 1 % des missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation, les fameuses MIGAC, a été octroyé aux établissements privés de santé, malgré l'implication de ceux-ci dans les missions de service public.
Par ailleurs, ces derniers sont inéligibles au crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi et au pacte de responsabilité et de solidarité : ce sont les seules entreprises qui n'en bénéficient pas.
Enfin, de nombreuses mesures discriminatoires conduisent à une inégalité de traitement entre les secteurs public et privé.
Je veux rappeler que les cliniques privées sont des acteurs économiques nationaux, car ces entreprises ne délocalisent pas, des acteurs économiques responsables, qui assurent des missions de service public et participent, aux côtés du secteur public, à garantir en toute sécurité des soins de qualité à la population sur tout le territoire, et, enfin, des acteurs économiques dynamiques, le secteur ayant su se restructurer depuis vingt ans pour faire évoluer les établissements, adapter les organisations et moderniser l'offre de soins aux Français.
Monsieur le secrétaire d'État, quelles mesures le Gouvernement a-t-il l'intention de prendre - c'est urgent ! - pour arrêter cet abandon et endiguer cette « mort lente » de l'hospitalisation privée ? Cette dernière est indispensable au maintien de l'offre de soins aux Français et créatrice d'emplois sur les territoires !
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Jean-Vincent Placé, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé de la réforme de l'État et de la simplification. Monsieur le sénateur Rapin, notre système de santé est riche d'une diversité de structures et de statuts à laquelle nous sommes tous attachés.
Il n'a jamais été question de remettre en cause ce choix d'une mixité des établissements de santé. Nous ne cherchons pas non plus à opposer un secteur à l'autre ; en revanche, nous assumons l'idée selon laquelle une clinique n'est pas un hôpital.
Raisonner comme l'a fait le gouvernement précédent, en instaurant une convergence tarifaire injuste et injustifiée, c'est justement faire fi de cette diversité des missions, des obligations, mais aussi des contraintes.
Les hôpitaux publics jouent un rôle spécifique dans la prise en charge de nos concitoyens ; Marisol Touraine a souhaité reconnaître ce rôle par la réintroduction du service public hospitalier.
Notre souci est l'équité ; la loi de modernisation de notre système de santé a ainsi prévu qu'un établissement privé puisse être éligible au service public hospitalier, s'il en respecte les obligations.
C'est ce même principe d'équité qui a présidé, depuis 2012, à la construction des campagnes tarifaires : hors crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi, le CICE, et pacte de responsabilité et de solidarité, les taux d'évolution des tarifs des hôpitaux et des cliniques ont été fixés au même niveau à l'occasion des deux dernières campagnes.
C'est ce même principe, encore, que la ministre applique en matière de réorganisation de l'offre territoriale. Le plan d'investissement dont Marisol Touraine a récemment annoncé la mise en place sera ouvert, s'agissant en particulier de son volet numérique, à l'ensemble des acteurs de l'hospitalisation.
Mme la ministre ne méconnaît pas pour autant les difficultés que peuvent rencontrer certaines cliniques. Ces difficultés sont hétérogènes : elles dépendent du type d'établissement et de la nature de ses activités.
Dans ce contexte, les besoins de financement des cliniques privées, tout comme ceux des hôpitaux publics et des établissements privés à but non lucratif, font l'objet d'une attention particulière. Ces difficultés seront étudiées d'ici à la fin de l'année, et nous trouverons, pour celles qui le justifient, des réponses appropriées. Vous pourrez alors évidemment, monsieur le sénateur, attirer l'attention du Gouvernement sur la situation de ces établissements.
La politique du Gouvernement vis-à-vis des cliniques privées ne doit pas être caricaturée à l'excès. L'objectif de la ministre des affaires sociales et de la santé est de garantir l'accès aux soins de tous les Français en tout lieu de notre territoire, sans restriction, par la mobilisation de l'ensemble des professionnels et des structures, quel que soit leur statut.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-François Rapin.
M. Jean-François Rapin. Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse. Si le Gouvernement assume de défendre la position selon laquelle les cliniques sont différentes des hôpitaux, j'assume, quant à moi, d'avoir été, selon vos propos, excessif. Rien ne me rassure, en effet, dans votre réponse.
Mon intention n'est pas d'opposer le secteur public et le secteur privé, d'autant que dans ma région, les Hauts-de-France - j'ai souvent eu l'occasion de me pencher sur cette situation au titre de mon mandat de conseiller régional -, certains territoires ne sont couverts que par l'hospitalisation privée. Vous avez d'ailleurs vous-même parlé de territorialisation, monsieur le secrétaire d'État. Si nous voulons parvenir à l'égalité de tous les citoyens devant l'accès aux soins, nous devons tenir compte du fait que, sur certains territoires, là où l'hôpital public n'est pas présent, c'est le secteur privé qui prend le relais.
Je souhaite donc que nous puissions maintenir la confiance accordée à nos cliniques privées, d'autant que celles-ci représentent parfois, sur certains territoires, l'unique offre de soins, sans compter qu'elles sont pourvoyeuses d'emplois. Les assommer avec des normes, des charges et des réglementations qui nuisent à leur bon développement, ce n'est assurément pas loyal !
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