Question de M. MASSON Jean Louis (Moselle - NI) publiée le 22/09/2016

M. Jean Louis Masson attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur l'article L. 161-22-1A du code de la sécurité sociale introduit par la loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014 garantissant l'avenir et la justice du système de retraites. Dorénavant toute personne ayant une activité mais percevant déjà une retraite ne peut plus accumuler des droits supplémentaires même si elle paye des cotisations de retraite au titre de son activité. Cette mesure est pénalisante pour les maires et autres élus locaux ayant une retraite professionnelle. Face à l'absence de réponse du Gouvernement à ses questions écrites sur le sujet, l'auteur de la présente question avait déjà été obligé de poser une question orale n° 1337 lors de la séance du Sénat du 15 mars 2016. La réponse a clarifié la problématique des cotisations volontaires des élus locaux aux caisses complémentaires (caisse autonome de retraite des élus locaux - CAREL et fonds de pension des élus locaux - FONPEL). Selon cette réponse, la loi du 20 janvier 2014 ne s'applique pas à ces deux caisses car les dispositions « visent seulement les régimes de retraite obligatoires ». La réponse esquivait l'institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'État et des collectivités publiques (IRCANTEC) mais dans la mesure où l'IRCANTEC est un régime obligatoire, on en déduisait que ses cotisations tombaient sous le coup de l'article L. 161-22-1A. Faute de réponse à de nouvelles questions écrites, l'auteur de la présente question a contacté directement le responsable du bureau « régimes des retraites de base » au ministère, lequel refuse de s'exprimer sur le sujet. La direction de l'initiative parlementaire du Sénat a alors saisi le ministère en indiquant : « Pourriez-vous m'indiquer si les cotisations à l'IRCANTEC, qui est un régime complémentaire obligatoire en application de l'article L. 2123-28 du code général des collectivités territoriales, sont ou non soumises au régime fixé à cet article et, dans la négative, me préciser le fondement de cette exclusion ? N'ayant pu vous joindre par téléphone, je forme néanmoins le vœu que ce courrier appelle de votre part une prompte réponse ». Cette opacité est scandaleuse d'autant que très curieusement l'IRCANTEC vient de publier sur son site internet l'indication suivante : « le principe de cotisations non génératrices de droits en cas de reprise d'activité posé par l'article L. 161-22A du code de la sécurité sociale ne s'applique pas aux élus locaux ». Cette précision serait rassurante pour les élus locaux si elle avait une base juridique solide offrant des garanties de sérieux et de crédibilité. Tel est l'objet de la présente question.

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère des affaires sociales et de la santé, chargé des personnes âgées et de l'autonomie publiée le 12/10/2016

Réponse apportée en séance publique le 11/10/2016

M. Jean Louis Masson. La loi du 20 janvier 2014 prévoit que dorénavant toute personne exerçant une activité mais percevant déjà une retraite ne peut plus acquérir de droits supplémentaires même si elle paye des cotisations de retraite au titre de son activité. Cette mesure est pénalisante pour les maires et autres élus locaux disposant d'une retraite professionnelle.

Face à l'absence de réponse du Gouvernement à mes questions écrites sur le sujet, j'avais déjà été conduit à poser une question orale lors de la séance du Sénat du 15 mars 2016. La réponse a clarifié la problématique des cotisations volontaires des élus locaux aux caisses complémentaires que sont la caisse autonome de retraite des élus locaux, ou CAREL, et le fonds de pension des élus locaux, le FONPEL.

Selon cette réponse, la loi du 20 janvier 2014 ne s'applique pas à ces deux caisses, car les dispositions « visent seulement les régimes de retraite obligatoires ».

La réponse esquivait l'institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'État et des collectivités publiques, l'IRCANTEC. Dans la mesure où l'IRCANTEC est un régime obligatoire, on pouvait toutefois déduire que ses cotisations tombaient sous le coup de l'article L. 161–22–1A du code de la sécurité sociale.

Faute de réponse à de nouvelles questions écrites, j'ai contacté directement le responsable du bureau des régimes des retraites de base au ministère, lequel refuse de s'exprimer sur le sujet.

La direction de l'initiative parlementaire du Sénat a alors saisi le ministère en ces termes : « Pourriez-vous m'indiquer si les cotisations à l'IRCANTEC, qui est un régime complémentaire obligatoire en application de l'article L. 2123–28 du code général des collectivités territoriales, sont ou non soumises au régime fixé à cet article et, dans la négative, me préciser le fondement de cette exclusion ? N'ayant pu vous joindre par téléphone, je forme néanmoins le vœu que ce courrier appelle de votre part une prompte réponse. »

Hélas, trois mois après, ce courrier émanant des services du Sénat n'a toujours pas obtenu de réponse !

Cette opacité est scandaleuse, d'autant que, très curieusement, l'IRCANTEC vient de publier sur son site internet l'indication suivante : « Le principe de cotisations non génératrices de droits en cas de reprise d'activité posé par l'article L. 161–22–1A du code de la sécurité sociale ne s'applique pas aux élus locaux. » Cette précision serait rassurante pour les élus locaux, si elle était fondée sur une base juridique solide, offrant des garanties de sérieux et de crédibilité. Ce n'est, hélas, pas le cas.

Il est temps, madame la secrétaire d'État, que le Gouvernement fournisse des réponses claires, précises et justifiées de manière incontestable afin de ne pas mettre en porte à faux les élus locaux.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie. Monsieur le sénateur, vous m'interrogez sur la prise en compte des spécificités de la situation des élus locaux au regard du cumul entre retraite et poursuite d'une activité donnant lieu à des cotisations.

Une lettre ministérielle de 1996 a déterminé des règles particulières, qui ne permettent pas de cumuler une pension de l'IRCANTEC au titre d'un type de mandat avec le mandat d'un même type. Elles conduisent à suspendre la pension lorsqu'un élu reprend un mandat au titre duquel il reçoit une pension.

Le cumul est, en revanche, possible lorsque le titulaire d'une pension IRCANTEC est élu à un autre type de mandat.

Dans tous les cas, ces règles conduisent l'élu à cotiser et ouvrir des droits à l'IRCANTEC au cours de son mandat.

Or la loi du 20 janvier 2014 a modifié profondément les règles du cumul d'un emploi avec une retraite. Tout en assouplissant les conditions de ce cumul, elle a généralisé le principe de cotisation non créatrice de droits, qui ne s'appliquait jusqu'alors que si la reprise d'activité s'exerçait dans un régime où la pension était liquidée.

La norme législative a une valeur supérieure, elle devrait prévaloir sur la lettre de 1996. Toutefois, l'articulation entre la lettre ministérielle et la loi de 2014 soulève des questions, y compris en matière de gestion.

À titre d'exemple, il faut réexaminer non seulement la question du caractère créateur de droits des cotisations sur laquelle vous m'interrogez, mais aussi les restrictions apportées au cumul entre pension et indemnités.

Ces effets doivent être analysés de près, car ils peuvent varier selon les élus. L'hétérogénéité de leurs carrières professionnelles et la durée plus ou moins significative de leurs mandats ont un impact direct sur le niveau de leurs droits et les pensions qui leur sont versées. Aujourd'hui, la suspension du versement de la pension peut conduire à une baisse des revenus de l'élu pendant son mandat.

A contrario, l'interruption du versement de la pension et la validation de nouveaux droits au titre des cotisations versées peuvent, dans certains cas, conduire à une pension future plus importante. Le passage d'un cadre juridique à un autre peut donc, selon les situations, faire des perdants et des gagnants.

Il n'est donc pas opportun d'arrêter une position définitive qui conduirait, par l'application rigoureuse de la loi, à pénaliser certains élus. Le Gouvernement entend, au cours des prochains mois, poursuivre ses travaux pour clarifier le cadre applicable.

Le Gouvernement n'entend pas, pour autant, modifier la loi, qui a une portée générale et concerne toutes les catégories de retraités.

Dans l'attente, l'IRCANTEC continue, en pratique, à appliquer les règles antérieures.

M. le président. La parole est à M. Jean Louis Masson.

M. Jean Louis Masson. Madame la secrétaire d'État, votre réponse est scandaleuse. Vous savez très bien que vous avez fait du prêchi-prêcha ! Vous n'avez répondu sur aucun point. Voilà deux ans que cette loi est votée, et vous nous dites que vous devez encore réfléchir quelques mois. On a l'impression que vous attendez les élections.

Aujourd'hui, les élus se posent des questions légitimes, et votre seule réponse est : provisoirement on est en train de réfléchir et provisoirement on ne décide rien. Je vous le dis : c'est honteux !

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